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OUVERTURE, musique

Sous son acception la plus générale, l'ouverture désigne le morceau d'orchestre joué à rideau fermé avant une représentation d'opéra, voire avant tout spectacle (ouverture écrite par Beethoven pour son balletProméthée). Le premier exemple connu en est sans doute la petite fanfare intitulée toccata précédant l'Orfeo de Monteverdi (1607) : pendant plus d'un demi-siècle, on trouvera ainsi au début des opéras de brèves toccate, sinfonie, sonateou canzone n'ayant d'autre fonction que d'annoncer le spectacle. Lully, en revanche, compose pour ses opéras (1672-1686) de véritables ouvertures orchestrales dont la forme particulière connaîtra, sous le nom d'ouverture à la française, un succès européen : première partie lente et majestueuse, seconde partie rapide de style fugué, reprise abrégée de la première partie. Les quatre Suites d'orchestre de Bach débutent par de telles ouvertures, et se poursuivent par des danses. Le vocable « ouverture » en arrive ainsi à désigner un tel ouvrage (une suite) dans son ensemble, en d'autres termes une partition instrumentale indépendante en plusieurs morceaux de caractères différents. Une évolution analogue s'observe au xviiie siècle du côté de l'Italie. L'ouverture typique de l'opéra bouffe italien est alors très différente de celle dite à la française : en trois parties également, mais selon le schéma vif-lent-vif, et dans un style mélodique aux rythmes simples, fuyant toute complexité polyphonique. Certaines des premières symphonies de Mozart ne s'en distinguent en rien. D'où, dans ce contexte, l'imprécision non seulement de la terminologie (symphonie ou ouverture), mais également de la destination des œuvres (salle de concert ou théâtre). En 1795 encore, à Londres, les dernières symphonies de Haydn (symphonies au plein sens du terme) seront appelées ouvertures dans les programmes et dans la presse. Au milieu du xviiie siècle commence à se poser le problème des rapports musicaux et dramatiques de l'ouverture et de l'ouvrage lyrique qu'elle précède : Rameau n'y est pas indifférent, Gluck s'y attaque très consciemment (Alceste, Iphigénie en Aulide), Mozart également (Don Giovanni). Beethoven ira si loin en cette direction qu'avec Léonore III il écrira en fait, sans l'avoir voulu sans doute, moins une ouverture qu'un véritable morceau de concert indépendant, se suffisant à lui-même. De ce mouvement type d'ouverture, proche en définitive du poème symphonique, la descendance sera nombreuse (Ouverture sur des thèmes académiques et Ouverture tragique de Brahms). D'autres ouvertures de Beethoven ont avec le drame qui suit des liens très étroits, en particulier celle d'Egmont (premier volet d'une musique de scène pour la pièce de Goethe). Poursuivant en ce sens, le xixe siècle aboutit soit à une manière de pot-pourri sur les thèmes de l'opéra (Rossini), soit à une sorte de résumé thématique (Weber), ce qui de toute façon produit des musiques dont le succès comme pièces de concert isolées est assuré (Mendelssohn, Berlioz, Manfred de Schumann) ; ce siècle donne aussi naissance à la notion de prélude, l'orchestre participant alors dès ses premières notes à l'action elle-même, et ce non seulement au premier acte, mais à chaque acte d'une œuvre (Lohengrin, Les Maîtres chanteurs ou Parsifal de Wagner) : le prélude de Tristan en est l'exemple le plus cité, mais le premier en date reste celui de La Création (Die Schöpfung, 1798) de Haydn. De cette évolution, le terme logique sera paradoxalement la suppression de toute ouverture, la projection immédiate du spectateur et de l'auditeur in medias res, dans le feu non seulement de l'action, mais du dialogue (Salomé de Richard Strauss, Wozzeck d'Alban[...]

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Classification

Pour citer cet article

Marc VIGNAL. OUVERTURE, musique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • COMPOSITION MUSICALE

    • Écrit par Michel PHILIPPOT
    • 6 846 mots
    • 2 médias
    ...succession des mouvements. On peut en effet imaginer que la suite (succession de pièces variées toujours exécutées à la suite les unes des autres) et l' ouverture (dans laquelle on trouve l'alternance des tempi lent-vif-lent ou vif-lent-vif, suivant qu'elle est « à la française » ou « à l'italienne ») ...
  • FORME, musique

    • Écrit par Juliette GARRIGUES
    • 1 673 mots
    L'ouverture est une composition instrumentale placée au début d'œuvres lyriques (opéra, oratorio, opéra-comique) ou instrumentales. La toccata pour trombones et orgue par laquelle débute L'Orfeo de Monteverdi constitue l'exemple le plus ancien d'ouverture à l'italienne ; elle incitera...
  • LULLY JEAN-BAPTISTE (1632-1687)

    • Écrit par Philippe BEAUSSANT
    • 2 185 mots
    • 3 médias
    ...par moments une écriture évocatrice (sommeil de Renaud dans Armide, symphonies guerrières ou pastorales). Il a sinon créé, du moins réglé l' ouverture à la française (lent et pointé, vif et fugué, avec souvent reprise d'un mouvement lent) et donné à la passacaille ou à la chaconne une extension...
  • OPÉRA - Les techniques d'écriture

    • Écrit par Yves GÉRARD
    • 3 817 mots
    • 1 média
    D'abordsimple fanfare annonciatrice du début de la pièce, confiée aux instruments à vent, l'ouverture deviendra un morceau orchestral élaboré, indépendant puis progressivement relié au contenu même de l'opéra. Deux modèles furent adoptés par les compositeurs : celui de la « sinfonia » en trois mouvements...
  • Afficher les 9 références

Voir aussi