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MATIÈRE (physique) États de la matière

La richesse des états de la matière

La thermodynamique peut donc s'appliquer à des propriétés très différentes du caractère fluide ou solide d'un corps et, partant, va permettre l'exploration d'états nouveaux d'un système. Ces états constituent autant d'aspects intéressants de « manière d'être » pertinente de la matière, et le xxe siècle verra une explosion de sujets relatifs à ces propriétés nouvelles. Sans entrer dans les détails, expliquons que des états nouveaux, posant des questions nouvelles, apparaissent lorsqu'on considère des molécules ou des corpuscules de matières anisotropes (ayant une orientation préférentielle) ou bien lorsqu'on considère des milieux inhomogènes, ou bien enfin lorsqu'on s'interroge sur des propriétés structurelles, des organisations aux géométries particulières.

Les milieux anisotropes peuvent conduire, par exemple, à l'étude de transitions entre un comportement parfaitement transparent d'un système et un comportement polarisant. Ainsi, sous l'effet d'un champ électrique, la maille élémentaire d'un cristal peut changer de forme, passer de carrée à rectangulaire, et provoquer un effet notable sur les rayons lumineux qui le traversent (polarisation). Autre exemple lié à l'anisotropie, si l'on place dans un liquide certaines molécules longues en forme de bâtonnets, on observera, en fonction de la concentration en molécules, des transitions de phase correspondant à des configurations aléatoires des molécules, des configurations plus ordonnées où les molécules sont parallèles mais réparties de façon aléatoire, puis des configurations où les molécules sont parallèles et parfaitement alignées dans des couches régulièrement espacées. Ce sont les cristaux liquides utilisés par exemple pour l'affichage des calculatrices ou des portables.

Les milieux inhomogènes, dispersés, fournissent d'autres exemples saisissants d'états de la matière qui ne sont pas réductibles à une division schématique en liquide-fluide. Prenons le cas des argiles. Les argiles sont des pâtes contenant des suspensions très concentrées de microcristaux en forme de disque. Lorsqu'ils sont assez « à l'aise », ces disques sont répartis de façon homogène, désordonnée, et l'argile est une pâte presque solide : on peut la couper au couteau. Sous pression (plus exactement, sous cisaillement), les disques s'empilent et glissent les uns sur les autres comme des piles d'assiettes : l'argile se met à couler comme un liquide (d'où les dramatiques glissements de terrain). On observe donc une transition de comportement sous contrainte (appelée thixotropie) reflétant, effectivement, des états différents de l'argile. Des effets analogues sont exploités pour la mise au point de peintures que l'on coupe au couteau dans le bac, et qui s'étalent comme un liquide lorsqu'on les applique (principe des peintures qui ne gouttent pas).

D'autres effets structurels permettent d'étudier des états plus éloignés encore du fluide ou du solide, mais néanmoins pertinents du point de vue de la science contemporaine : comportement des mousses, des mélanges granulaires, etc.

Après ce tour d'horizon des états de la matière apparaissant en physique de la matière condensée, il convient de décrire, comme singuliers, mais importants, l'état plasma et l'état superfluide quantique.

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Écrit par

  • : chargé de recherche au C.N.R.S., laboratoire de physique de la matière condensée, École polytechnique, Palaiseau

Classification

Pour citer cet article

Vincent FLEURY. MATIÈRE (physique) - États de la matière [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

États désordonnés de la matière - crédits : Encyclopædia Universalis France

États désordonnés de la matière

Éolipile - crédits : D.R.

Éolipile

États de la matière - crédits : Encyclopædia Universalis France

États de la matière

Autres références

  • ÉTAT DE LA MATIÈRE, notion d'

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 1 521 mots

    L'expérience quotidienne permet à chacun d'appréhender la notion d'état de la matière (parfois appelé phase) et celle de transition de phase qui lui est étroitement liée. L'exemple typique est celui des trois états si différents que prend l'eau lorsque sa température varie : à partir de 0 ...

  • MATIÈRE, notion de

    • Écrit par Jean-Marc LÉVY-LEBLOND
    • 2 022 mots

    Le mot « matière » cache sous sa généralité abstraite une origine concrète fort éclairante. En latin archaïque, materia appartient à la langue rustique et désigne la substance dont est fait le tronc de l'arbre, en tant qu'elle est productrice (de branches, de feuilles). L'élargissement successif...

  • PARTICULES ÉLÉMENTAIRES

    • Écrit par Maurice JACOB, Bernard PIRE
    • 8 172 mots
    • 12 médias

    Les physiciens poursuivent l'étude de la structure de la matière dans le but de trouver plus d'unité et de simplicité dans un monde qui nous frappe par sa diversité et son apparente complexité. N'est-il pas remarquable de pouvoir ramener la variété quasi infinie des objets qui nous entourent...

  • ANTIMATIÈRE

    • Écrit par Bernard PIRE, Jean-Marc RICHARD
    • 6 931 mots
    • 4 médias
    ...associé est bâti avec les antiquarks correspondants. Les mésons résultent de la liaison d'un quark et d'un antiquark. Dans cette description moderne, la matière est constituée par trois « générations » de quarks et de leptons, le nombre trois a été établi par les expériences du C.E.R.N. (laboratoire européen...
  • ATOME

    • Écrit par José LEITE LOPES
    • 9 140 mots
    • 13 médias

    L'atome est le terme ultime de la division de la matière dans lequel les éléments chimiques conservent leur individualité. C'est la plus petite particule d'un élément qui existe à l'état libre ou combiné. On connaît 90 éléments naturels auxquels s'ajoutent le ...

  • BOHR ATOME DE

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 369 mots
    • 1 média

    Deux ans après avoir soutenu sa thèse sur la théorie électronique des métaux, le physicien danois Niels Bohr (1885-1962) écrit en 1913 trois articles fondamentaux qui révolutionnent la compréhension de la structure de la matière. Le premier, paru le 5 avril dans le Philosophical Magazine...

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Voir aussi