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KRONECKER LEOPOLD (1823-1891)

La « multiplication complexe »

Une courbe elliptique X peut être définie, en tant que groupe de Lie complexe, comme un quotient C/Γ, où Γ est un réseau dans C, c'est-à-dire l'ensemble des combinaisons à coefficients entiers (positifs ou négatifs) de deux nombres complexes ω1, ω2 de rapport τ non réel ; à isomorphie près, on peut toujours supposer que ω1 = 1, ω2 = τ, avec Im τ > 0. La théorie des fonctions elliptiques (cf. fonctions analytiques – Fonctions elliptiques et modulaire) introduit les nombres suivants :

sommations excluant le couple (m, n) = (0, 0), de sorte que X s'identifie avec la courbe d'équation :
dans le plan projectif complexe P2(C). On appelle invariant modulaire de X le nombre :
qui n'est fonction que du rapport τ ; on montre que deux courbes elliptiques sont isomorphes (en tant que groupes de Lie complexes) si et seulement si leurs invariants modulaires sont égaux.

Un endomorphisme de X s'identifie à une homothétie t ↦ zt de C qui laisse invariant le réseau Γ. L'anneau A(X) de ces endomorphismes contient toujours Z ; on dit que la courbe X admet des multiplications complexes lorsqu'il existe dans A(X) des nombres z non réels, donc vérifiant les relations :

pour des entiers a, b, c, d tels que b ≠ 0, ce qui implique :

Problème sur une balise : pcond -

<pcond asc="_"/>

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en d'autres termes, τ doit être un nombre d'un corps quadratique imaginaire :

(D entier positif non divisible par un carré), et on voit aisément qu'en fait τ doit être un entier de ce corps. A(X) est alors un ordre du corps K, et on montre que, pour tout ordre d'un corps quadratique imaginaire, il y a une courbe elliptique dont cet ordre est l'anneau des endomorphismes.

On s'intéresse particulièrement au cas où A(X) est l'anneau de tous les entiers d'un corps quadratique

et où Γ ⊂ K ; alors Γ est un idéal de A(X) et, pour que deux réseaux Γ, Γ′ dans K donnent des courbes elliptiques isomorphes, il faut et il suffit que ces idéaux appartiennent à la même classe d'idéaux de K. D'après ce qui a été dit plus haut, les nombres j(τ) correspondant à des idéaux Γ d'une même classe t sont donc égaux, et si l'on note cette valeur commune j(t), on voit qu'au corps K sont associés h nombres j(t1), ..., j(th) deux à deux distincts, correspondant aux classes ti(1 ≤ i ≤ h) d'idéaux de K et qu'on appelle les invariants de ces classes. Abel avait affirmé sans démonstration que les nombres j(t) étaient solutions d'équations à coefficients entiers résolubles par radicaux. Kronecker, dans ses publications et deux lettres à Dirichlet et à Dedekind, affirme être en possession des résultats suivants :

(a) Les j(ti) (1 ≤ i  h) sont des entiers algébriques sur K, deux à deux conjugués sur K, et tous les corps K(j(ti)) sont égaux.

(b) Ce corps Ω est une extension abélienne de K, non ramifiée (premier exemple connu de telles extensions de corps de nombres algébriques), et le groupe de Galois de Ω sur K est canoniquement isomorphe au groupe commutatif formé par les classes ti, d'où le nom de corps de classes donné à Ω.

(c) Tout idéal du corps K devient dans Ω un idéal principal.

Il est en outre très vraisemblable que Kronecker connaissait la loi de décomposition dans Ω des idéaux premiers de K, énoncée explicitement quelques années plus tard par H. Weber. Il avait en outre examiné ce qui se passe lorsqu'on adjoint au corps K une racine carrée d'un facteur premier du discriminant de K sur Q, et reconnu que le nombre de facteurs irréductibles en lesquels se décompose l'équation de degré h qui donne les j(ti) est égal[...]

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Classification

Pour citer cet article

Jean DIEUDONNÉ. KRONECKER LEOPOLD (1823-1891) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Leopold Kronecker - crédits : Courtesy of Bildarchiv Preussischer Kulturbesitz BPK, Berlin

Leopold Kronecker

Autres références

  • ALGÈBRE

    • Écrit par Jean-Luc VERLEY
    • 7 143 mots
    ...reprenant une idée de Cauchy qui définissait les nombres complexes comme classes résiduelles de polynômes à coefficients réels modulo le polynôme x2 +1, Kronecker donne, en 1882, les premiers exemples de corps (non triviaux) définis abstraitement en montrant que, avec les notations ci-dessus, le corps ...
  • CANTOR GEORG (1845-1918)

    • Écrit par Hourya BENIS-SINACEUR
    • 2 886 mots
    • 1 média
    ...l’analyse moderne, d’Ernst Kummer (1810-1893), récipiendaire du grand prix de l’Académie des sciences de Paris pour ses travaux en théorie des nombres, et de Leopold Kronecker (1823-1891), grand partisan de constructions effectives fondées sur les nombres entiers, ce qui explique son hostilité aux inventions...
  • CANTOR : THÉORIE DES ENSEMBLES

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 713 mots

    Georg Cantor (1845-1918), professeur de mathématiques à l'université de Halle (Saxe, Allemagne), publie en 1874 dans le Journal de Crelle l'article fondateur de la théorie des ensembles.

    Né à Saint-Pétersbourg (Russie) d'un père danois et d'une mère autrichienne, Cantor réside avec...

  • CORPS, mathématiques

    • Écrit par Universalis, Robert GERGONDEY
    • 6 190 mots
    ...valeur R(x) en x et, comme deux polynômes congrus modulo P(X) ont même valeur en x, cela définit un homomorphisme :
    qui est l'isomorphisme annoncé. La dernière définition des corps de nombres algébriques, qui est, au langage près, celle deKronecker, est ainsi reliée à celle de Dedekind.
  • Afficher les 10 références

Voir aussi