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HISTOIRE (Domaines et champs) Histoire politique

Analyser l'évolution de l'histoire politique qui, durant des siècles, s'est confondue avec l'histoire elle-même, revient à décrire la résurrection et la mutation d'un domaine historique qui, au sortir d'une longue crise durant la première moitié du xxe siècle, s'affirme de nouveau comme un des secteurs les plus dynamiques et les plus porteurs de la recherche historique contemporaine.

Une histoire politique dominante

Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, l'histoire politique apparaît largement dominante dans l'historiographie française et mondiale. À dire vrai, depuis la plus haute antiquité, elle se confond avec l'histoire elle-même, tant celle-ci consiste, pour l'essentiel, en histoire des États et de leurs affrontements, des grands hommes qui les dirigent, des batailles, des traités et des hégémonies. Depuis Hérodote (484 env.-425 av. J.-C.), attaché à rapporter les épisodes de la lutte entre Grecs et Barbares au ve siècle avant notre ère, et Thucydide (460 env.-env. 400 av. J.-C.), son contemporain, adepte d'une méthode plus critique pour décrire, à travers la guerre du Péloponnèse, les luttes entre les cités grecques, en passant par la Vita Karoli écrite à la gloire de Charlemagne par Eginhard au ixe siècle, les chroniques hagiographiques de Jean de Joinville sur Saint Louis au début du xive siècle jusqu'à Voltaire, historien du Siècle de Louis XIV (1755), l'histoire est avant tout politique, même si, au détour, surgissent quelques renseignements sur la géographie, les peuples et les mœurs.

Hérodote - Halicarnasse (Asie Mineure) - crédits : G. Nimatallah/ De Agostini/ Getty Images

Hérodote - Halicarnasse (Asie Mineure)

Thucydide - Athènes - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Thucydide - Athènes

La définition, au xixe siècle, d'une histoire scientifique fondée sur la méthode critique d'établissement des faits, défendue en France par Fustel de Coulanges et qui répond à l'esprit positiviste imprégnant alors l'Europe, modifie, certes, la qualité de l'information, mais ne change en rien la domination de l'histoire politique dans un contexte où règne le nationalisme et où la production historique prend un caractère fortement idéologique. Il en résulte que la plupart des ouvrages publiés dans ce domaine se résument à des chroniques événementielles, des biographies peu soucieuses du contexte ou des relations instrumentalisées idéologiquement.

Dans la première moitié du xxe siècle, il s'agit de livres de caractère académique marqués par la pensée de droite ou d'extrême droite de Daniel Halévy, Pierre Gaxotte ou Louis Madelin, ou encore de travaux historiques mieux fondés, mais dominés par la perspective partisane des spécialistes de la Révolution française comme Alphonse Aulard, tenant de la lecture républicaine de l'événement, ou Albert Mathiez, faisant de Robespierre un socialiste, voire un communiste avant la lettre.

Mais l'histoire politique produit également des œuvres qui frappent par leur modernité et leur souci de donner sens à l'observation historique. En témoignent, par exemple, les travaux de Georges Weill, auteur d'une remarquable Histoire du Parti républicain en France de 1814 à 1870 (1928) et qui tente de saisir, au-delà des étiquettes et des régimes, la continuité des idéologies politiques, les recherches de sociologie électorale d'André Siegfried qui publie en 1913 son Tableau politique de la France de l'Ouest, voire le souci de Charles Seignobos de dégager du flot des événements historiques des notions et des concepts.

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités à l'Institut d'études politiques de Paris

Classification

Pour citer cet article

Serge BERSTEIN. HISTOIRE (Domaines et champs) - Histoire politique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Hérodote - Halicarnasse (Asie Mineure) - crédits : G. Nimatallah/ De Agostini/ Getty Images

Hérodote - Halicarnasse (Asie Mineure)

Thucydide - Athènes - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Thucydide - Athènes

Autres références

  • HISTOIRE (notions de base)

    • Écrit par Philippe GRANAROLO
    • 3 161 mots

    Tandis que la physique étudie le monde sensible ou la chimie la transformation de la matière, l’histoire (mot issu d’un vocable grec signifiant « enquête ») étudie... l’histoire. La plupart des langues européennes désignent également par un même mot l’étude et l’objet de l’étude. Est-ce là une imperfection...

  • LE RÔLE SOCIAL DE L'HISTORIEN (O. Dumoulin)

    • Écrit par Bertrand MÜLLER
    • 995 mots

    Au cours de ces dernières décennies, les scènes d'intervention de l'historien se sont multipliées. Sans changer apparemment de costume, l'historien joue de nouveaux rôles : désormais requis comme témoin ou expert sur des scènes sociales – tribunaux, médias, commissions, etc. –, qui ne sont pas a priori...

  • À DISTANCE. NEUF ESSAIS SUR LE POINT DE VUE EN HISTOIRE (C. Ginzburg) - Fiche de lecture

    • Écrit par François-René MARTIN
    • 1 032 mots

    À distance. C'est sous ce titre que l'édition française de l'ouvrage de Carlo Ginzburg rassemble les neuf essais qui le composent (Gallimard, Paris, 2001). Le livre est traduit trois ans après sa publication en italien chez Giangiacomo Feltrinelli Edition sous le titre d'Occhiacci...

  • L'ÂGE DES EXTRÊMES. HISTOIRE DU COURT XXe SIÈCLE (E. Hobsbawm)

    • Écrit par Marc FERRO
    • 805 mots

    L'Âge des extrêmes (Complexe-Le Monde diplomatique, 1999) constitue le quatrième et dernier tome d'un ensemble d'ouvrages qui ont analysé le destin des sociétés depuis la fin du xviiie siècle. Le premier tome, L'Ère des révolutions, traite de la transformation du monde...

  • AGERON CHARLES-ROBERT (1923-2008)

    • Écrit par Benjamin STORA
    • 776 mots

    Historien de l'Algérie contemporaine, Charles-Robert Ageron est né le 6 novembre 1923 à Lyon. Il était issu d'une famille de petits patrons d'atelier. Son père dirigeait une modeste entreprise de mécanique. Bachelier en 1941, il s'inscrit à la faculté des lettres de Lyon où l'un de ses professeurs...

  • AGNOTOLOGIE

    • Écrit par Mathias GIREL
    • 4 992 mots
    • 2 médias

    Le terme « agnotologie » a été introduit par l’historien des sciences Robert N. Proctor (université de Stanford) pour désigner l’étude de l’ignorance et, au-delà de ce sens général, la « production culturelle de l’ignorance ». Si son usage académique semble assez circonscrit à la ...

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Voir aussi