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FRANCE (Histoire et institutions) Le temps des révolutions

Dès le début de l'année 1789, alors que se préparait la réunion des États généraux voulue par le roi Louis XVI, on parlait, en France, d'« Ancien Régime ». Les événements ultérieurs donnèrent à l'expression une dimension radicale qu'elle n'avait pas nécessairement dans son principe. Il n'empêche que la période qui s'ouvre en 1789 fut bien d'abord marquée par ce sentiment d'une coupure entre un avant – que l'on jugeait périmé ou que l'on regrettait – et un après, pour la forme duquel on débattait et combattait. Si l'on doit chercher une unité dans la période qui, en France, s'étend de 1789 à 1944, c'est bien dans ce sentiment d'une déchirure dans le cours du temps qu'on la trouvera. Cette conscience d'une rupture a un nom, proposé dès 1789 : la révolution. Le mot désigna d'abord, tout au long de la période, l'événement fondateur de 1789. Puis il servit à plus que cela. Il permit d'identifier les répliques, au sens sismique du terme, de l'événement inaugural : 1830 et 1848. Il désigna aussi le changement à venir : celui dont on put deviner l'annonce dans les événements français de 1871, russes de 1917, voire allemands de 1933. Il permit enfin de nommer les bouleversements majeurs du temps : ceux de la révolution industrielle, de la révolution démographique, de la révolution des transports, de la révolution de l'imprimé, de la révolution pastorienne, de la révolution darwinienne, des différentes révolutions artistiques. Pour la France, plus que pour tout autre État en raison du précédent de la « grande » révolution, la période 1789-1944 fut d'abord le temps des révolutions – au point que la nation elle-même, dont la souveraineté fut proclamée en 1789, semble s'être définitivement construite dans le processus révolutionnaire inauguré à ce moment-là.

Les trois moments de la Révolution française

Rappelons les enjeux de la Révolution française, tels qu'ils furent perçus par les contemporains, puis véhiculés par le discours sur la Révolution, jusqu'à la fin de la IIIe République. Globalement, ce que l'on qualifia rapidement de Révolution française fut séparé en trois moments ; et l'on put, par la suite, décréter n'adhérer qu'aux principes de l'un ou l'autre de chacun d'entre eux.

Prise de la Bastille - crédits : MPI/ Hulton Royals Collection/ Getty Images

Prise de la Bastille

Il y avait d'abord la Révolution de 1789, celle de la prise de la Bastille, de la nuit du 4-Août et de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Celle-là avait aboli la société d'ordres et proclamé l'égalité des citoyens et la souveraineté de la nation. Elle s'accommodait de la monarchie, pourvu que celle-ci fût constitutionnelle, c'est-à-dire issue d'un contrat entre le roi et la nation : la cocarde bleu-blanc-rouge était le symbole de cette union. Elle ne demandait pas que le suffrage fût universel, ainsi que le prouvait la première des Constitutions de la France, celle de 1791, qui distinguait entre les citoyens « actifs » et « passifs », les premiers, seuls, disposant du droit de vote. Parmi les visages qui incarnèrent ce premier moment de la Révolution, retenons celui, grêlé, de Mirabeau, dont les révolutionnaires firent entrer les cendres, après sa mort en 1791, dans le nouveau Panthéon.

Ensuite venait 1792, l'année de la prise des Tuileries, de la proclamation de la République, de la bataille de Valmy et de l'an I du nouveau calendrier. Cette Révolution-là fut portée par le mythe des soldats patriotes partant défendre leurs fils et leurs compagnes contre la tyrannie, ainsi que le chantait Rouget de Lisle dans le Chant de guerre de l'armée du Rhin, qui allait devenir La Marseillaise. Elle semblait romaine, c'est-à-dire vertueuse et guerrière, prête à exporter ses idéaux, et ne voulant[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire contemporaine à l'université Grenoble Alpes

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Pour citer cet article

Sylvain VENAYRE. FRANCE (Histoire et institutions) - Le temps des révolutions [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Ernest Renan - crédits : Hulton-Deutsch Collection/ Corbis/ Getty Images

Ernest Renan

Louis Pasteur - crédits : O.Golovnev/ Shutterstock

Louis Pasteur

Prise de la Bastille - crédits : MPI/ Hulton Royals Collection/ Getty Images

Prise de la Bastille

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