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ENCYCLOPÉDIE

Les temps modernes

Après la tentative valeureuse et gigantesque de l'éditeur Panckoucke, cette Encyclopédie méthodique faite de nombreux traités, le genre entre dans une nouvelle ère. Le temps n'est plus des réflexions critiques de Bayle ou de Diderot ; l'encyclopédisme s'inscrit dans les besoins didactiques de la révolution industrielle et prend des styles différents suivant les cultures. En Allemagne, c'est le règne du Konversations-Lexicon (mot écrit ensuite Lexikon) de l'éditeur Brockhaus et de ses concurrents (Meyers Grosses Konversations-Lexikon en 46 volumes, 1840-1852), avec une initiative d'une autre nature, la titanesque Allgemeine Enzyklopädie der Wissenschaften und Künste de Ersch et Gruber, 167 volumes de 1818 à 1879, inachevée.

Chez les Anglo-Saxons, on développe Chambers (Cyclopædia de Rees), on adapte Brockhaus (Encyclopædia Americana, et d'autres) et la Britannica se développe ; après la 9e édition, son capital passe aux États-Unis. Une entreprise échappe à l'alphabétisation et adopte une démarche originale : c'est celle du poète et philosophe Samuel Taylor Coleridge (25 volumes, 1817-1845 ; 2e édition en 40 volumes, 1848-1858), appelée Encyclopædia Metropolitana.

La formule pratique de Brockhaus est reprise en Italie, en Europe centrale, en Russie, et aussi en France (Dictionnaire de la conversation et de la lecture, 1833-1851). Mais l'apport français au genre encyclopédique concerne l'enrichissement du dictionnaire de langue par de la terminologie et, sur certaines unités de désignation, par des développements de nature encyclopédique. Le système est amorcé par le dictionnaire des frères Bescherelle, grammairiens notoires, (1846) et mis au point dans le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle du pédagogue Pierre Larousse, aussi novateur sur le plan éditorial qu'intellectuel. Le ton polémique et personnel de cette somme restera unique ; elle évoque le ton du xviiie siècle.

Devenu phénomène d'édition, avec les dimensions économiques que cela suppose, l'encyclopédisme qui se construit en Europe occidentale au cours du xixe siècle va envahir la planète entière au xxe, y compris les régions du monde où une tradition ancienne prospérait depuis des siècles : Chine, Japon et Islam en tête.

L'encyclopédisme éditorial, pendant une partie du xxe siècle, porte la marque des idéologies affrontées (comme le reste de l'édition officielle). Le modèle anglo-saxon est bien représenté par la Britannica, qui se renouvelle. Pour sa 13e édition (1926), elle s'offre des signatures de prestige : Einstein signe « Space-time », Freud « Psychoanalysis » et Trotsky « Lenin ». Puis elle renouvelle son classement pour la 15e édition (1974) et devient d'intention mondiale quand la direction étatsunienne articule trois rédactions : américaine, européenne et asiatique. Ce didactisme anglo-saxon d'intention objective reflète une idéologie ouverte et démocratique, sans cesser de s'inscrire dans une vision du monde spécifique.

Marcellin Berthelot - crédits : C Gerschel/ Hulton Archive/ Getty Images

Marcellin Berthelot

En France, une encyclopédie alphabétique de qualité, confiée au chimiste et grand universitaire Marcelin Berthelot (1827-1907), et dont plusieurs auteurs sont notables, en particulier dans les sciences humaines, relève d'un modèle intellectuel très voisin. Si on la compare à l'édition contemporaine de la Britannica ou à une encyclopédie allemande, la spécificité culturelle de chacune est claire. Mais les intentions d'ouverture démocratique sont communes.

La situation fut différente dans certains pays soumis à des régimes autoritaires. Dans l'Italie fasciste, l'Enciclopedia italiana, dirigée par Giovanni Gentile (1929-1939), est nécessairement plus orientée – plus vers un nationalisme élitiste, d'ailleurs, que vers le fascisme. La Grande Encyclopédie soviétique[...]

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Écrit par

  • : conseiller éditorial, dictionnaire Le Robert

Classification

Pour citer cet article

Alain REY. ENCYCLOPÉDIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Francis Bacon - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Francis Bacon

Gottfried Wilhelm Leibniz - crédits : AKG-images

Gottfried Wilhelm Leibniz

D'Alembert - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

D'Alembert

Autres références

  • CARDAN JÉRÔME (1501-1576)

    • Écrit par Jean-Claude MARGOLIN
    • 1 963 mots
    ...1536 et publié en 1550 à Nuremberg, et le De rerum varietate, publié à Bâle en 1557. Le premier, qui comporte vingt et un livres, est une sorte d' encyclopédie universelle des sciences naturelles et des inventions, qui traite de presque tous les sujets possibles (de la cosmologie à la construction...
  • CHAMBERS EPHRAÏM (1680 env.-1740)

    • Écrit par Louise LAMBRICHS
    • 320 mots

    Publiciste et encyclopédiste anglais, né à Kendal, dans le Westmorland et mort à Islington, dans le Middlesex. D'origine modeste, Ephraïm Chambers fit ses études dans sa ville natale, puis entra comme apprenti chez un cartographe qui le poussa à se cultiver. En 1728, il lança, par souscription, l'ouvrage...

  • CHINOISES GRANDES ÉDITIONS

    • Écrit par Pierre-Étienne WILL
    • 974 mots

    L'un des traits remarquables de l'édition chinoise, pratiquement depuis ses débuts et jusqu'à ce jour, est la publication de vastes collections dont la visée n'est pas commerciale, mais idéologique ou politique : manifestation de piété (religieuse ou culturelle selon les cas),...

  • COMMUNS

    • Écrit par Cécile EZVAN
    • 4 050 mots
    • 4 médias
    ...fonciers. Ces communs de la connaissance doivent aussi être conservés et protégés des attaques pour pouvoir être utilisés durablement. C’est le cas d’une encyclopédie en ligne comme Wikipédia, ouverte et d’accès universel, qui enregistre environ 600 millions de visites quotidiennes et 300 000 rédacteurs...
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Voir aussi