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BRAMANTE (1444-1514)

Architecte en Lombardie

Bramante fit ses premières expériences architecturales en Lombardie, avec le sanctuaire de la Pitié, et l'église contiguë de Sainte-Marie près San Satiro. Dans le sanctuaire de la Pitié, remontant au ixe siècle, l'architecte garda la structure originale, dissimulant simplement la partie basse – en forme de croix grecque – par une base circulaire, et insérant la petite coupole dans un tambour polygonal. Un puissant mouvement de surfaces et de masses contrastantes caractérisait ainsi la partie supérieure du temple à l'extérieur, tandis que le rythme circulaire de la base en rétablissait l'unité. En recouvrant la construction par un assemblage de surfaces et de trompe-l'œil, Bramante adoptait un parti déjà utilisé à Urbino et à Bergame.

Il appliquera de nouveau ce principe à Sainte-Marie près San Satiro : son projet initial était trop important pour l'espace disponible ; cet édifice à trois nefs et à vaste transept aurait dû avoir un chœur d'égale importance qui ne put être construit faute de place (une rue qu'on ne pouvait dévier). Bramante ne voulut pas renoncer à un chœur aux proportions grandioses et réalisa donc une structure en trompe l'œil, peinte et modelée dans le stuc. Grâce à ce procédé, il parvint à donner à cet ensemble de petites dimensions un aspect monumental de type albertien. Le baptistère, inséré dans un angle extérieur de l'église, est à plan central. Le décor de ce petit édifice, conçu comme un sanctuaire, s'inspire en partie de motifs provenant du palais d'Urbino, mais aussi de l'œuvre de sculpteur-architecte de Crema, Agostino de Fonduti.

Du sacré au profane

L'activité de Bramante s'exerça également dans le domaine de l'architecture civile. Nous ne savons pas avec précision à quel moment Ludovic le More lui confie la résidence de Vigenano, sans doute assez tôt, peut-être même vers 1480. Malheureusement, il ne reste que peu de chose des travaux que fit exécuter Bramante (et qui durèrent jusqu'en 1495) ; mais l'aménagement de la grande place qui sert d'atrium au palais ducal et à la cathédrale marque les débuts de Bramante urbaniste.

Il fit les dessins de l'hôpital Majeur de Milan (1485), puis revit les projets présentés pour le couronnement de la croisée du transept de la cathédrale (1488-1490). Il collabora aussi au projet, altéré par plusieurs modifications, de la cathédrale de Pavie (1488). L'espace intérieur des nefs se prolonge dans l'immense articulation du transept et du chœur ; ce dernier est traité comme un édifice à plan central amplifié par une énorme coupole, qui ne sera élevée en fait qu'au xixe siècle. Le parti qui rappelle la vieille église Saint-Laurent à Milan fait de la cathédrale de Pavie une des créations les plus spectaculaires de Bramante. En 1492, alors que la construction était à peine amorcée, l'architecte abandonna le chantier, peut-être en raison de la nouvelle charge qui lui avait été confiée à Milan par Ludovic le More : la construction du chœur de Sainte-Marie-desGrâces dont le prince désirait faire le mausolée des Sforza. Le volume principal est cubique, flanqué de deux absides latérales, et relié à un chœur profond à absides. L'ensemble est complété par une énorme coupole hémisphérique dont la surface interne est rythmée d'imperceptibles jeux d'ombre et de lumière. L'œuvre dénote une parfaite connaissance des idées de Léonard, mais aussi l'influence d'Alberti et de Laurana. La réalisation de cet édifice ne fut malheureusement pas du tout conforme au projet d'origine.

Pendant la construction, on demanda à Bramante des dessins pour l'agrandissement de l'abbaye de Saint-Ambroise ; les travaux portèrent d'abord sur le cloître des chanoines, dont une seule aile fut terminée en 1495,[...]

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Écrit par

  • : consultant auprès des Musées du Vatican pour la restauration des œuvres d'art

Classification

Pour citer cet article

Pasquale ROTONDI. BRAMANTE (1444-1514) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Christ à la colonne, D. Bramante - crédits : Luisa Ricciarini/ Bridgeman Images

Christ à la colonne, D. Bramante

Palais ducal, Urbino - crédits :  Bridgeman Images

Palais ducal, Urbino

Autres références

  • ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - L'architecte

    • Écrit par Florent CHAMPY, Carol HEITZ, Roland MARTIN, Raymonde MOULIN, Daniel RABREAU
    • 16 589 mots
    • 10 médias
    ...Pontelli ou Chimenti Camicia avant tout comme ingénieurs-architectes, et Léonard de Vinci comme ingénieur-artiste, génial autodidacte, et architecte, Bramante, Giuliano et Antonio da Sangallo sont présentés comme des architectes à part entière, véritables phares de la profession autour de 1500. La...
  • CLASSIQUE ARCHITECTURE

    • Écrit par Claude MIGNOT
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  • CLOÎTRES

    • Écrit par Léon PRESSOUYRE
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    ...splendides de la chartreuse de Pavie sont des témoins de la Renaissance milanaise et non l'expression d'une éthique propre à un ordre monastique. La pensée de Bramante règne sans partage au cloître de Sainte-Marie-des-Grâces de Milan. La tension de l'espace, au cloître de Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines,...
  • COLOSSAL, art et architecture

    • Écrit par Martine VASSELIN
    • 3 262 mots
    • 17 médias
    Par extension, le mot colossal a été appliqué au domaine architectural. Vers 1514, Bramante semble avoir inventé l'ordre colossal pour sa propre maison de Rome : une ordonnance de hautes et imposantes colonnes qui embrasse plusieurs niveaux d'habitation et unifie la façade par la puissance de son...
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Voir aussi