AROMATICITÉ
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Propriétés générales des molécules aromatiques
Il résulte de ce qui précède que l'aromaticité est essentiellement liée à la délocalisation des électrons sur toute la molécule. Cette délocalisation entraîne un certain nombre de conséquences.
Aspect énergétique
Si les électrons ne restent pas localisés sur des doubles liaisons indépendantes, mais forment un nuage continu qui s'étend sur toute la molécule, c'est que l'énergie du système est plus basse dans ce dernier état. En d'autres termes, la conjugaison se traduit par une stabilisation du système. L'abaissement de l'énergie est appelé énergie de conjugaison (cette expression est synonyme d'énergie de résonance, mais doit lui être préférée).
Le cas du benzène a été particulièrement étudié. La chaleur dégagée par l'hydrogénation d'une double liaison bisubstituée, mais isolée, est de 112 kJ par mole. Si les trois doubles liaisons étaient indépendantes comme le veut la formule de Kekulé, la chaleur d'hydrogénation de la molécule de benzène serait de 336 kJ. Or, en réalité, elle n'est que de 208 kJ. C'est que l'énergie de la molécule réelle conjuguée est inférieure de 150 kJ à l'énergie de la formule hypothétique de Kekulé. On obtient le même résultat en considérant les chaleurs de combustion.
On notera que l'hexatriène :

À titre indicatif, on peut donner les énergies de conjugaison de quelques molécules aromatiques, énergies calculées à partir de la formule de Kekulé :
benzène
150 kJ naphtalène 322 kJ anthracène 485 kJ azulène 192 kJ
Plus l'énergie de conjugaison est grande, plus le système est stable. Comme application, nous signalerons le cas de l'azulène et du naphtalène, qui sont isomères et dont les formules de Kekulé de référence ont même énergie puisqu'elles contiennent le même nombre de doubles et de simples liaisons. L'azulène est donc moins stable que le naphtalène, ce qui explique qu'une élévation de température en présence de catalyseur (soufre) le transforme en naphtalène.
Incidence sur la géométrie moléculaire
Nous avons vu que dans le benzène la délocalisation des électrons entraînait l'uniformisation des longueurs de liaisons. Ce phénomène est absolument général, mais l'uniformisation ne peut être aussi parfaite dans toutes les molécules où les liaisons occupent des positions respectives différentes. Par exemple, dans le naphtalène, les distances interatomiques sont (en nm) :

Dans l'azulène, les liaisons périphériques mesurent toutes approximativement 0,14 nm, mais la liaison binucléaire 0,147 nm. Dans le graphite, toutes les distances C − C sont évidemment égales : 0,142 nm.
Charges électroniques
On peut penser a priori que la délocalisation des électrons va se traduire par un déplacement de charge électronique. Initialement neutres, les atomes vont se charger positivement ou négativement selon qu'ils vont s'appauvrir ou s'enrichir en électrons π. Dans une molécule comme le benzène, la symétrie de la molécule interdit un tel déplacement, mais il n'en sera pas de même dans toutes les molécules.
Considérons d'abord les hydrocarbures. Deux cas se présentent : ou bien la molécule ne contient que des cycles pairs (hydrocarbures benzénoïdes), ou bien elle possède au moins un cycle impair (fulvène, azulène et molécules dérivées : benzofulvène, benzoazulène...). Dans les premières molécules, appelées encore hydrocarbures alternants, les charges nettes des atomes de carbone sont pratiquement nulles, si bien que le moment dipolaire de ces molécules est très faible, quelques dixièmes de debye au plus (à moins que par raison de symétrie celui-ci soit identiquement nul). Dans les secondes, qualifiées de non alternantes, les charges nettes peuvent être assez importantes et la molécule est polaire. Par exemple, pour le fulvène le moment est de l'ordre de un debye, pour l'azulène il est aussi de cet ordre de grandeur ; pour des molécules plus volumineuses, il peut atteindre plusieurs debyes.
Le cas des molécules qui contiennent des hétéroatomes est un peu différent. Ici encore plusieurs cas sont à distinguer. Si la molécule ne contient qu'un hétéroatome plus électronégatif que l'atome de carbone, cas qui se rencontre dans la pyridine, l'atome d'azote sera porteur d'une charge négative. Mais si l'hétéroatome participe à la conjugaison par deux élect [...]
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Écrit par :
- André JULG : professeur émérite à l'université de Provence
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Pour citer l’article
André JULG, « AROMATICITÉ », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 08 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/aromaticite/