Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ANTIQUITÉ Le droit antique

Babylone

À la différence de l'Égypte, la Mésopotamie Babylone a fourni une documentation juridique considérable, qui s'échelonne sur une période aussi longue que celle de l'histoire de l'Égypte ancienne. Ce droit, conservé par des textes en écriture cunéiforme, est pour cette raison souvent appelé « droit cunéiforme ». L'aire géographique du droit cunéiforme dépasse d'ailleurs très largement la Babylonie et même la Mésopotamie. Elle s'étend jusqu'à l'Asie Mineure et aux côtes orientales de la Méditerranée. Par suite du hasard des fouilles, notre information est très inégale selon les régions et les époques. La Mésopotamie et surtout Babylone bénéficient, ici, d'une situation privilégiée.

On dispose en effet pour Babylone et, de façon plus limitée, pour certaines cités de la basse Mésopotamie de deux catégories de documents juridiques : des textes législatifs qualifiés traditionnellement, mais un peu abusivement, de codes (fragments du « code » d'Ur-Nammu, fondateur de la IIIe dynastie d'Ur vers 2080 ; fragments de la législation de la ville d'Ešnunna, vers 1950-1900 ; fragments du « code » de Lipit-Ištar, roi d'Isin vers 1875, et surtout stèle du Louvre conservant le « code » d'Hammourabi, 1728-1686) et d'innombrables tablettes dont le déchiffrement est loin d'être achevé, et qui font connaître des actes de la pratique, ventes, donations, contrats de prêt, de louage, décisions judiciaires. Cette documentation se poursuit, non sans lacunes, depuis la Ire dynastie babylonienne (1810 env.) jusqu'au ve siècle avant notre ère. Elle témoigne, compte tenu d'inévitables différences de détail au cours de cette longue période, d'une remarquable stabilité de l'organisation sociale et des règles de droit.

Les rois législateurs (Ur-Nammu, Lipit-Ištar, Hammourabi) invoquent le patronage des dieux. Il est possible que, dans la conception la plus ancienne, la loi soit apparue comme l'œuvre des dieux. À l'époque historique, c'est le roi qui « exerce » le pouvoir législatif, mais sous l'inspiration des dieux. La stèle d'Hammourabi montre le dieu Soleil qui dicte la loi au roi et celui-ci déclare dans l'épilogue de son code : « C'est moi auquel Samaš a fait présent des lois. » Du fait de l'origine du pouvoir royal, la source du pouvoir législatif est nécessairement divine. Mais le code d'Hammourabi n'est pas une loi religieuse. C'est un « règlement de paix » qui doit faciliter la fusion des peuples de Sumer et d'Akkad que, par la conquête, le roi a réunis sous son autorité. L'œuvre est d'ailleurs composite, mêlant dispositions anciennes, de traditions akkadienne ou sumérienne, et règles nouvelles. Malgré son ampleur, le « code » (et c'est pourquoi ce terme est abusif) ne règle pas tout le droit. Sur certaines matières, il omet les dispositions fondamentales, supposées connues de tous, pour ne préciser que des points de détail ; mais il couvre les domaines les plus importants du droit : organisation judiciaire, procédure, droit pénal, régime foncier, contrats, droit de famille ; à plusieurs reprises, il invoque des principes de justice pour protéger les faibles contre l'arbitraire et assurer la liberté de chacun ; cependant, le droit pénal se montre plus répressif qu'en Égypte.

Structures sociales

Stèle du code de Hammourabi, roi de Babylone - crédits : Art Media/ Heritage-Images

Stèle du code de Hammourabi, roi de Babylone

La société babylonienne fait preuve, à travers les siècles, d'une étonnante stabilité. Elle ne connaît pas, comme l'Égypte, des alternances de périodes, d'individualisme et de féodalité. Elle est, d'autre part, caractérisée par l'inégalité des conditions sociales, même parmi les hommes libres. Fonctionnaires du palais et prêtres constituent un groupe de privilégiés. L'exploitation des domaines royaux, largement pourvus par les conquêtes[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris, directeur d'études à l'École pratique des hautes études

Classification

Pour citer cet article

Jean GAUDEMET. ANTIQUITÉ - Le droit antique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Stèle du code de Hammourabi, roi de Babylone - crédits : Art Media/ Heritage-Images

Stèle du code de Hammourabi, roi de Babylone

Autres références

  • CABINET DE CURIOSITÉS ou WUNDERKAMMER

    • Écrit par Myriam MARRACHE-GOURAUD
    • 4 018 mots
    • 3 médias
    ...des traités et les connaissances livresques. C’est là une orientation majeure de la science de la Renaissance que de confronter les savoirs hérités de l’Antiquité à l’expérience, puis de relire les textes à la lumière des objets. Cette méthode a été initiée par les humanistes curieux d’histoire...
  • L'ANTIQUITÉ RÊVÉE. INNOVATIONS ET RÉSISTANCES AU XVIIIe SIÈCLE (exposition)

    • Écrit par Robert FOHR
    • 1 070 mots

    C'est une exposition remarquable que le musée du Louvre a offerte à son public avec L'Antiquité rêvée. Innovations et résistances au XVIIIe siècle (2 décembre 2010-14 février 2011). À travers un choix de plus de cent cinquante œuvres majeures, l'ambition était d'illustrer la naissance...

  • PROSTITUTION EN EUROPE (HISTOIRE DE LA)

    • Écrit par Yannick RIPA
    • 3 061 mots
    Dans l’Antiquité, la relation entre prostitution et citoyenneté prédomine. Cette dernière repose sur l’autonomie intellectuelle et corporelle de la personne, tandis que la prostitution est considérée comme une soumission au plaisir d’autrui. Ainsi, le citoyen qui se prostitue, assimilé alors à...
  • SURVIVANCE, arts

    • Écrit par François-René MARTIN, Sylvie RAMOND
    • 1 135 mots

    La notion de « survivance » est centrale pour l'histoire de l'art depuis que l'historien de l'art allemandAby Warburg (1866-1929) l'a placée au cœur de son dispositif intellectuel et léguée comme une question essentielle. Nulle autre œuvre que la sienne, après celle de son...

Voir aussi