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POLYNÉSIE FRANÇAISE

Une économie de rente

Une économie de rente agricole, qui sape les cultures vivrières et qui soumet la population à un système de traite, se met en place pour répondre à une demande extérieure dès que les procédés de séchage de l’amande de noix de coco, appelée coprah, et d’extraction de l’huile sont au point, dans la seconde moitié du xixe siècle. De nombreux archipels de l’océan Pacifique se lancent dans cette activité. Les cocoteraies se multiplient, notamment aux îles Sous-le-Vent, aux Marquises et aux Tuamotu. Le paysage actuel, dominé par le cocotier, y est donc récent. Dans l’entre-deux-guerres, 50 000 hectares (soit le septième de la superficie totale des EFO) fournissent chaque année de 20 000 à 30 000 tonnes de coprah. Les cocoteraies assurent des revenus confortables à leurs propriétaires, très largement polynésiens, mais parfois européens ou métis européens-polynésiens (appelés « Demis » dans l’archipel de la Société). Depuis les années 1960, la production polynésienne est en baisse (25 000 tonnes en 1964, à peine plus de 11 000 tonnes en 2016). Bien que résiduelle en raison du vieillissement des cocoteraies, cette filière est soutenue par les pouvoirs publics, qui poussent à une diversification des formes de mise en valeur et à la transformation du produit de base en fibre et bourre de coco ou en huile vierge, parce que la coprahculture est fréquemment la seule source de revenus monétaires pour les habitants des îles éloignées, particulièrement ceux des atolls des Tuamotu.

La nacre est l’autre produit d’exportation des EFO, définitivement dépassée par le coprah au début du xxe siècle, à la suite de la chute des cours de la nacre, concomitante d’une surproduction mondiale. En 1904, une nouvelle législation rationalise l’exploitation qui dépasse certaines années 1 200 tonnes. Peu à peu, la production se concentre dans quelques atolls des Tuamotu et, en raison de l’épuisement des stocks, baisse à partir des années 1950. L’aquaculture nacrière et perlière apparaît à la fin des années 1960. Les fermes se multiplient aux Tuamotu-Gambier, avec une période euphorique dans les années 1990. Depuis les années 2000, la perliculture polynésienne est en crise, car la perle noire se vend moins bien. Le secteur, pour l’essentiel entre les mains de la communauté chinoise qui a su exploiter ses relations avec l’Asie pour la commercialisation, n’est pas assez organisé. Il souffre d’une production trop abondante de perles de qualité médiocre.

L’exploitation du phosphate à Makatea (Tuamotu) est le troisième pilier de cette économie coloniale. La Compagnie française des phosphates d’Océanie (CFPO), fondée en 1908, obtient une concession sur l’ensemble de cette île petite et peu peuplée. Une véritable ville minière sort de terre. La main-d’œuvre asiatique (Japonais, puis Chinois et Vietnamiens) ou originaire des îles Cook, assez proches, est progressivement remplacée, après la Seconde Guerre mondiale, par des Polynésiens français, au départ réticents à y travailler. L’exploitation s’arrête en 1966, avec l’épuisement du gisement, laissant une cité minière fantôme. La CFPO est représentative de la mise en valeur coloniale : exploitation maximale de la ressource jusqu’à épuisement, sans plan de reconversion ; importation de main-d’œuvre et de matériels ; production exportée brute, etc. Au-delà de ces considérations économiques, l’épisode phosphatier a des implications sociales de taille sur le territoire quand la majorité de la main-d’œuvre devient locale. Dans un monde rural, il introduit un mode de travail industriel et une rationalisation du temps, avec des contraintes jusqu’alors inconnues des Polynésiens, telles la régularité et la ponctualité. Si l’arrêt de l’exploitation du phosphate passe presque inaperçu, c’est qu’au même moment s’installe le Centre d’expérimentation du Pacifique[...]

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Écrit par

  • : agrégé de géographie, professeur des Universités, université Côte d'Azur

Classification

Pour citer cet article

Jean-Christophe GAY. POLYNÉSIE FRANÇAISE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Pouvanaa a Oopa - crédits : Jean-Christophe Gay

Pouvanaa a Oopa

Polynésie française [France] : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Polynésie française [France] : carte administrative

Bora Bora, Polynésie française - crédits : Chad Ehlers/ Photographer's choice/ Getty Images

Bora Bora, Polynésie française

Autres références

  • FRANCE (Arts et culture) - Les langues régionales

    • Écrit par Jean SIBILLE
    • 3 702 mots
    • 1 média
    – Polynésie française. Tahitien, marquisien, langue des Tuamotou, langue mangarévienne, langue des Ruturu, langue de Ra'ivavae, langue de Rapa. Ces langues du groupe polynésien oriental sont étroitement apparentées. Elles sont parfois considérées comme des variétés d'une seule et même langue,...
  • OUTRE-MER FRANCE D'

    • Écrit par Jean-Christophe GAY
    • 6 561 mots
    • 7 médias
    ...sont seulement occupées par quelques dizaines de scientifiques et de militaires. Quant aux collectivités françaises du Pacifique ( Nouvelle-Calédonie, Polynésie française et Wallis-et-Futuna), elles sont peuplées aujourd’hui par un peu plus d’un demi-million de personnes. Ainsi, l’on peut parler d’une...
  • GAMBIER ÎLES

    • Écrit par Alain HUETZ DE LEMPS
    • 217 mots
    • 1 média

    Petit archipel de 30 kilomètres carrés situé au sud-est des îles Tuamotu (Polynésie française), auxquelles il est rattaché administrativement. Il comporte quatre îles volcaniques, Mangareva, Taravai, Akamaru et Aukena, encerclées par un même récif-barrière. Les massifs de lave, très disséqués...

  • HEYERDAHL THOR (1914-2002)

    • Écrit par Universalis
    • 180 mots

    Explorateur norvégien. À vingt-deux ans, Thor Heyerdahl, passionné d'ethnologie et de zoologie, s'installe dans l'archipel des Marquises (Polynésie française). Un vieil indigène lui parle du dieu Tiki, fils du Soleil, qui aurait conduit ses ancêtres d'un grand pays d'outre-mer vers ces îles du Pacifique....

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Voir aussi