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MOMIES, Égypte

L'étude scientifique des momies

Actuellement, les techniques d'investigation les plus variées sont mises en œuvre pour étudier les momies. Pratiquement dès la découverte des rayons X par Wilhelm Conrad Röntgen en 1895, les momies conservées dans les musées ont bénéficié de la radiographie. En effet, cette technique apporte quantité d'informations sur la momie tout en respectant son intégrité. À l'heure actuelle, la plupart des momies conservées dans les musées ont été radiographiées ou sont en voie de l'être. Depuis les années 1980, la radiographie est pratiquée sur le terrain dans plusieurs nécropoles de l'oasis de Kharga.

Toutes les techniques utilisées en médecine légale sont mises en œuvre (histologie, anatomopathologie, étude des groupes sanguins, endoscopie, etc.), mais dans certains cas on est freiné par l'altération des corps qu'elles entraînent. Les recherches sur l'ADN commencent à être pratiquées sur les restes humains antiques. Cette dernière technique, bien que de réalisation particulièrement délicate, permet de préciser les rapports de parenté et de découvrir d'éventuelles anomalies génétiques. Elle inaugure une nouvelle approche de l'anthropologie physique.

Ces différentes techniques, lorsqu'elles sont utilisées sur les momies de terrain, c'est-à-dire des groupes statistiquement homogènes, apportent des renseignements précieux sur les populations. On peut ainsi établir une véritable paléodémographie, qui dans certains cas rejoint et confirme les résultats des documents textuels. Ces études, menées sur divers groupes de populations dans la vallée du Nil et dans les oasis, font apparaître une grande homogénéité : il s'agit de populations de type méditerranéen, gracile, présentant un dimorphisme sexuel relativement marqué, la taille en moyenne se situant autour de 1,50 m pour les femmes et de 1,60 m pour les hommes. On note peu de traits négroïdes, essentiellement observés dans le sud. L'âge moyen à la mort est de l'ordre de trente-cinq ans compte non tenu de la mortalité périnatale, très difficile à chiffrer (en principe, les nouveau-nés n'étaient pas momifiés), mais sans aucun doute effroyable.

De même, les études paléopathologiques se rapportant non plus à des individus isolés mais à des groupes bien déterminés prennent beaucoup plus de valeur. Elles permettent d'observer en plus de la traumatologie et des atteintes dégénératives (arthrose vertébrale et articulaire), bien connues par l'étude des squelettes, nombre de maladies médicales voire chirurgicales. Certaines sont encore endémiques en Égypte à l'heure actuelle comme la bilharziose, entraînant des troubles urinaires (émission de sang dans les urines) avec atteinte rénale ou encore atteinte du foie et de la rate, le malade mourant de cirrhose. Cette maladie est essentiellement contractée par les paysans travaillant pieds nus dans les eaux des canaux d'irrigation et des champs inondés. On a pu identifier aussi la tuberculose, des parasitoses (filarioses), la typhoïde, la lèpre, la variole... L'étude radiologique des momies permet de mettre en évidence les stries d'arrêt de croissance, images particulières apparaissant au niveau des os longs (tibias, fémurs, etc.) et survenant lors de maladies prolongées ou de périodes de malnutrition. On peut constater que ces stries sont extrêmement fréquentes dans les populations villageoises alors qu'elles sont très rares sur les momies des pharaons, ce qui n'a rien de surprenant.

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Écrit par

  • : professeur d'histoire des religions à l'université Marc-Bloch, Strasbourg
  • : docteur en médecine, ancien chef du service de radiologie de l'Institut Arthur-Vernes, Paris

Classification

Pour citer cet article

Françoise DUNAND et Roger LICHTENBERG. MOMIES, Égypte [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Vases canopes - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Vases canopes

Sarcophage momiforme, Akhmim, Égypte - crédits :  Bridgeman Images

Sarcophage momiforme, Akhmim, Égypte

Sarcophage d'Artémidoros - crédits :  Bridgeman Images

Sarcophage d'Artémidoros

Autres références

  • BAHARIYA OASIS DE, Égypte

    • Écrit par Françoise DUNAND, Roger LICHTENBERG
    • 1 002 mots

    Un jour de l'été 1996, l'âne d'un gardien du service des Antiquités trébuche dans un trou près de la route qui va de Bahariya à Farafra, non loin de Bawiti, ville principale de l'oasis occidental égyptien. Le gardien, intrigué, en réfère à son supérieur, lequel alerte aussitôt le Dr Zahi Hawass, directeur...

  • ÉGYPTE ANTIQUE (Civilisation) - La religion

    • Écrit par Jean VERCOUTTER
    • 11 389 mots
    • 24 médias
    La protection initiale à assurer est la conservation perpétuelle du corps, de sorte qu'il puisse continuer à vivre dans la tombe et que les principes immatériels de sa personnalité puissent trouver en lui un support permanent. Ce souci a donné naissance à la momification, dont les rites sont à la fois...
  • ÉGYPTE DES PHARAONS (notions de base)

    • Écrit par Universalis
    • 3 525 mots
    • 11 médias
    Les anciens Égyptiens croyaient à la survie après la mort selon une conception dualiste. Momifié, le corps devenu impérissable prolonge son existence dans le monde sous-terrain tandis que ses principes spirituels poursuivent une vie éternelle dans le monde céleste où ils rejoignent la suite du pharaon...
  • GÉNOME HUMAIN

    • Écrit par Gabriel GACHELIN
    • 3 791 mots
    • 1 média
    ...suffisant d’échantillons prélevés dans des sépultures, on peut réaliser une véritable génétique de populations humaines disparues. C’est le cas pour les dépôts de momies dans la Vallée des rois, en Égypte, à partir desquelles il a été possible d’établir un lien entre les personnes inhumées et les populations...
  • Afficher les 9 références

Voir aussi