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MITHRAÏSME

Trouvailles mithriaques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Trouvailles mithriaques

Mithra est beaucoup plus ancien que le mithraïsme. On réserve le terme de mithraïsme au courant religieux que les mystères mithriaques ont véhiculé dans l'Empire romain du ier au iiie siècle de notre ère. Comment s'est formée, voire transformée, cette religion de salut ? Par quelles voies, dans quelles conditions historiques les mystères de Mithra ont-ils gagné l'Occident romain ? Quel impact ont-ils eu dans la conscience religieuse et la société du monde romain ? Autant de questions inégalement éclaircies.

Mithra indo-iranien et achéménide

La place et la fonction du Mithra indo-iranien préfigurent certains aspects du Mithra gréco-romain ; elles expliquent la prééminence du dieu tauroctone dans le mithraïsme occidental. Mithra est le dieu du contrat. Le védique mitrasignifie « ami » ou « contrat ». C'est à ce titre qu'on l'invoque dans les traités, mais aussi en considération de sa souveraineté céleste. Il représente l'aspect juridique de la fonction royale, comme l'a démontré Georges Dumézil. Il s'oppose à Varuna, autre dieu de la souveraineté, comme le jour à la nuit ou comme ce monde à l'autre. Bienveillant, proche de l'homme, ce dieu de la lumière veille sur les justes et la justice, sur le respect des alliances et des serments qui les consacrent.

Mithra subit faiblement le contrecoup de la réforme monothéiste et dualiste de Zarathustra. Bien qu'il fût au nombre des dieux que le prophète semble avoir éliminés du culte ou du moins ignorés, on s'est demandé si le nom d' Ahura Mazda n'avait pas remplacé le couple Mitra-Varuna dans l'ordre inverse, Ahura représentant Varuna et l'épithète Mazda l'aspect bienveillant de Mitra : hypothèse aventureuse. Mais il est certain qu'Ahura Mazda, dieu céleste et gardien de la justice, intègre certains aspects majeurs du Mithra indo-iranien. À l'époque achéménide, le nom de Mésoromazdès, transcription grecque citée par Plutarque, atteste que Mithra était solidaire du « seigneur sage », Ahura Mazda-Oromazdès. Le Yast X de l'Avesta (dernier quart du ve siècle av. J.-C.) célèbre Mithra comme un dieu de l'aurore « qui se lève sur le mont Harâ », qui protège les contrats et les troupeaux ; dieu des combattants qui donne la victoire et la prospérité, dieu guérisseur aussi, il est secourable à ceux qui l'invoquent, mais redoutable aux transgresseurs du serment. Le garant du contrat en est devenu le défenseur armé.

Mithra paraît donc avoir absorbé les attributions guerrières du védique Indra, qu'il partage avec Verethragna. Dieu du jour, le plus brillant des Yazatas ou « adorables », il combat le ténébreux Angra Mainyu, le futur Ahriman. Il veille sur les pâtures à un double titre : comme gardien de l'ordre juridique, donc de la propriété, mais aussi comme garant de la prospérité en faisant tomber la pluie. À bien des égards, le Mithra du mithraïsme restera un dieu pastoral et guerrier.

Il protège la création d'Ahura Mazda, comme Anâhitâ qu'on lui accouple cultuellement ; aussi Hérodote prend-il Mithra pour une déesse.

L'épigraphie officielle d'Artaxerxès II Mnémôn honore Ahura Mazda, Mithra et Anâhitâ. Les rois de Perse juraient par Mithra. Le septième mois de l'année lui était consacré. Le grand roi participait personnellement à ses fêtes par des libations et des danses sacrées. Incontestablement, Mithra avait déjà au ive siècle une place privilégiée dans la religion des Achéménides. Mais ce culte officiel n'a rien de mystérique. On a conjecturé que le mithraïsme s'était élaboré dans un milieu babylonien, parmi les adorateurs de daêvas dont Xerxès prohiba les pratiques (R. C. Zaehner) ; mais les preuves manquent. C'est à l'époque hellénistique et en Asie Mineure que les témoignages se font plus nombreux, sinon[...]

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Écrit par

  • : ancien membre de l'École française de Rome, professeur à l'université de Lyon-III

Classification

Pour citer cet article

Robert TURCAN. MITHRAÏSME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Trouvailles mithriaques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Trouvailles mithriaques

Ex-voto dédié au dieu Mithra - crédits : H. Paitier/ Inrap

Ex-voto dédié au dieu Mithra

<it>Groupe de Mithra taurochtone</it> - crédits :  Bridgeman Images

Groupe de Mithra taurochtone

Autres références

  • CORRIDA

    • Écrit par Barnaby CONRAD
    • 10 675 mots
    • 7 médias
    ...le concurrent majeur de l'Église chrétienne naissante était Mithra, dieu païen d'origine perse dont le culte s'était répandu dans tout l'Empire romain. La principale cérémonie liée au culte mithriaque était le sacrifice d'un taureau, rappelant celui que Mithra aurait égorgé selon le mythe, exploit dépeint...
  • GAULE

    • Écrit par Jean-Paul DEMOULE, Jean-Jacques HATT
    • 26 438 mots
    • 4 médias
    Si le culte de Cybèle a recruté surtout des adeptes dans les villes, dans la région du Rhône et en Aquitaine, le culte de Mithra a été apporté en Rhénanie par les militaires principalement par les légionnaires venus des Balkans et d'Orient. Il est représenté en Germanie par un nombre assez important...
  • MITRA

    • Écrit par Jean VARENNE
    • 340 mots

    Au sommet de la hiérarchie divine, le Veda, dans ses parties les plus archaïques (début du ~ IIe millénaire), plaçait l'Asura Varuṇa, à qui était attribué un coadjuteur en la personne du dieu Mitra. La situation était alors conforme au schéma indo-européen mis en évidence par...

Voir aussi