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ARIOSTE L' (1474-1533)

Le Roland furieux (Orlando furioso) est l'une des œuvres les plus célèbres (peut-être pas les plus lues) de la Renaissance, avec son extraordinaire diversité, qui ne rompt pas l'équilibre de la composition. Mais connaît-on aussi bien son auteur, Ludovico Ariosto, l'un des plus attachants de l'époque par sa bonhomie, sa sincérité, ses revendications d'écrivain tranquille voué à la morgue et à l'incompréhension de prétendus « protecteurs » ? Héritier de Plaute et de Térence dans ses comédies, héritier d'Horace dans ses Satires l'Arioste est aussi curieusement en avance sur son temps.

Le Roland furieuxn'eut pas moins de 154 éditions au xvie siècle et 24 de 1600 à 1630, mais 7 seulement de 1630 à 1679, puis aucune de 1679 à 1713. Passé le milieu du xviie siècle, dans les cercles cultivés, une désaffection l'atteignit ; le retour en faveur qui se dessina vers le milieu du xviiie et s'amplifia au xixe fut plus lent (il en fut d'ailleurs de même pour Dante). Mais cette désaffection ne s'étendit pas au peuple le moins instruit : le Roland furieux est longtemps resté, comme la Jérusalem délivrée du Tasse, un poème très goûté des auditoires publics de l'Italie du Sud et de la Sicile notamment où il a alimenté le répertoire des déclamateurs des rues et des théâtres de marionnettes géantes (opera dei pupi).

Vie de l'Arioste

Ses origines

C'est dans le duché de Ferrare, qui s'étendait alors des rives de l'Adriatique au voisinage de la mer Tyrrhénienne, qu'est circonscrite la vie de l'Arioste, si l'on fait abstraction de voyages peu désirés auxquels l'obligèrent ses charges à la cour. Issus d'une famille rurale qui s'établit à Bologne au début du xive siècle et passa en majeure partie à Ferrare ou aux environs avant le début du xive siècle, les Arioste se distribuent, au moment où va naître celui qui rendra leur nom célèbre, en plusieurs branches inégales par le rang et la richesse. Certains d'entre eux peuvent se flatter d'une parenté consanguine avec leur prince, car, en 1347, une Filippa Ariosto était devenue l'épouse du souverain régnant, Obizzo III, après avoir été vingt ans sa maîtresse et lui avoir donné treize enfants. Si le père de l'Arioste semble avoir appartenu à une branche de moindre relief, il fit cependant une carrière manifestement appuyée en haut lieu dans l'administration civile et militaire du duché : bien qu'on l'eût accusé à plusieurs reprises de malversations et d'abus de pouvoir, il parvint à la charge très envié de commissaire aux affaires de Romagne et ne la perdit qu'à cause d'un nouvel et retentissant abus. À sa mort, il laissa à ses neuf enfants un appréciable patrimoine et bon nombre de créances à recouvrer, dont une sur son souverain.

Il commandait la forteresse de Reggio quand naquit, le 8 septembre 1474, Ludovico, premier de ses fils. Vingt ans plus tôt la paix de Lodi avait mis un terme aux guerres de suprématie où s'étaient longtemps affrontés les principaux États de la péninsule. Un régime d'équilibre s'était instauré, dont l'artisan le plus constant fut le maître de Florence, Laurent le Magnifique. Jusqu'à l'expédition conquérante du roi de France Charles VIII (1494), la paix ne fut troublée, de 1482 à 1484, que par une action militaire des Vénitiens, dirigée précisément contre le duché de Ferrare de concert avec le pape Sixte IV. Le père de l'Arioste commandait alors la place ducale de Rovigo, qui dut se rendre à l'armée de Venise, le 14 août 1482. Moins de deux ans après, il se fixait avec sa famille à Ferrare, dans la demeure où il devait achever sa vie en 1500 et où son fils aîné vécut jusqu'en 1529, à quatre ans de sa propre mort.

La formation

Ludovico n'était[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis et Paul RENUCCI. ARIOSTE L' (1474-1533) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ROLAND FURIEUX, L'Arioste - Fiche de lecture

    • Écrit par Pascaline NICOU
    • 999 mots

    C'est à Ferrare, important foyer culturel de la Renaissance, que l'Arioste (1474-1533) compose son poème, le Roland furieux, œuvre de toute une vie, qu'il ne cessera de reprendre jusqu'à sa mort. Au pouvoir, la famille des Este accueille et soutient les artistes, qui vantent la culture...

  • ANGÉLIQUE

    • Écrit par Nicole QUENTIN-MAURER
    • 321 mots

    Héroïne de Boiardo, puis du Roland furieux de l'Arioste. Angélique était princesse du royaume de Cathay, aux Indes, quand Roland l'amène en France dans l'espoir de se faire aimer d'elle. Au camp de Charlemagne, Renaud de Montauban s'éprend aussitôt d'elle, et la dispute à son cousin. Charlemagne,...

  • BOIARDO MATTEO MARIA (1441-1494)

    • Écrit par Paul RENUCCI
    • 1 949 mots
    ...d'Hérodote, de Xénophon (sur la version latine de la Cyropédie donnée par le Pogge), de Lucien, d'Apulée. Il annonce par là une génération, celle de l'Arioste et de Bembo, où la versification latine apparaît comme un exercice de bravoure, formateur et vaguement absolutoire, avant l'adoption de...
  • ESTE LES

    • Écrit par Hervé PINOTEAU
    • 564 mots

    Issue des marquis de Toscane au xe siècle, tirant son nom du marquisat d'Este (ville proche de Padoue), la maison d'Este entre vraiment dans l'histoire avec les deux mariages d'Azzo II (mort en 1097). De sa première union avec Cunégonde, héritière des Welf, sortira la branche allemande des Welf...

  • GASCOIGNE GEORGE (1542-1578)

    • Écrit par Henri FLUCHÈRE
    • 573 mots

    Étudiant à Trinity College, à Cambridge, George Gascoigne fit son droit à Gray's Inn et représenta son comté, le Bedfordshire, au Parlement (mal, car il ne put y siéger longtemps à cause de ses frasques). Il mena à Londres une vie assez dissolue pour que son père le déshérite, mais il se refit en...

Voir aussi