Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

GUSTATION

Le mécanisme nerveux de discrimination des saveurs

Données électrophysiologiques

L'exploration électrophysiologique des décharges nerveuses dans la corde du tympan ou le glossopharyngien a permis, mieux que la confrontation des propriétés chimiques des corps actifs et des réponses comportementales, de rechercher le mécanisme nerveux de la différenciation des corps sapides en quatre saveurs.

Avant cette exploration électrophysiologique, on avait imaginé que chaque saveur était engendrée par la stimulation de récepteurs distincts et spécifiques. La répartition topographique des quatre saveurs sur la langue humaine était très anciennement connue : sucrée et salée sur les deux tiers antérieurs, acide sur les bords et amère dans le tiers postérieur ; elle semblait appuyer cette conception simpliste du mécanisme. La stimulation isolée d'une papille fournissait, et fournit encore, des résultats équivoques et controversés. L'analyse des réponses nerveuses, due à C. Pfaffmann et à Y. Zotterman et son école, révèle une structure plus complexe des messages transmis aux centres nerveux, lesquels, ainsi informés, peuvent discriminer les quatre saveurs. L'enregistrement intégré de l'activité dans le nerf entier permet tout d'abord de comparer objectivement l'activité de divers sels et divers sucres sur une même espèce et entre espèces. Ainsi on a montré que chez le rat, pour des concentrations données, une solution de quinine a une activité égale à celle que fournit une solution de saccharose. Pour les mêmes solutions, le chat réagit fortement à la solution de quinine et se révèle pratiquement insensible au sucré. En revanche, pour la solution sucrée, on enregistre chez le lapin une décharge beaucoup plus intense que pour la solution de quinine.

Ces mêmes enregistrements des décharges globales du nerf permettent en outre d'établir les lois quantitatives d'évolution des niveaux d'activation entre le seuil et le plafond d'intensité. L. M. Beidler, utilisant ces paramètres expérimentaux, confirme l'hypothèse suivant laquelle la combinaison entre molécule et substrat obéit à la loi d'action de masse. L'équation développée par l'auteur et rendant compte des données expérimentales est identique d'une part à celle de l'isotherme de I. Langmuir décrivant la dynamique de l'adsorption, et d'autre part à celle qui interprète les liaisons avec un substrat protéique. Cette réponse du nerf entier et, plus tard, l'analyse sur fibre isolée, mettent en évidence le décours temporel des décharges sous stimulation maintenue. Celui-ci varie quelque peu avec la nature des stimuli. Très généralement, par exemple pour le chlorure de sodium, on constate une activité de fréquence élevée au début de la stimulation, déclinant brusquement après deux secondes, puis lentement lorsque la stimulation se prolonge. Les enregistrements, exceptionnellement effectués chez l'homme, semblent bien confirmer que cette dernière phase constitue le mécanisme de l'adaptation (disparition partielle ou complète du goût sous stimulation continue) et que celle-ci relève du mécanisme périphérique et non des centres nerveux.

L'enregistrement des décharges dans les fibres disséquées du nerf a révélé un fait essentiel : ces fibres isolées ne sont pas spécifiques d'une saveur, mais répondent par un même message à la stimulation de deux, de trois ou des quatre stimuli types (par exemple un sucre et la quinine ; le NaCl, un acide et un sucre, etc.). Elles diffèrent cependant les unes des autres par leur sensibilité relative aux divers stimuli. Telle fibre répond à une stimulation par le sel avec le seuil le plus bas et à l'acide et au sucre avec des seuils plus élevés ; une autre est au contraire d'une sensibilité maximale au sucre. Le seuil de réponse pour[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : docteur ès lettres et sciences humaines, docteur en psychologie, professeur de psychologie à l'université de Paris-X-Nanterre, directeur du Centre de psychologie de l'enfant de l'université de Paris-X

Classification

Pour citer cet article

Matty CHIVA. GUSTATION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Médias

Sens : goût - crédits : Planeta Actimedia S.A.© Encyclopædia Universalis France pour la version française.

Sens : goût

Bourgeon du goût - crédits : Encyclopædia Universalis France

Bourgeon du goût

Voies gustatives - crédits : Encyclopædia Universalis France

Voies gustatives

Autres références

  • ARÔMES

    • Écrit par
    • 1 089 mots
    • 1 média

    Ensemble de composés volatils odorants émanant d'un aliment et perçu par la voie rétronasale lors de son absorption. Les arômes représentent une composante de la saveur, résultant elle-même de l'ensemble des sensations gustatives et olfactives. Ces molécules, dont la proportion globale...

  • PHÉROMONES

    • Écrit par
    • 5 572 mots
    ...des phéromones. Karlson (1960), se fondant sur leur mode de perception, les subdivise en deux catégories, selon qu'elles agissent par voie olfactive ou par voie gustative. Wilson (1962), établissant son jugement sur leur mode d'action, distingue les pheromones de déclenchement (releaser pheromones...
  • POISSONS

    • Écrit par et
    • 10 071 mots
    • 18 médias
    Les bourgeonsgustatifs sont abondants dans la muqueuse buccale et pharyngienne. Ils peuvent se rencontrer autour de la bouche (lèvres, barbillons), sur la tête et, dans certaines espèces de Silures et de Loches, se répandre sur toute la surface du corps. L'intervention du sens gustatif ne se limite...
  • SOIF

    • Écrit par
    • 4 150 mots
    • 6 médias
    ...stimuli externes représentés par l'eau deviennent capables de déclencher et de soutenir le comportement de prise orale de liquide. Grâce aux récepteurs gustatifs linguaux, l'eau peut être distinguée des solutions salines de NaCl (jusqu'à une dilution de ces solutions à 0,002 M chez le rat). Cette différenciation...