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GRAVITATION

Laplace, Lagrange, la découverte de Neptune et le triomphe de la gravitation newtonienne

Vers la fin du xviiie siècle, le mathématicien et physicien Joseph Louis Lagrange (1736-1813) propose une écriture différente de la gravitation dans le cadre du calcul des variations et d’une « mécanique analytique » dont la fécondité s’avère rapidement remarquable. La méthode de Lagrange introduit la notion de « potentiel » et celle d’une fonction appelée depuis fonction lagrangienne – ou « lagrangien » – définie comme la différence de l’énergie cinétique et de l’énergie potentielle. La connaissance du potentiel gravitationnel est identique à la connaissance des forces gravitationnelles. Bien que mathématiquement équivalente à la théorie de Newton, cette formulation permet d’accomplir différemment des calculs pour répondre à certaines questions difficiles. Ses résultats dans l’analyse des mouvements de trois corps en interaction gravitationnelle permettent ainsi à Lagrange de montrer, en 1772, l’existence de positions – appelées aujourd’hui « points de Lagrange » – où les forces gravitationnelles de deux astres (le Soleil et la Terre, par exemple) se conjuguent exactement pour qu’un troisième corps de faible masse relative y reste immobile par rapport à ces deux astres. Ces positions se révéleront utiles pour la mise au point de certains satellites artificiels à vocation scientifique comme l’observatoire solaire et héliosphérique Soho (depuis 1995), WMAP (Wilkinson Microwave Anisotropy Probe, depuis 2001) ou les missions Planck Surveyor et Herschel (depuis 2009).

Pierre-Simon de Laplace (1749-1827), mathématicien brillant et homme politique influent, reprend et étend ces travaux dans son monumental Traité de mécanique céleste, publié entre 1799 et 1825. Ses nombreux calculs astronomiques dans le cadre de la formulation lagrangienne font sensiblement progresser la compréhension de la stabilité du système solaire. Laplace émet aussi l’idée qu’un astre de masse très grande serait tel que la lumière ne pourrait pas s’en échapper, préfiguration du concept de trou noir, qui sera développé au xxe siècle.

La découverte de Neptune en 1846 est un des succès les plus remarquables de la théorie de Newton. Au début du xixe siècle, l’astronome français Alexis Bouvard (1767-1843), observateur et calculateur remarquable, est directeur de l’Observatoire de Paris. En utilisant les méthodes mathématiques mises au point par Laplace, il établit par le calcul une compilation précise des tables astronomiques pour Jupiter, Saturne et Uranus. Les observations postérieures confirment les tables pour Jupiter et Saturne, mais font apparaître des anomalies importantes pour Uranus. Bouvard émet alors l’hypothèse de l’existence d’une « planète troublante » qui viendrait perturber la trajectoire d’Uranus. La position prévisible de cette planète inconnue est calculée par le Britannique John Couch Adams (1819-1892) et le Français Urbain Le Verrier (1811-1877). Neptune est découverte en septembre 1846 par l’astronome allemand Johann Galle (1812-1910), avec un écart de 1 degré seulement par rapport à la prédiction de Le Verrier.

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

Classification

Pour citer cet article

Bernard PIRE. GRAVITATION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Système de Ptolémée - crédits : Encyclopædia Universalis France

Système de Ptolémée

Système de Copernic - crédits : Encyclopædia Universalis France

Système de Copernic

Le système de Tycho Brahe - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Le système de Tycho Brahe

Autres références

  • GRAVITATION ET ASTROPHYSIQUE

    • Écrit par Brandon CARTER
    • 8 922 mots
    • 3 médias

    Si l'on excepte la théorie classique de l'électromagnétisme, introduite bien plus tard par James Clerk Maxwell (1865), aucune théorie physique d'expression aussi simple que la loi du carré inverse de la distance, de Newton (1687), n'a jamais été aussi féconde. Si on laisse de côté quelques...

  • INTERACTIONS (physique) - Interaction gravitationnelle

    • Écrit par Alain KARASIEWICZ, Marie-Antoinette TONNELAT
    • 1 968 mots
    • 2 médias

    La gravitation est responsable de phénomènes aussi différents que la pesanteur ressentie par tout un chacun, le mouvement des planètes ou l'expansion de l'Univers. Cette force de gravitation est extrêmement faible entre particules élémentaires, mais ses effets deviennent importants si...

  • ACTION & RÉACTION, physique

    • Écrit par Jean-Marc LÉVY-LEBLOND
    • 1 498 mots
    ...s'agit ici d'un usage plus conforme au sens courant du terme, puisque la question est celle de la capacité des corps à agir l'un sur l'autre sans contact –  telle la force de gravitation du Soleil attirant la Terre à cent cinquante millions de kilomètres de distance. L'attraction universelle de Newton, sous...
  • ANTIMATIÈRE

    • Écrit par Bernard PIRE, Jean-Marc RICHARD
    • 6 931 mots
    • 4 médias
    Indirectement, cette mesure de masse inerte, test de la symétrie matière-antimatière CPT, est aussi sensible aux effets gravitationnels. En effet, selon les principes qui sont à la base de la relativité générale, le temps propre ou, si l'on veut, l'horloge interne du proton et de l'antiproton...
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    ...Au début des années 1980, une modélisation particulière du problème dynamique permit à Jack L. Wisdom de faire une avancée décisive en direction de l'hypothèse gravitationnelle. Il réussit à montrer que des astéroïdes fictifs placés dans la lacune 1/3 pouvaient être déstabilisés sur quelques centaines...
  • ASTRONOMIE

    • Écrit par James LEQUEUX
    • 11 339 mots
    • 20 médias
    ...à partir des lois de Kepler, Newton remonte à la cause première, la loi initiale qui provoque le mouvement des planètes et aboutit à la loi de la gravitation universelle : « Deux corps quelconques s'attirent en raison directe de leurs masses, et en raison inverse du carré de la distance de leur...
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Voir aussi