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FÉDÉRALISME

Au cours du développement, de l'évolution constitutionnelle et de la démocratisation de l'État moderne, un nombre croissant de régimes fédéraux ont vu le jour. Le terme de fédéralisme se rapporte à l'ensemble des pratiques caractéristiques de ces régimes et aux diverses théories qui ont été élaborées pour l'analyser et l'expliquer. Il est captivant, d'ailleurs, de voir comment, depuis l'origine mais plus spécialement à une époque récente, pratique et théorie ont été, à cet égard, en constante interaction. On rencontre au cours de cette enquête les plus grands noms de la philosophie politique, et l'on est conduit à étudier plusieurs États fédéraux (États-Unis, République fédérale d'Allemagne, Suisse, etc.) ou, du moins, certains de leurs traits spécifiques et tout autant le phénomène contemporain d'intégration européenne. Cette étude introduit à une dialectique vivante : le principe de souveraineté va d'un pôle à l'autre, gouvernement local et fédéral, et tire sa force de cette pulsation même, le pouvoir se renforçant de la participation qu'il engendre, de l'opposition qu'il suscite, de la démocratie qu'il favorise.

Ces constatations valent non seulement de la chose politique vécue et exercée dans un État, mais aussi des principaux corps de cet État, ou des plus vivants d'entre eux, syndicats, Églises, universités. Un surcroît de liberté, à tous les niveaux et dans tous les secteurs, est en effet le gain qui peut compenser un certain défaut d'efficacité dû à la décentralisation du pouvoir. Mais la question n'est pas close, car aussi bien le fédéralisme imprègne l'existence quotidienne ; il ne peut en être autrement puisqu'il n'est pas une réalité statique ou étale, mais essentiellement, sauf à disparaître, un processus dynamique toujours nouveau à réassumer.

Fédéralisme et souveraineté

Le concept de fédéralisme a fait longtemps l'objet de vastes controverses juridiques ; on voulait en particulier trouver un « souverain » au sens classique de la théorie de l'État, de Jean Bodin (1529-1596). Les fondateurs de l'Union fédérale américaine avaient tourné la difficulté par une approche très pragmatique. Ils concédèrent la souveraineté à chaque État de l'Union, sans chercher à définir précisément ce que cela signifiait. Le débat portait d'ordinaire non pas sur le fédéralisme en général, mais sur l'État fédéral que l'on opposait à la fédération d'États, et sur le « lieu » de la souveraineté comme critère distinctif. Si les éléments constituants demeuraient souverains, on parlait de fédération d'États, mais si l'union était souveraine, il s'agissait, pensait-on, d'un État fédéral. Toutes les discussions aboutissaient malheureusement à un essai de définition de la « souveraineté », et négligeaient plus ou moins la réalité politique de ces régimes fédéraux. On s'intéressait beaucoup à la « répartition des compétences ». Un tel type de pensée a encore gêné certaines des discussions relatives à l'intégration européenne. D'un point de vue pragmatique, gouvernement centralisé fortement organisé, gouvernement décentralisé, gouvernement fédéral, fédération, confédération ou ligue de gouvernements, alliance, alignement, groupe de gouvernements indépendants et finalement des gouvernements sans aucun lien entre eux peuvent être considérés et interprétés comme des degrés différents de la relation du gouvernement avec le territoire, entre les deux extrêmes que sont l'unité totale et la séparation totale.

Dès lors, tout schéma ou modèle de compétences ou de juridictions n'est qu'une phase, l'image instantanée d'une réalité politique en constante évolution. Dans cette perspective on a eu tendance[...]

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Écrit par

  • : Eaton professor of the science of government, Havard University, Cambridge, États-Unis
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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Pour citer cet article

Universalis et Carl Joachim FRIEDRICH. FÉDÉRALISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Proudhon - crédits : Nadar/ Getty Images

Proudhon

Autres références

  • CENTRALISME

    • Écrit par David ALCAUD
    • 1 558 mots

    Si on distingue traditionnellement l'État de structure simple – l'État unitaire – et l'État de structure complexe – l'État composé –, certains juristes soutiennent que seul existerait l'État unitaire, détenteur exclusif de la souveraineté. Certes, la confédération...

  • AFRIQUE (Histoire) - Les décolonisations

    • Écrit par Marc MICHEL
    • 12 424 mots
    • 24 médias
    ...territoire n'avait pas posé déjà le problème si grave de l'unité nationale auquel allait se heurter la plupart des États héritiers des colonisateurs. Dès 1947, les autorités locales cherchèrent une solution en consolidant les bases d'un État fédéral et en cherchant à faire collaborer les différentes...
  • ALLEMAGNE (Géographie) - Géographie économique et régionale

    • Écrit par Guillaume LACQUEMENT
    • 12 044 mots
    • 9 médias
    ...et que, d'autre part, le poids considérable de la Prusse dans la nouvelle architecture politique ait conduit à une certaine centralisation du pouvoir. Le fédéralisme institutionnel précède ici la démocratie politique qui a ensuite été introduite par la République de Weimar (1918-1933). Occulté...
  • ALLEMAGNE (Politique et économie depuis 1949) - République fédérale d'Allemagne jusqu'à la réunification

    • Écrit par Alfred GROSSER, Henri MÉNUDIER
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    La Loi fondamentale allemande du 23 mai 1949 définit la République allemande comme un État fédéral (article 20 alinéa 1 L.F.), et interdit au pouvoir de révision constitutionnelle de remettre en cause cette forme d’organisation territoriale : «  Toute modification de la présente Loi fondamentale qui toucherait...
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