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DÉRIVE DES CONTINENTS, en bref

Le 6 janvier 1912, le météorologue allemand Alfred Wegener (1880-1930) présente une communication à la session annuelle de l'Union géologique, qui se tient à Francfort-sur-le-Main (Allemagne) : Idées nouvelles sur la formation des grandes structures de la surface terrestre (continents et océans) sur des bases géophysiques. Wegener y suppose que les continents actuels étaient regroupés à une certaine époque en un bloc unique qui s'est ensuite fragmenté, les différents morceaux s'étant déplacés horizontalement, à la manière de radeaux, jusqu'à leur position actuelle, qui est elle-même provisoire. En fait, Wegener ne fait là qu'opérer la synthèse d'observations et de travaux antérieurs.

En effet, à la fin du xviiie siècle, le naturaliste et explorateur allemand Alexander von Humboldt (1769-1859) avait déjà considéré que les analogies de contours entre les côtes est de l'Amérique et les côtes ouest de l'Afrique, qui semblent pouvoir s'emboîter, ne pouvaient être le fruit du pur hasard. Il soulignait, de plus, que les montagnes du Brésil ont les mêmes caractéristiques que celles du Congo, que la grande plaine de l'Amazonie se trouve en face de celles qui bordent le golfe de Guinée, morphologiquement semblables. Il est ainsi conduit à considérer l'océan Atlantique comme une simple vallée creusée dans un vaste continent qui aurait été remplie par les « eaux du Déluge ». Cette idée d'un vaste continent unique fut étayée par des observations d'ordre naturaliste : des fossiles d'une fougère, Glossopteris, et d'un petit reptile, Mesosaurus, âgés d'environ 250 millions d'années, affleurent sur des continents fort éloignés, comme l'Australie, l'Inde, l'Afrique ou l'Amérique du Sud. Pour expliquer la présence d'espèces biologiques identiques sur ces continents disjoints, le géologue autrichien Eduard Suess (1831-1914) proposa que des « ponts continentaux » avaient existé entre ces continents de l'hémisphère Sud. Ces ponts se seraient ensuite effondrés dans les océans.

Les mesures gravimétriques effectuées, d'une part, par Pierre Bouguer (1698-1758) dans les Andes et, d'autre part, par George Everest (1790-1866) dans l'Himalaya, puis les travaux de Clarence E. Dutton (1841-1912) montrèrent des différences de densité entre les divers éléments de la croûte terrestre : les continents, appelés sial à l'époque (pour silicium et aluminium, principaux éléments du granite, qui constitue l'essentiel des continents), plus légers flottent sur une couche plus dense, le sima (pour silicium et magnésium, principaux éléments du basalte), formant le fond des océans. Dutton explique ainsi que les montagnes possèdent une racine plus importante pour pallier leur plus faible densité et rétablir l'équilibre de la croûte terrestre, et que ces reliefs remontent au cours de leur érosion, à la manière d'une péniche qui s'élève lorsqu'elle est déchargée : c'est la théorie de l'isostasie, qui mit à mal l'hypothèse de Suess. En effet, si des mouvements verticaux ascendants peuvent s'expliquer, l'effondrement des ponts continentaux dans le sima est incompatible avec l'isostasie.

Si les analogies biologiques et structurales entre certains continents montrent que ceux-ci furent en relation, si la théorie de l'isostasie prouve que des parties continentales n'ont pas pu disparaître en s'enfonçant dans le sima, si les côtes de part et d'autre de l'Atlantique semblent pouvoir s'emboîter, c'est donc que les continents se déplacent horizontalement à la surface du globe ; c'est la « translation des continents » (le terme de « dérive » ne sera employé que plus tard). L'hypothèse de Wegener, formalisée par la publication de [...]

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  • : docteur en sciences de la Terre, concepteur de la collection La Science au présent à la demande et sous la direction d'Encyclopædia Universalis, rédacteur en chef de 1997 à 2015

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