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PARKER CHARLIE (1920-1955)

La révolution bop

Le bop voit ainsi le jour dans ces cabarets de New York qui ont pour noms le Minton's, le Play House, le Monroe's, le Three Deuces, où Charlie Parker retrouve, pour d'aventureuses sessions, les autres pionniers de cette nouvelle musique : Thelonious Monk (piano), Dizzy Gillespie (trompette) et Kenny Clarke (batterie). Le bop amène un sang neuf au jazz, et Parker en est l'un des principaux artisans. Il fait exploser cet ensemble parfait que constituait la section rythmique à l'époque du swing. Désormais, seule la contrebasse assure la continuité du rythme, le piano et les drums effectuant breaks et figures complexes. En s'appuyant sur un rythme 4/4, le batteur, par des ponctuations de grosse caisse et de cymbales, place de vives accentuations sur la trame qu'il tisse de la main droite sur les cymbales. Le piano ne se résout plus à accompagner simplement le soliste mais utilise les accords plaqués et retrouve sa vocation de percussion. Les instruments ne se doublent plus. L'usage des accords de passage et des gammes par tons entiers revalorise entièrement le matériel mélodique et harmonique. Le chevauchement des lignes mélodiques n'évite plus les dissonances, créant une polytonalité mouvementée qui s'évade au-delà des accords de neuvième. On ne veut plus désormais de la banalité de ces chansons sirupeuses qui étaient le pain quotidien des musiciens de jazz. La musique se fait plus ferme, plus virile. Les harmonies du blues sont détournées, les thèmes les plus connus paraphrasés, transfigurés, généralement sur des tempos plus rapides. C'est ainsi que What Is This Thing Called Love devient Hot House, Indiana devient Donna Lee, Whispering, Groovin'High et How High the Moon, Ornithology.

Pour l'heure, en 1940, le Bird appartient à la formation de McShann et enregistre son premier solo à l'alto (Sepia Bounce). De 1942 à 1944 il figure dans les formations de Noble Sissle et de Earl Hines (où il joue du saxophone ténor et où, en 1943, il rencontrera Dizzy Gillespie, Cootie Williams, Andy Kirk, Ben Webster et Billy Eckstine). Le bop s'affirme véritablement pendant les années de la guerre. Parker enregistre pour la première fois sous son nom en 1944 avec Tiny Grimes (Red Cross, Tiny's Tempo). Dès 1945, il enregistre avec Dizzy Gillespie (Hot House) puis avec Miles Davis, Curley Russell, Max Roach et la jeune Sarah Vaughan. L'instrumentiste devient célèbre avec sa sonorité ascétique, ses phrases d'une netteté lumineuse, ses attaques tranchantes, et les envolées lyriques de ses plus folles improvisations. Le créateur entre déjà dans la légende. En 1946, il se produit sur la côte Ouest avec le J.A.T.P. (Jazz At The Philharmonic). C'est l'un des sommets de sa carrière musicale, c'est l'époque de Now's the Time, de Koko, d'Ornithology. Mais il est miné par l'abus de la drogue et de l'alcool. Le 29 juillet, deux camarades soutiennent le Bird à bout de forces alors qu'il offre à la postérité une bouleversante version de Lover Man. Une version tellement poignante, au-delà du temps et du monde, qu'il la reniera par la suite. Il faut l'hospitaliser à Camarillo en pleine dépression nerveuse. Il revient sur la scène musicale en 1947. Il joue avec Erroll Garner, et constitue l'un des plus parfaits quintettes de l'histoire du jazz avec Duke Jordan, Tommy Potter, Miles Davis et Max Roach. Les titres de légende se multiplient : Don't Blame Me, Embraceable You, Out of Nowhere, Scrapple from the Apple, Bird Gets the Worm, Parker's Mood, Half Nelson, Milestone, etc. En 1949, il forme un nouveau quintette avec, notamment, Kenny Dorham et vient à Paris. Le J.A.T.P. le conduit en 1950 en Suède. En 1953 a lieu ce fameux concert qui réunit, à Massey Hall, Parker, Gillespie, Roach, Powell et Mingus. Grâce au magnétophone[...]

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Écrit par

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Pour citer cet article

Pierre BRETON. PARKER CHARLIE (1920-1955) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

<it>Charlie Parker et The Metronome All-Stars, New York</it>, H. Leonard - crédits : H. Leonard/ Archives Center-NMAH/ Smithsonian Institution

Charlie Parker et The Metronome All-Stars, New York, H. Leonard

Autres références

  • BE-BOP

    • Écrit par Eugène LLEDO
    • 769 mots

    Au début des années 1940, quelques jazzmen, parmi lesquels Charlie Parker, Dizzy Gillespie et Thelonious Monk, se retrouvent lors de jam-sessions à New York. Ils y expérimentent une nouvelle forme de musique improvisée qui modifie profondément la couleur sonore du jazz : le be-bop.

    Au début...

  • DAVIS MILES (1926-1991)

    • Écrit par Pierre BRETON
    • 1 759 mots
    • 2 médias
    ...professeur, Elwood Buchanan, ancien trompettiste d'Andy Kirk, lui fait travailler la vélocité et l'encourage à jouer sans vibrato. En 1944, il rencontre Charlie Parker et Dizzy Gillespie à l'occasion d'une tournée à Saint Louis de l'orchestre de Billy Eckstine. C'est le tournant décisif de sa vie musicale. S'il...
  • DAVIS MILES - (repères chronologiques)

    • Écrit par Pierre BRETON
    • 985 mots

    25 mai 1926 Miles Dewey Davis, III naît à Alton (Illinois), dans une famille noire, mélomane et bourgeoise.

    Septembre 1944 Miles Davis s'installe à New York, officiellement pour préparer son entrée à la Juilliard School of Music, en réalité pour rencontrer Charlie Parker.

    1945-1948 ...

  • JAZZ

    • Écrit par Philippe CARLES, Jean-Louis CHAUTEMPS, Universalis, Michel-Claude JALARD, Eugène LLEDO
    • 10 992 mots
    • 25 médias
    Le bopper le plus important – et, avec Louis Armstrong et Duke Ellington, le plus grand créateur du jazz – est le saxo alto Charlie Parker. Improvisateur génial, tant sur tempo lent, où il épanouit un lyrisme mélodique aux lignes admirables (Embraceable You) et souvent pathétiques (Lover Man...
  • Afficher les 7 références

Voir aussi