Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

VERSAILLES ET SON CHÂTEAU

Entre 1682, date de l'installation de la Cour dans un château en chantier, et 1789, date à laquelle la monarchie quitta définitivement le palais, Versailles fut le centre de la vie française. Pourtant, l'histoire de Versailles n'est pas circonscrite par ces deux dates, et ne se limite pas non plus à la chronologie des agrandissements de la demeure royale : Versailles, palais, centre du gouvernement, est aussi une ville, un parc, une forêt, un lieu de sociabilité, de fêtes, de musique et de danses. Versailles fut révolutionnaire, napoléonien, orléaniste et dédié « à toutes les gloires de la France ». L'empire allemand y naquit en 1871 ; le traité qui consacrait la fin de la Première Guerre mondiale y fut signé le 28 juin 1919. C'est en même temps, chaque année, un lieu de promenade et de mémoire pour 3,5 millions de visiteurs, musée de l'histoire de France aux collections plus diverses qu'il n'y paraît, auquel le statut d'établissement public dépendant du ministère de la Culture, regroupant château et parc, a donné, en 1995, la nouvelle unité indispensable à sa conservation et à sa mise en valeur.

Versailles - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Versailles

Bassin de Latone, Versailles - crédits : Bryn Campbell/ The Image Bank/ Getty Images

Bassin de Latone, Versailles

Versailles contre la nature et l'histoire

Versailles est un défi : à la nature, inhospitalière, à la Cour, attachée à Paris, à la tradition nomade de la monarchie française. Les projets de Bernin pour le Louvre, en 1665, n'ont pas convaincu le roi. Il lui faut un nouveau centre de pouvoir. Le triomphe sur la nature prend ainsi valeur de symbole. Mme de Sévigné, évoquant la « mortalité prodigieuse » de ces marais que l'on transforme, écrit « Ce serait un étrange malheur si, après la dépense de trente millions à Versailles, il devenait inhabitable. » Saint-Simon, qui détestait Versailles et y passa les plus passionnantes années de sa vie, va plus loin en ce sens : « La violence qui y a été faite partout à la nature repousse et dégoûte malgré soi. » Ce « favori sans mérite » (Mme de Sévigné) est pour Saint-Simon « le plus triste et le plus ingrat de tous les lieux. » Dans une phrase, il résume le plan de l'édifice : « Le beau et le vilain furent cousus ensemble, le vaste et l'étranglé. »

La monarchie aurait pu se fixer à Saint-Germain, sur les terrasses de Le Vau qui sont à l'époque le plus agréable point de vue des environs de Paris, à Fontainebleau, dans la tradition du mécénat de François Ier, ou dans bon nombre d'autres chantiers que Louis XIV avait eu l'occasion de visiter et comparer : Vincennes, Saint-Cyr, Noisy... Le Versailles de Louis XIII, en ses deux états, le « château de cartes » originel (1624) et le château agrandi par Philibert Le Roy (1631-1638), sur le modèle brique et pierre, n'est qu'un rendez-vous de chasse que rien ne prédestinait à devenir centre politique. Louis XIV dépense 1 500 000 livres pour embellir le château de Philibert Le Roy, ce « chétif château de Versailles » comme l'écrit Bassompierre – pour dire qu'un simple gentilhomme ne saurait en tirer vanité.

Parterres de l'Orangerie du château de Versailles - crédits : Lyubov Timofeyeva/ Shutterstock

Parterres de l'Orangerie du château de Versailles

De 1661 à 1669, le projet d'agrandissement de l'architecte Louis Le Vau est réalisé. Les gravures d'Israël Silvestre montrent ce premier grand Versailles doté d'une terrasse à l'emplacement actuel de la galerie des Glaces. Le Brun réalise les décors peints, Le Nôtre les jardins. Car Versailles s'édifie aussi contre Vaux, bâti entre 1656 et 1661 avec l'aide des mêmes artistes : Le Vau, Le Nôtre, Le Brun, et Molière déjà – château abandonné au lendemain des fêtes de Fouquet en 1661. Versailles, pour le jeune Louis XIV qui prend alors le pouvoir personnellement (1661), est nécessaire : la monarchie désormais absolue triomphe dans cet espace conquis et centralisé. En 1664, la fête des « Plaisirs de l'isle enchantée », donnée pour Louise de La Vallière, favorite[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure, maître de conférences à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Adrien GOETZ. VERSAILLES ET SON CHÂTEAU [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Versailles - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Versailles

Bassin de Latone, Versailles - crédits : Bryn Campbell/ The Image Bank/ Getty Images

Bassin de Latone, Versailles

Parterres de l'Orangerie du château de Versailles - crédits : Lyubov Timofeyeva/ Shutterstock

Parterres de l'Orangerie du château de Versailles

Voir aussi