VÉNUS, planète

En dépit des nombreuses missions spatiales qui lui ont été consacrées, Vénus, cachée sous une épaisse atmosphère nuageuse, recèle encore de nombreux mystères. Son exploration rapprochée débute pourtant à l'aube de l'ère spatiale : elle est d'ailleurs, en 1962, la première planète à être survolée par une sonde, Mariner-2.

Alors que l'Europe a, en 2006, placé sa première sonde en orbite autour de Vénus, Venus Express, quelle est l'importance de cette planète dans l'histoire de l'astronomie, et quel est l'état de nos connaissances sur cette sœur de la Terre, par la taille et la proximité tout au moins ?

D'Edmund Halley à Venus Express

Halley et les transits de Vénus

Le 7 novembre 1677, l'astronome britannique Edmund Halley, âgé seulement de vingt et un ans, observe depuis l'île Sainte-Hélène le passage de Mercure devant le Soleil. Cette observation, qui est possible tous les trois à dix ans, n'était donc pas exceptionnelle, mais Halley eut le talent d'en extraire toute la substance scientifique. Ce n'est pourtant que quatre décennies plus tard, en 1716, qu'il fera, devant la Royal Society, un important discours sur l'importance des transits de Vénus. Halley avait en effet compris que les transits de Mercure ne permettraient pas de résoudre l'importante question de la détermination de la dimension de l'Univers, ou plutôt du système solaire. En effet, Mercure étant trop proche du Soleil, la détermination de la parallaxe solaire (l'angle sous lequel on voit le rayon de la Terre depuis le Soleil) correspondait à un angle trop petit pour que sa mesure puisse être faite avec une précision suffisante. En revanche, Halley affirma que la mesure de cette parallaxe était possible en utilisant les transits de Vénus, qui ne nécessitaient qu'une précision sur la mesure du temps de transit de l'ordre de la seconde, atteignable avec les horloges de l'époque. Halley insista pour que ces mesures soient faites lors des prochains transits de cette planète, qui auraient lieu en 1761 et 1769.

Les transits de Vénus devant le Soleil sont en effet des phénomènes astronomiques très rares. Cela tient au fait que l'orbite de Vénus est inclinée de 30 par rapport à l'écliptique, plan de l'orbite de la Terre dans sa révolution autour du Soleil. Ces 30 ont pour conséquence que Vénus passe généralement au-dessus ou au-dessous du Soleil, et non pas devant le disque solaire. Les calculs de mécanique céleste montrent que ces transits ont lieu à un intervalle de 8 ans, suivi de 121,5 ans, puis de 8 ans suivi de 105,5 ans, après quoi le cycle se répète. La rareté de cet événement a pour conséquence que seuls six transits ont été observés à ce jour : le premier, en 1639, a été observé le 24 novembre (calendrier julien), par le seul astronome britannique Jeremiah Horrocks, alors que Johannes Kepler avait prédit celui de 1631, sans l'observer. Ensuite, il y eut les transits du 6 juin 1761 et du 3 juin 1769, puis du 9 décembre 1874 et du 6 décembre 1882, et celui du 8 juin 2004, qui fut abondamment observé par un très grand nombre d'astronomes. Le suivant a lieu le 6 juin 2012 ; il fut d’autant plus suivi qu'il n'y en aura pas d'autre avant 2117.

L'impact du discours de Halley de 1716 fut considérable puisque les transits du xviiie et du xixe siècle vont faire l'objet de dizaines d'expéditions de toutes nationalités à travers le monde. Le plus pathétique de ces voyages fut sans conteste celui du Français Le Gentil. Guillaume Joseph Hyacinthe Jean-Baptiste Le Gentil de la Galaisière (1725-1792) fut envoyé par l'Académie des sciences pour observer le transit de 1761 depuis Pondichéry, aux Indes. Il s'embarque à Brest à bord du vaisseau Le Berryer le 17 mars[...]

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Écrit par

  • Véronique ANSAN : maître de conférences en sciences de la Terre à l'université de Nantes, laboratoire de planétologie et géodynamique, CNRS et université de Nantes
  • Éric CHASSEFIÈRE : docteur en physique, directeur adjoint du service d'aéronomie du C.N.R.S., Verrières-le-Buisson, directeur de recherche au C.N.R.S.
  • Philippe MASSON : doyen de l'U.F.R. sciences, université de Paris-XI-Sud
  • Francis ROCARD : docteur ès sciences, responsable des programmes d'exploration du système solaire au Centre national d'études spatiales

Classification

Pour citer cet article

Véronique ANSAN, Éric CHASSEFIÈRE, Philippe MASSON, Francis ROCARD, « VÉNUS, planète », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

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Autres références

  • ASTROLOGIE

    • Écrit par Jacques HALBRONN
    • 11 713 mots
    ...astronomiquement elle est satisfaisante, est en rupture avec une astrologie plus naïve et en phase avec le discours mythologique. Il apparaît que les affectations de Mercure et deVénus ont été inversées, tout comme ceux de Jupiter et de Mars avec lesquels ils sont respectivement en couple.
  • BILAN RADIATIF DE LA TERRE

    • Écrit par Philippe DUBUISSON
    • 4 178 mots
    • 8 médias
    ...concentration de plus en plus importante des gaz à effet de serre est aujourd’hui inquiétante. L’effet de l’atmosphère est également important pour Vénus. En effet, la température d’équilibre radiatif théorique calculée est beaucoup plus basse que celle mesurée, ce qui s’explique par l’albédo élevé...
  • ESPACE (CONQUÊTE DE L') - Des pionniers à la fin de la guerre froide

    • Écrit par Jacques VILLAIN
    • 12 949 mots
    • 37 médias
    Entre 1961 et 1990, 34 sondes américaines et soviétiques seront envoyées vers Vénus. En 1962, Mariner-2 est la première sonde à approcher l'Étoile du berger, révélant une température en surface de 470 0C et une pression atmosphérique égale à 90 fois la pression terrestre au niveau du...
  • EXOBIOLOGIE

    • Écrit par François RAULIN
    • 6 122 mots
    • 16 médias
    ...d'atmosphère. Il est probable qu'aucune chimie organique complexe ne se déroule à sa surface. Son intérêt exobiologique est donc très limité. Il en est de même de Vénus, planète très chaude possédant, au contraire de Mercure, une atmosphère très dense avec une pression au sol très élevée. Les...
  • EXPLORATION DU SYSTÈME SOLAIRE (notions de base)

    • Écrit par Universalis
    • 3 107 mots
    • 19 médias
    L’atmosphère très dense de la planète Vénus en masque totalement la surface. L’exploration de la planète débuta donc au moyen de radars terrestres. Les sondes soviétiques Venera furent les premières, en se posant à sa surface, à nous révéler le sol de Vénus.
  • Afficher les 9 références

Voir aussi