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THERMODYNAMIQUE Histoire

Évolution de la thermométrie

L'invention du thermomètre

Des conditions favorables à la reprise du développement de la physique expérimentale vont apparaître en Europe occidentale à la Renaissance. À cette époque, la nouvelle classe sociale que constituait la bourgeoisie entreprit la découverte des terres habitées, afin d'en exploiter les ressources, et l'étude des phénomènes naturels suivant la méthode du rationalisme expérimental, en vue d'améliorer la condition de l'homme.

Les Pneumatiques de Héron, dont le texte grec, conservé dans quelques bibliothèques, n'avait intéressé personne pendant près de quinze siècles, trouvèrent des lecteurs en Italie à la fin du xvie siècle, après la publication d'une traduction latine à Urbino, en 1575, et de plusieurs éditions en italien, dont la première parut à Ferrare en 1589. Les érudits qui désiraient connaître de première main les Pneumatiques de Philon de Byzance eurent à leur disposition les manuscrits latins ou arabes qui contenaient la traduction du texte original grec disparu.

Le médecin istrien Santorio Santorio (1561-1636), professeur de médecine théorique à Padoue, qui désirait suivre l'évolution de la fièvre chez ses malades, eut, le premier, l'idée de transformer l'appareil de Héron d'Alexandrie de manière à pouvoir mesurer le degré de chaleur. L'instrument qu'il conçut est un thermomètre à air, constitué par une petite boule de verre, surmontant un tube ouvert, long et étroit, qui plonge dans un vase plein d'eau. Lorsque le changement de température de l'air qui surmonte l'eau en fait varier le volume, celle-ci se déplace dans le tube, en colonne. Le malade introduisait la petite boule de verre dans sa bouche ou la tenait dans le creux de la main, puis Santorio notait le déplacement de la colonne d'eau. Ce dernier signala son instrument dans une publication de 1612 et le décrivit en 1630. Entre-temps, il l'avait doté d'une graduation décimale qui comprenait deux repères, les premiers points fixes considérés, obtenus l'un en refroidissant la petite boule par de la neige, l'autre en la chauffant à la flamme d'une bougie. Comme on prête volontiers aux riches, plusieurs biographes de Galilée lui ont gratuitement attribué l'invention de Santorio, de trois ans son aîné.

La réalisation de Santorio marquait le premier aboutissement d'une idée répandue de façon encore confuse dans les milieux cultivés d'Europe occidentale, savoir l'introduction de la mesure dans l'étude du chaud et du froid. Le médecin Robert Fludd (1574-1637) publia, en 1626, le dessin d'un thermomètre à air de son invention, qui ressemble à celui de Santorio. De son côté, le mécanicien hollandais Cornelius Drebbel (1572-1633) passe pour avoir inventé à la même époque un thermomètre à air en forme de J et à deux boules. L'instrument construit en Italie et celui qui a été réalisé en Hollande sont représentés dans la Récréation mathématique, publiée, en 1624, à Pont-à-Mousson, par le jésuite lorrain Jean Leurechon (1593-1670), qui, le premier, les appela « thermomètre, ou instrument pour mesurer les degrez de chaleur ou de froidure qui sont en l'air » ; le mot thermoscopium était apparu en 1611 pour désigner l'instrument de Santorio, dans un manuscrit latin de Bartolomeo Telioux, conservé à la bibliothèque de l'Arsenal.

Les indications des premiers thermomètres dépendaient des variations de la pression atmosphérique, dont le physicien italien Evangelista Torricelli (1608-1647) donna, en 1644, une interprétation correcte. Le grand-duc de Toscane, Ferdinand II de Médicis (1610-1670), que la physique intéressait plus que la politique, entreprit de perfectionner l'instrument de Santorio, de manière à réduire cette dépendance. Secondé par un habile émailleur,[...]

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Écrit par

  • : ingénieur civil des Mines, membre correspondant de l'Académie internationale d'histoire des sciences, professeur à l'université de Paris-I

Classification

Pour citer cet article

Arthur BIREMBAUT. THERMODYNAMIQUE - Histoire [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Éolipile - crédits : D.R.

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Lord Kelvin - crédits : Herbert Barraud/ Getty Images

Lord Kelvin

James Prescott Joule - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

James Prescott Joule

Autres références

  • THERMODYNAMIQUE (notions de base)

    • Écrit par Bernard DIU
    • 6 036 mots

    De nos jours, on peut définir la thermodynamique comme la science des propriétés et des processus qui mettent en jeu la température et la chaleur.

    Le nom de « thermodynamique » associe les deux mots grecs thermon (chaleur) et dynamis (puissance). Le but premier de la discipline, explicitement...

  • BOLTZMANN LUDWIG (1844-1906)

    • Écrit par Pierre COSTABEL
    • 1 634 mots
    • 1 média
    À partir de ce deuxième principe, Loschmidt a présenté à Boltzmann une objection redoutable, souvent reprise depuis lors, et qui consiste à affirmer l'impossibilité de faire sortir des équations réversibles de la mécanique une interprétation des processus irréversibles de la thermodynamique. Boltzmann...
  • CARNOT SADI (1796-1832)

    • Écrit par Robert FOX
    • 841 mots
    • 1 média

    Fils aîné de Lazare Carnot, « l'Organisateur de la Victoire », Nicolas Léonard Sadi Carnot est un des pionniers de la thermodynamique. Son unique publication, les Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance, ignorée de son temps...

  • CHALEUR

    • Écrit par Paul GLANSDORFF
    • 985 mots

    La première tentative d'interprétation physique assimilait la chaleur à un fluide dit subtil et indestructible dénommé le calorique, répandu partout au sein de la matière. Son passage d'un corps à un autre était notamment responsable du refroidissement du premier et de l'échauffement du second....

  • CLAUSIUS RUDOLF (1822-1888)

    • Écrit par Robert FOX
    • 1 001 mots

    Rudolf Julius Emanuel Clausius, l'un des plus grands physiciens du xixe siècle, est connu principalement pour sa contribution à l'étude de la thermodynamique. Le premier, ce savant allemand formula ce qu'on a coutume d'appeler le deuxième principe et proposa une définition claire de l'...

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Voir aussi