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SINGULARITÉS DES FONCTIONS DIFFÉRENTIABLES, la théorie mathématique et ses applications

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Points singuliers non dégénérés

Sur une variété compacte, une fonction a nécessairement des points singuliers (c'est-à-dire non réguliers), à savoir les extrémums. Nous étudions dans ce chapitre les points singuliers les plus simples (et aussi les plus courants) ; ainsi que les points réguliers, ils sont caractérisés par une propriété de stabilité et, comme dans bien des cas, la source de cette stabilité est une situation de transversalité : rappelons qu'une application f d'une variété N dans une variété P est transverse en a ∈ N à la sous-variété Q de P, ou bien si f (a) ∉ Q, ou bien si f (a) ∈ Q et si l'espace tangent en f (a) à P est engendré par l'espace tangent en f (a) à Q et l'image par Df (a) de l'espace tangent en a à N :

Si ξ : Rp → Rp-q est une équation locale de Q au voisinage de f (a), la condition de transversalité équivaut à dire que D(ξ ∘ f )(a) est de rang p − q ; on en déduit immédiatement que, si g est assez proche de f au voisinage de a dans la topologie C1 et si b est assez proche de a, alors g est encore transverse en b à Q (cf. Transversalité, chapitre 5 de topologie - Topologie différentielle).

À titre d'exemple, étant donné une fonction f : Rn → R de classe C2, considérons l'application :

La transversalité en a ∈ Rn de Df à la sous-variété réduite au point 0 signifie ou bien que Df (a) ≠ 0, ou bien que Df (a) = 0 et :

qui implique que Df est un difféomorphisme d'un voisinage de a dans Rn sur un voisinage de 0 dans L(Rn, R).

Dans ce dernier cas, on dit que a est un point singulier non dégénéré (ou point singulier de Morse) de f. Remarquons qu'un tel point singulier est isolé et que, si g est assez proche de f au voisinage de a dans la topologie C2 (c'est-à-dire pour laquelle toutes les fonctions :

sont assez petites au voisinage de a), il existe un voisinage de a sur lequel l'équation Dg(x) = 0 a une solution unique b qui est un point singulier non dégénéré de g.

Cependant, contrairement à ce qui se passait pour les points réguliers en vertu du lemme de Sard, une fonction f : Rn → R de classe C peut très bien avoir tous ses points singuliers dégénérés (c'est-à-dire non « non dégénérés »). Le raisonnement suivant, exemple typique de l'utilisation du lemme de Sard dans les théorèmes de transversalité de Thom, montre qu'on peut remédier à cela par une petite perturbation de f : considérons la sous-variété (c'est un graphe !) V de Rn × L (Rn, R) définie par :

D'après le lemme de Sard, il existe L0 aussi près que l'on veut de 0 tel que tout point (x, L0) appartenant à V soit un point régulier de la restriction à V de la projection de Rn × L(Rn, R) sur son deuxième facteur ; on voit facilement que cela signifie que tous les points singuliers de f + L0 sont non dégénérés.

Ce résultat rend plausible le théorème suivant : Soit N une variété compacte de classe C (il suffit qu'elle soit de classe C2) et soit C(N, R) l'espace des fonctions C sur N muni de la topologie C (convergence uniforme de f et de ses dérivées partielles de tous les ordres dans chaque carte d'un atlas de N) ; l'ensemble des fonctions de Morse (fonctions dont tous les points singuliers sont non dégénérés) est ouvert et dense.

Il est honnête, à ce point, de vérifier que la notion de point singulier non dégénéré garde un sens sur une variété : cette question n'est pas inoffensive car, si la dérivée d'une application f de N dans R a toujours un sens intrinsèque en a ∈ N (car c'est une forme linéaire sur l'espace tangent TaN), la matrice :

des dérivées secondes de f calculées dans une carte locale n'a de sens intrinsèque que si Df (a) = 0[...]

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Pour citer cet article

Alain CHENCINER. SINGULARITÉS DES FONCTIONS DIFFÉRENTIABLES, la théorie mathématique et ses applications [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Médias

Jets d'une fonction quadratique d'une variable - crédits : Encyclopædia Universalis France

Jets d'une fonction quadratique d'une variable

Caractère universel d'une famille transverse - crédits : Encyclopædia Universalis France

Caractère universel d'une famille transverse

Stabilité d'une famille transverse - crédits : Encyclopædia Universalis France

Stabilité d'une famille transverse

Autres références

  • CALCUL INFINITÉSIMAL - Calcul à plusieurs variables

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    • 5 442 mots
    En 1925, le mathématicien américain Marston Morse a inauguré l'étude des singularités des fonctions de classe Cm en montrant que l'on pouvait approcher toute fonction numérique f de classe Cm à n variables par des fonctions dont les seuls points singuliers sont des points isolés critiques...
  • CATASTROPHES THÉORIE DES

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    ...Globalement, le lieu critique C de π est une courbe régulière (sans singularités) de Σ dont l'image K est une ligne (de points plis) ne pouvant admettre comme singularités que des cusps ou des self-intersections transversales, correspondant à des singularités semi-locales (figure : situation globale avec self-intersections)....