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SINGULARITÉS DES FONCTIONS DIFFÉRENTIABLES, la théorie mathématique et ses applications

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Points singuliers de détermination finie et fonctions T.S.F.

Nous avons vu dans le premier chapitre que, au voisinage d'un point régulier, une fonction C est caractérisée, à changement de coordonnées locales près, par son jet d'ordre 1 en ce point ; nous étudions maintenant les points singuliers ayant une propriété analogue vis-à-vis du jet à un ordre fini. Nous retrouverons en particulier le lemme de Morse, à la base de si nombreux développements en topologie différentielle.

L'importance de cette question vient de ce que, contrairement à une fonction C quelconque, une fonction polynomiale est susceptible d'une étude géométrique très précise.

Les résultats étant purement locaux, il est commode d'utiliser le langage des germes : deux applications f et g d'une variété N dans une variété P définissent le même germe en a ∈ N si elles coïncident sur un voisinage de a.

Si P = Rp, l'ensemble Ca (N, Rp) des classes d'équivalence hérite de la structure d'anneau de C(N, Rp) et est appelé l'anneau des germes en a d'applications C de N dans Rp. Notons en particulier En = C0 (Rn, R) et désignons par Ln ⊂ C0 (Rn, Rn) le groupe des germes en 0 d'applications ϕ : Rn → Rn vérifiant ϕ(0) = 0, avec Dϕ(0) inversible ; la formule ϕ ( f = f ∘ ϕ−1 définit une action de Ln sur En.

L'application f ↦ jkf (0) de Rn dans Jk0(Rn, R) se factorise en une application de En dans Jk0(Rn, R), encore notée de la même façon (nous confondrons d'ailleurs dans une même notation une fonction et son germe s'il n'y a pas d'ambiguïté sur le point considéré). En est un anneau local dont l'unique idéal maximal est l'ensemble Mn des germes de fonctions nulles en 0. La formule de Taylor montre que Mn n'est autre que l'idéal engendré par x1, ..., xn. Si f ∈ En, on note J(f ) l'idéal de En engendré par :

appelé idéal jacobien. Rappelons enfin que, si I et J sont les idéaux engendrés respectivement par α1, ..., αk et par β1, ..., βl, l'idéal produit IJ est engendré par les αiβj, 1 ≤ i ≤ k, 1 ≤ j ≤ l. Nous pouvons maintenant énoncer le résultat principal de ce chapitre, qui est dû à P. Samuel et à J.-C. Tougeron.

Théorème. Soit f, g ∈ En ; si g − f ∈ Mn J(f )2, il existe ϕ ∈ Ln tel que g ∘ ϕ = f. Autrement dit, à changement de coordonnées local près au voisinage de 0, g ne diffère pas de f dès que g − f est « assez petit » dans le sens ci-dessus.

La démonstration est d'un type assez fréquent en théorie des singularités : on considère la « famille à 1 paramètre » de germes ft = f + t (g  f ), t ∈ [0, 1], joignant f à g, et on cherche ϕt ∈ Ln tel que ϕ0 = identité, ft ∘ ϕt = f pour tout t ∈ [0, 1] ; en dérivant par rapport à t et en remarquant que l'hypothèse implique J(ft) = J(f ), on obtient ϕt en intégrant une équation différentielle ordinaire (ce qui ne nous éloigne pas tellement du théorème des fonctions implicites).

Remarquant que 0 est un point singulier non dégénéré si et seulement si J(f ) = Mn, on déduit de cette proposition le lemme de Morse, c'est-à-dire l'existence d'un changement de coordonnées local au voisinage d'un point singulier non dégénéré (ici 0) transformant f en son polynôme de Taylor en ce point tronqué à l'ordre 2 ; on exprime encore cela en disant que le germe de f en un point singulier non dégénéré est déterminé par son jet d'ordre 2. On remarque que ce lemme est valable sur une variété et on le comparera à l'énoncé analogue du chapitre 1 dans le cas d'un point régulier. Ce lemme permet une compréhension totale de la géométrie des hypersurfaces[...]

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Pour citer cet article

Alain CHENCINER. SINGULARITÉS DES FONCTIONS DIFFÉRENTIABLES, la théorie mathématique et ses applications [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Médias

Jets d'une fonction quadratique d'une variable - crédits : Encyclopædia Universalis France

Jets d'une fonction quadratique d'une variable

Caractère universel d'une famille transverse - crédits : Encyclopædia Universalis France

Caractère universel d'une famille transverse

Stabilité d'une famille transverse - crédits : Encyclopædia Universalis France

Stabilité d'une famille transverse

Autres références

  • CALCUL INFINITÉSIMAL - Calcul à plusieurs variables

    • Écrit par
    • 5 442 mots
    En 1925, le mathématicien américain Marston Morse a inauguré l'étude des singularités des fonctions de classe Cm en montrant que l'on pouvait approcher toute fonction numérique f de classe Cm à n variables par des fonctions dont les seuls points singuliers sont des points isolés critiques...
  • CATASTROPHES THÉORIE DES

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    ...Globalement, le lieu critique C de π est une courbe régulière (sans singularités) de Σ dont l'image K est une ligne (de points plis) ne pouvant admettre comme singularités que des cusps ou des self-intersections transversales, correspondant à des singularités semi-locales (figure : situation globale avec self-intersections)....