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PALMYRE

L'intégration dans l'Empire et la chute

Si l'éclat de la civilisation palmyrénienne au iie siècle exprimait bien la puissance commerciale de la ville, les activités militaires ne lui étaient pas étrangères, grâce aux archers montés sur des chevaux ou des chameaux, qui assuraient la sécurité des communications. Ces hommes d'armes servaient aussi dans l'armée romaine à titre d'auxiliaires, par exemple en Dacie et en Numidie, et leur nombre va croissant au début du iiie siècle.

Depuis la guerre de 161-166 entre Romains et Parthes, la vie de Palmyre est profondément affectée : englobée dans le dispositif défensif romain, Palmyre perd son rôle privilégié d'intermédiaire sur la route de l'Euphrate. Les inscriptions et les grandes constructions se raréfient ; désormais, les commerçants parthes « montent » de l'Euphrate à Palmyre, dont les caravanes « descendent » seulement vers la Méditerranée.

Par les activités militaires comme par les activités commerciales, Palmyre entrait de plus en plus dans le monde romain, et recevait en échange une promotion juridique : de ville libre, elle devenait colonie romaine sous Caracalla, et bénéficiait du rare privilège du jus italicum, ce qui l'exemptait de l'impôt foncier.

Cependant, la disparition des Sévères en 235 et l'ouverture d'une longue période de relâchement de l'autorité romaine profitèrent aux grandes familles de Palmyre. En 251, Septimius Hairân est exarque de Palmyre. En 258, son fils ou peut-être son frère, Septimius Odeinat, a rang dans la hiérarchie romaine – il est consulaire –, mais il se fait aussi appeler seigneur de Palmyre. Or, en 260, la situation de Rome en Orient s'aggrave, et le roi sassanide Sapor arrive devant Antioche. Odeinat intervient alors, au nom de l'empereur Gallien, contre Sapor et contre des usurpateurs romains. Gallien lui accorde le titre de dux et de « correcteur de tout l'Orient », ce qui fait de lui le dépositaire de l'autorité dans cette partie de l'Empire ; Odeinat ajoute alors à ses titres celui de roi des rois.

En 267-268, Odeinat meurt, et l'un de ses fils, Wahballât, reprend les titres paternels ; trop jeune pour régner, il laisse la réalité du pouvoir à sa mère, Zénobie ; celle-ci, conseillée par le philosophe Longin et le chrétien hérétique Paul de Samosate, profite de l'anarchie du monde romain pour s'emparer de la Syrie, de l'Égypte et d'une partie de l'Asie Mineure. Au début de 271, Wahballât et sa mère prennent les titres impériaux, marquant ainsi moins leur volonté de séparatisme que leur prétention à l'hégémonie, naturelle en un siècle où la victoire légitime le pouvoir. Qu'une femme ait eu cette audace étonna les contemporains qui, comme les historiens de l'Histoire Auguste, vantèrent ses qualités. Mais l'empereur Aurélien brisa cette ambition en deux campagnes, en 272 et 273 : Palmyre, d'abord ménagée, fut mise à sac et incendiée, tandis que Zénobie et son fils prenaient en captifs le chemin de Rome.

— André LARONDE

Palmyre ne devait jamais plus retrouver sa splendeur : à la fin du iiie siècle, Dioclétien en fit un élément du limes qui défendait l'Empire face aux Perses. De rares inscriptions et la présence d'un évêque attestent le maintien d'une population qui végète. Au vie siècle, Justinien relève encore les remparts avant que la conquête arabe, en 634, ne fasse retomber dans l'oubli Palmyre, redevenue Tadmor.

Site de Palmyre, 2016 - crédits : Joseph Eid/ AFP

Site de Palmyre, 2016

Palmyre, un des plus importants foyers culturels de l’Antiquité, a été inscrit en 1980 au patrimoine mondial de l’U.N.E.S.C.O. avant d’être considéré en péril à partir de 2013, lors de la guerre civile en Syrie. L’émergence d’un mouvement armé djihadiste, le groupe État islamique (E.I.), qui a établi en 2014 un «[...]

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis et André LARONDE. PALMYRE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Syrie : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Syrie : carte administrative

Palmyre, carrefour caravanier - crédits : Encyclopædia Universalis France

Palmyre, carrefour caravanier

Grande colonnade de Palmyre, Syrie - crédits : Louise Norton,  Bridgeman Images

Grande colonnade de Palmyre, Syrie

Autres références

  • "EMPIRE GAULOIS" ET "EMPIRE PALMYRÉNIEN" - (repères chronologiques)

    • Écrit par Antony HOSTEIN
    • 259 mots

    260 En Occident, Postume est proclamé empereur par les soldats qui ont assassiné Salonin, le fils de Gallien. En Orient, Odenath, prince de Palmyre, stoppe les Perses vainqueurs de Valérien et élimine plusieurs usurpateurs.

    264 Victoire de Postume sur les Germains ; il profite de ce succès pour...

  • ROME ET EMPIRE ROMAIN - Le Haut-Empire

    • Écrit par Yann LE BOHEC, Paul PETIT
    • 35 262 mots
    • 17 médias
    ...l'autorité de l'empereur de Rome. En Orient, de même, l'avance des Perses qui avaient pillé la Syrie et Antioche en 256 et en 260, fut arrêtée par le prince de Palmyre Odeynat, mari de la célèbre Zénobie, à la tête de troupes locales et romaines : il reçut des titres officiels (vir consularis, imperator...
  • SYRIE, archéologie

    • Écrit par Jean-Claude MARGUERON
    • 9 247 mots
    • 7 médias
    Plus à l'est, Palmyre et sa région ont exercé pour des raisons historiques, mais aussi du fait d'un cadre géographique exceptionnel, une étrange fascination sur les voyageurs, les explorateurs et les amateurs d'antiquités ; d'importants travaux de fouille, d'aménagement du site (par le déplacement du...
  • ZÉNOBIE (morte apr. 274) reine de Palmyre (266/67-272)

    • Écrit par Marguerite JOUHET
    • 234 mots

    Reine ambitieuse de Palmyre, peut-être responsable du meurtre de son époux le roi Odenath, qui régna sur Palmyre de 260 à 267, et de leur fils aîné. Leur second fils, Wahballath étant trop jeune pour régner, Zénobie prend le pouvoir et se fait appeler « illustrissime reine ». Profitant de l'anarchie...

Voir aussi