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NUCLÉAIRE (PHYSIQUE) Isotopes

Effets isotopiques. Séparation des isotopes

Les effets isotopiques, différences de propriétés physiques ou chimiques existant entre les isotopes du même élément, résultent en totalité des écarts de masse des noyaux atomiques et de leurs conséquences sur les énergies vibrationnelles ou rotationnelles des molécules. Ces différences de propriétés peuvent être utilisées, et le sont souvent à l'échelle industrielle, pour séparer les isotopes. Certaines d'entre elles servent à l'analyse isotopique des échantillons.

Propriétés physico-chimiques

La première idée qui vient à l'esprit est d'utiliser les différences de masse des isotopes pour les séparer par centrifugation. Mais, malgré les facteurs de séparation relativement importants, les temps nécessaires pour réaliser l'équilibre constituent un inconvénient à l'utilisation industrielle de cette méthode.

L'effet des écarts de masse se fait également sentir lorsqu'on fait agir, sur des ions monocinétiques de différents isotopes, un champ magnétique perpendiculaire à la direction de leur mouvement. Sous l'action du champ, d'induction B, l'ion de charge e, de vitesse v et de masse m décrit une trajectoire circulaire de rayon r = mv/eB, tout en restant dans un plan perpendiculaire à B. Ce rayon étant proportionnel à m, on voit que les trajectoires des isotopes sont différentes. C'est le principe des spectromètres de masse. On recueille ensuite les différents isotopes soit en divers points d'un collecteur (spectromètre d'Aston), soit en un seul point, en ajustant la valeur de l'induction magnétique B pour une masse donnée (spectromètre de type Nier). On peut ainsi doser l'abondance isotopique en mesurant pour chaque masse le courant ionique reçu par le collecteur ; on peut même séparer des quantités pondérables d'isotopes, dans des séparateurs très puissants produisant des courants ioniques de l'ordre de quelques milliampères.

La vitesse de diffusion d'un gaz de masse moléculaire M à travers un trou de petite dimension étant proportionnelle à M—1/2, ce phénomène peut aussi être utilisé pour la séparation d'isotopes, le facteur de séparation obtenu étant égal à la racine carrée du rapport des masses. On accroît ce facteur en utilisant un grand nombre d'étages de séparation, ce qui est facile dans le cas considéré. Cette méthode est utilisée industriellement pour l'uranium, le gaz étant l'hexafluorure UF6 ; malgré les différences de masse minimes et les faibles dimensions des orifices diffusants, on arrive à produire, dans de gigantesques ensembles, des kilogrammes d'uranium 235 ou 238 isotopiquement purs.

La diffusion thermique dans un tube vertical au centre duquel est placé un fil chauffé à 500 0C permet d'enrichir isotopiquement de petites quantités de produits gazeux tels que H35Cl et H37Cl.

La distillation fractionnée dans des colonnes géantes de quinze mètres de haut est utilisée pour séparer, par exemple, les isotopes de l'oxygène. La hauteur d'un plateau théorique étant de 5 millimètres, une telle colonne équivaut à 3 000 plateaux dont chacun a un facteur de séparation de 1,025. L'enrichissement obtenu vaut alors (1,025)3000 = 1,4 × 1032, permettant d'obtenir 18O (abondance naturelle : 0,2 p. 100) à l'état pur, à partir d'eau ou de monoxyde de carbone liquide.

La méthode de distillation conviendrait également à la séparation de l'eau lourde (2H2O, ou D2O), mais on lui préfère généralement l' électrolyse qui, pratiquée couramment à d'autres fins dans l'industrie, aboutit à un enrichissement exceptionnellement rapide en hydrogène lourd de l'eau restant sous forme liquide. À partir de cent litres d'eau naturelle (abondance isotopique du deutérium : 0,0156 p. 100), on obtient, après réduction[...]

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Écrit par

  • : agrégé de sciences physiques, docteur ès sciences, maître de recherche au C.N.R.S.
  • : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie

Classification

Pour citer cet article

René BIMBOT et René LÉTOLLE. NUCLÉAIRE (PHYSIQUE) - Isotopes [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Variations isotopiques du carbone 13, de l'oxygène 18 et du souffre 34 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Variations isotopiques du carbone 13, de l'oxygène 18 et du souffre 34

Autres références

  • ACCÉLÉRATEURS DE PARTICULES

    • Écrit par Michel CROZON, Jean-Louis LACLARE
    • 3 528 mots
    • 3 médias
    ...qui permit de disposer de sources de particules de faible vitesse : particules α ou noyaux d'hélium (rayonnement α) et électrons (rayonnement β). La physique nucléaire expérimentale démarra avec l'étude des effets de ces rayonnements sur les noyaux atomiques. Très vite, on éprouva le besoin de changer...
  • ALPHA RAYONNEMENT

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 184 mots

    Rayonnement le moins pénétrant émis par les substances radioactives, sous la forme de noyaux d'hélium 4. Il avait été reconnu dès 1903 par Ernest Rutherford comme formé de particules chargées positivement et de masse proche de celle de l'atome d'hélium. La théorie de la désintégration...

  • ANTIMATIÈRE

    • Écrit par Bernard PIRE, Jean-Marc RICHARD
    • 6 931 mots
    • 4 médias
    Les antiprotons lents ouvrent des perspectives inédites en physique nucléaire. En frôlant les noyaux, les antiprotons peuvent exciter des niveaux d'énergie qui ne sont pas facilement accessibles avec des électrons ou des protons. L'annihilation d'un antiproton sur un noyau correspond à un dépôt très...
  • ASTRONOMIE

    • Écrit par James LEQUEUX
    • 11 339 mots
    • 20 médias
    Les relations entre l'astronomie et la physique nucléaire sont tout à fait comparables. La découverte de l'origine de l'énergie libérée par le Soleil a suivi de peu celle de la transmutation nucléaire, c’est-à-dire la possibilité pour un élément chimique de se transformer en un autre par modification...
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Voir aussi