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MONNAIE Histoire de la monnaie

La monnaie antique

Asie Mineure

La tradition et les trouvailles archéologiques s'accordent à faire naître la monnaie en Anatolie, au début du viie siècle. Pays légendaire de Gygès et de Crésus, où coule le Pactole, la Lydie vit apparaître, sous Gygès, des pièces d'electrum (alliage naturel d'or et d'argent, de couleur ambrée) avec protomé de lion à l'avers, et au revers la marque du poinçon, dans le système sexagésimal mésopotamien. À dire vrai, ces pièces sont plutôt des pastilles de forme irrégulière et rappelleraient encore de petits lingots. Au même moment (vers 680), les cités côtières marchandes – Milet, Éphèse, Phocée – frappaient des monnaies « privées ». C'est Crésus qui, le premier, frappa double monnayage, or et argent, dans des pièces plus pures et plus légères (vers 550), les créséides qui firent sa réputation. Plus tard, toujours en Asie Mineure, l'Empire perse frappa, sous Darius, la darique (vers 510), égale à un sicle babylonien et réservée aux échanges avec l'étranger ; mais à l'intérieur, les échanges se faisaient en nature, et l'emploi de termes monétaires dans les documents n'était toujours qu'un procédé de compte, sans réalité économique. Ces dariques, portant l'emblème de l'archer royal, furent frappées jusqu'à la conquête d'Alexandre ; les satrapes, à leur tour, usurpant le droit de monnayage, frappèrent monnaie à leur propre effigie (vers 400).

Grèce

Monnaie : poids des monnaies utilisées dans le Péloponnèse et en Attique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Monnaie : poids des monnaies utilisées dans le Péloponnèse et en Attique

Les noms sous lesquels sont désignées les monnaies grecques sont des noms de poids : talent, mine, sicle. Mais l'existence de deux systèmes de référence rendait les équivalences assez difficiles à calculer : l'un de ces systèmes, originaire d'Argos et d'Égine, prévalut dans le Péloponnèse ; l'autre en Attique et Eubée.

En fait, Rhodes, Milet, Corinthe, grandes places commerciales, frappèrent elles aussi leur monnaie, d'après des étalons originaux. La complexité des comptes était donc extrême et, dans les réunions panhelléniques de Delphes ou d'Olympie, la présence de changeurs (trapézites) indispensable.

Chacune de ces monnaies portait d'abord un type fixe, servant de blason à la cité émettrice : phoque à Phocée, taureau à Samos, cerf ou abeille à Éphèse, lion à Milet, chouette à Athènes. Mais comme, du viie au iiie siècle avant notre ère, près de 1 400 villes et 500 chefs d'État battirent monnaie, ces types sont en fait très variés et reflètent l'évolution politique d'une cité. Ainsi, à Athènes, les types monétaires firent apparaître les vicissitudes de la lutte entre tyrans et aristocrates, puis entre ces derniers et Clisthène. Après la victoire sur les Perses, Athènes donna enfin une base monétaire à sa prépondérance : la chouette de son tétradrachme d'argent se répandit dans tout le bassin méditerranéen de 476 à 413, le monnayage des alliés étant suspendu. Ce n'est que dans les périodes de crise (407, 295) qu'Athènes frappa des monnaies d'or : l'impossibilité de recourir aux mines du Laurion imposait la fonte du trésor et des statues. Quant aux pièces de bronze, elles n'eurent qu'une durée éphémère.

Tétradrachme de Syracuse - crédits : G. Dagli Orti/ De Agostini/ Getty Images

Tétradrachme de Syracuse

En dehors d'Athènes, c'est la Grande-Grèce (Sicile et Italie du Sud) qui frappa les monnaies les plus belles et les plus variées : dauphin de Tarente, coq d'Himère, faucille de Zancle (Messine) et surtout la figure féminine du tétradrachme de Syracuse.

Statère en or de Philippe de Macédoine - crédits :  Bridgeman Images

Statère en or de Philippe de Macédoine

Au-delà des régions helléniques, leur monnaie s'imposait encore : les pièces de Carthage ou de Marseille imitèrent celles de Syracuse, les pièces de Rosas (Espagne) celles de Rhodes avec la rose pour emblème commun. Dès le ive siècle, les Gaulois copiaient sans scrupules les statères d'or de Philippe de Macédoine.

C'est après la mort d'Alexandre,[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, directeur d'études à l'École pratique des hautes études, ancien rapporteur général du Haut Comité de la langue française

Classification

Pour citer cet article

Michel BRUGUIÈRE. MONNAIE - Histoire de la monnaie [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Denier romain - crédits : A. Dagli Orti/ De Agostini/ Getty Images

Denier romain

Monnaie : poids des monnaies utilisées dans le Péloponnèse et en Attique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Monnaie : poids des monnaies utilisées dans le Péloponnèse et en Attique

Tétradrachme de Syracuse - crédits : G. Dagli Orti/ De Agostini/ Getty Images

Tétradrachme de Syracuse

Autres références

  • LA SIGNIFICATION SOCIALE DE L'ARGENT (V. A. Zelizer)

    • Écrit par Frédéric LEBARON
    • 999 mots

    La traduction de The Social Meaning of Money, publié aux États-Unis en 1994 (coll. Liber, Seuil, 2005), permet au public francophone d'accéder directement à ce qui est devenu un « classique » de la nouvelle sociologie économique américaine, consacré à la question, centrale en cette période de « marchandisation...

  • RELATIONS MONÉTAIRES INTERNATIONALES - (repères chronologiques)

    • Écrit par Francis DEMIER
    • 530 mots

    1821 Instauration de l'étalon or en Angleterre quelques années après l'adoption de l'Act de Lord Liverpool (1816).

    Années 1870 L'or devient la base des relations monétaires de l'Europe de l'Ouest.

    1888 Premiers emprunts russes auprès de la France.

    1914 Suspension...

  • BÂLE ACCORDS DE (1972)

    • Écrit par Marie-France BAUD-BABIC
    • 303 mots

    Le 24 avril 1972, les accords monétaires de Bâle sont signés. Ils mettent en place l'une des propositions du plan rédigé par l'équipe réunie autour de Pierre Werner, Premier ministre luxembourgeois de l'époque, proposant de parvenir par étapes à la création d'une Union économique et monétaire....

  • AFTALION ALBERT (1874-1956)

    • Écrit par Guy CAIRE
    • 194 mots

    Né en Bulgarie, mort à Genève, Aftalion a enseigné successivement aux universités de Lille et de Paris. On lui doit une œuvre abondante et plusieurs contributions importantes à la théorie économique moderne. Dans son ouvrage Les Crises périodiques de surproduction (1913), il montre comment...

  • AGLIETTA MICHEL (1938- )

    • Écrit par Yamina TADJEDDINE
    • 1 086 mots
    • 1 média

    Penseur du capitalisme et de la monnaie, Michel Aglietta est un chercheur, un pédagogue et un expert reconnu des économistes, des historiens et des anthropologues, mais aussi des politiciens et des syndicalistes de toute tendance.

    Né dans une famille modeste d’immigrés italiens en 1938 à Chambéry,...

  • AGRÉGAT ÉCONOMIQUE

    • Écrit par Marc PÉNIN
    • 1 488 mots
    Une catégorie particulièrement importante, pour l'analyse et la politique économique, des agrégats de stock est constituée par les agrégatsmonétaires (ensemble des moyens de paiement et des actifs financiers facilement convertibles en moyens de paiement, possédés par les agents économiques non...
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Voir aussi