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COPEAU JACQUES (1879-1949)

Pour un théâtre sans « trucs »

Dès le manifeste publié dans la N.R.F. de septembre 1913, Copeau donnait le pas à l'interprétation sur la mise en scène proprement dite. Il s'élevait contre certaines tendances qui se faisaient jour alors en Russie (Meyerhold, Stanislavski) ou en Allemagne (Reinhardt, Erler, Fuchs). La prééminence des recherches techniques ainsi qu'une tendance à la systématisation lui semblaient dangereuses. « La tare des réformes scéniques étrangères, c'est que, jusqu'ici du moins, elles ne marchent de pair avec aucun mouvement dramatique caractérisé. Tenir pour telle ou telle formule décorative, c'est toujours s'intéresser au théâtre par l'à-côté. Se passionner pour des inventions d'ingénieurs ou d'électriciens, c'est toujours accorder à la toile, au carton peint, à la disposition des lumières, une place usurpée ; c'est toujours donner, sous une forme quelconque, dans les trucs. Anciens ou nouveaux, nous les répudions tous. Bonne ou mauvaise, rudimentaire ou perfectionnée, artificielle ou réaliste, nous entendons nier l'importance de toute machinerie [...]. Pour l'œuvre nouvelle, qu'on nous laisse un tréteau nu. » C'est à cette règle d'or, dont la rigueur ne va pas sans engendrer des abus, que répondra le dispositif fixe du Vieux-Colombier, élaboré avec Louis Jouvet.

En ce sens et dans la mesure où l'on peut parler d'une école française de la mise en scène, Jacques Copeau en aura été le plus pur et le plus exigeant représentant.

À l'égard de l'auteur, de l'acteur et du metteur en scène, comme à celui du spectateur et du critique, Copeau a ainsi exercé une sorte de magistère qui a pu paraître parfois d'une excessive rigueur. Il a dénoncé les complaisances de métier de l'écrivain de théâtre et le cabotinage du comédien, fruit d'une formation artificielle et sommaire, autant que du commerce théâtral. Au metteur en scène, il a rappelé qu'il est à son rang un créateur, dont l'invention reste cependant subordonnée au texte du poète. Au public, il a enseigné la grandeur d'un art difficile. Quant au critique, il souhaitait qu'il prît sa fonction au sérieux et qu'il l'exerçât dans la liberté.

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Pour citer cet article

Georges LERMINIER. COPEAU JACQUES (1879-1949) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ACTEUR

    • Écrit par Dominique PAQUET
    • 6 815 mots
    • 2 médias
    ...de rigueur. Grâce aux travaux de François Delsarte et de Jaques-Dalcroze, la machine corporelle est mise en relation avec l'esprit et le rythme. Jacques Copeau s'en souviendra, qui fondera la formation de l'acteur sur des exercices de gymnastique rythmique, d'acrobatie, de danse,...
  • BOULEVARD THÉÂTRE DE

    • Écrit par Daniel ZERKI
    • 5 988 mots
    C'est précisément contre ces facilités que Copeau, dès avant 1914, puis les metteurs en scène du Cartel, après 1920, mènent le combat. Cette lutte a paradoxalement pour effet d'appauvrir encore le répertoire du Boulevard : puisque le public difficile va au Cartel, les théâtres de boulevard ne se feront...
  • CARTEL, théâtre

    • Écrit par Pierre-Aimé TOUCHARD
    • 2 015 mots
    • 1 média
    ...thèmes de la pensée contemporaine, quels qu'ils fussent, pourvu qu'ils expriment les inquiétudes, les refus, les espoirs et les volontés de son époque. Copeau avait corrigé son excès de libéralisme en rappelant que le théâtre avait ses lois propres, qu'il était un art indépendant, avec ses moyens...
  • FONDATION DU THÉÂTRE DU VIEUX-COLOMBIER

    • Écrit par Jean CHOLLET
    • 216 mots

    Lorsque, avec l'appui de ses amis de La Nouvelle Revue française, André Gide, Gaston Gallimard et Jean Schlumberger, Jacques Copeau (1879-1949) fonde en 1913 le Théâtre du Vieux-Colombier, à Paris, il lance un « appel » resté célèbre dans l'histoire du théâtre contemporain. Il s'adresse...

  • Afficher les 9 références

Voir aussi