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ISTANBUL

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Konstantiniyye ou l'Istanbul ottomane

Harem du palais de Topkapi, Istanbul - crédits : Joseph Kranak/ flickr ; CC-BY

Harem du palais de Topkapi, Istanbul

Contrairement à ce qu'une certaine historiographie a longtemps laissé entendre, la période ottomane n'est pas une période sombre – sorte de longue décadence ou de parenthèse sans intérêt – pour l'organisme urbain. Aux lendemains de la conquête de 1453 par le sultan Mehmet II, après que celui-ci a fait le choix d'y implanter sa capitale politique (soit en 1459), renonçant à Edirne (Andrinopolis) où il était né, une politique de repeuplement autoritaire est entreprise, qui conduit à l'apparition d'une toponymie faisant référence aux origines des personnes implantées (l'actuel quartier d'Aksaray, par exemple, a été « peuplé » de personnes provenant de cette ville d'Anatolie centrale). Au gré des conquêtes et des campagnes militaires, cette politique volontariste sera poursuivie jusqu'à la fin du xvie siècle. Parallèlement, de grands chantiers sont lancés par les sultans et leurs proches, qui visent à marquer la ville de l'empreinte et de l'esprit de ses nouveaux « propriétaires ». Le palais de Topkapı, commencé en 1472, est achevé dès 1478 ; ce sera la résidence principale des sultans jusqu'au milieu du xixe siècle. Des églises sont transformées en mosquées, notamment Sainte-Sophie, Saint-Sauveur-in-Chora, ou l'église des Saints-Apôtres, qui devient la mosquée de Fatih, à la gloire de Mehmet le Conquérant (il y fera aménager son mausolée) et parfois même en külliye, véritables complexes, comprenant outre le lieu de culte, des centres de soins, des bibliothèques, des medrese et des logements. Les bazars (Grand Bazar puis Bazar égyptien notamment), les han (caravansérails), hammams et fontaines se multiplient. Ce mouvement de construction s'est fait généralement sous la forme juridique de fondations pieuses (vakıf), formes ottomanes de l'évergétisme. On dénombre dans la ville 4 000 vakıf au début du xvie siècle. Sous Soliman le Magnifique (1520-1566) culmine ce mouvement de construction monumentale qui finit par transformer le visage de la ville. L'architecte emblématique du xvie siècle est Mimar Sinan – ancien janissaire d'origine chrétienne, actif à Konstantiniyye de 1539 à 1588 – à qui plus d'une centaine d'œuvres importantes sont attribuées (notamment la mosquée de Soliman, celle de Sokollu Mehmet Paşa, des aqueducs, des mausolées, des tekke, des medrese).

Intérieur de Sainte-Sophie - crédits : Robert Frerck/ The Image Bank/ Getty Images

Intérieur de Sainte-Sophie

Coupole de la mosquée de Soliman - crédits : Hermes Images/ AGF/ Universal Images Group/ Getty Images

Coupole de la mosquée de Soliman

À la fin du xviie siècle, Istanbul est la plus grande ville d'Europe avec 700 000 habitants, alors qu'elle comptait environ 100 000 habitants selon le recensement de 1477. À partir du xviiie siècle, alors que l'influence européenne dans l'architecture puis l'urbanisme commence à se manifester, la population stagne par rapport aux autres grandes agglomérations européennes, puisque les chiffres officiels pour 1913-1914 indiquent une population qui dépasse à peine 800 000 habitants, malgré l'afflux croissant de réfugiés, parallèle à la contraction territoriale de l'Empire engagée dès la fin du xviiie siècle.

Si la ville n'est plus exposée aux sièges (si ce n'est celui des Cosaques en 1624), elle est ébranlée à plusieurs reprises par des tremblements de terre : 1509 (« La grande catastrophe »), 1711, 1894... ; et les incendies à répétition ont aussi été des facteurs de renouvellement du tissu urbain, notamment avec le développement des lotissements (en dur) après les incendies, à partir du milieu du xixe siècle. La destruction des murailles de Galata (1864) pour permettre l'extension du tissu urbain sur un mode très parisien ou bruxellois (immeubles de rapport) et le grand incendie de Péra (1870) accélèrent la transformation de la « ville européenne », au même titre que l'ouverture du funiculaire (1875), qui relie le port de Karaköy, sur la Corne[...]

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Pour citer cet article

José GROSDIDIER DE MATONS et Jean-François PÉROUSE. ISTANBUL [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 10/02/2009

Médias

Turquie : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Turquie : carte administrative

Constantinople au Moyen Age - crédits : Encyclopædia Universalis France

Constantinople au Moyen Age

Intérieur de Sainte-Sophie de Constantinople (Istanbul) - crédits :  Bridgeman Images

Intérieur de Sainte-Sophie de Constantinople (Istanbul)

Autres références

  • BAZAR

    • Écrit par
    • 3 350 mots
    • 8 médias
    ...ne sauraient être tenus pour caractéristiques du bazar en général. Le bedesten, édifice central du çarsi̊ ottoman, a donné lieu à des réalisations architecturales prestigieuses, dont celles de Brousse, d'Edirne, d'Ankara, toutes du xve siècle, et le Sandal-Bedestend'Istanbul, du xvie siècle.
  • CETTE CHOSE ÉTRANGE EN MOI (O. Pamuk)

    • Écrit par
    • 959 mots

    Le roman d’Orhan Pamuk nous invite à découvrir la mutation sociale d’une ville et d’un pays à travers la vie de petites gens venus d’Anatolie chercher une meilleure vie à Istanbul. On savait que l’écrivain, au fait de tous « les secrets des rues d’Istanbul », maniait magistralement toutes...

  • ERDOGAN RECEP TAYYIP (1954- )

    • Écrit par
    • 1 185 mots
    • 3 médias

    Homme politique turc, Recep Tayyip Erdogan est Premier ministre de 2003 à 2014, puis président de la République de Turquie à partir de 2014.

    Né le 26 février 1954 à Rize, dans le nord-est de la Turquie, au bord de la mer Noire, Recep Tayyip Erdogan se forge dès le lycée la réputation d'un fougueux...

  • ÉVOLUTION DE LA VILLE ISLAMIQUE

    • Écrit par
    • 3 970 mots
    • 1 média
    ...Damas, par le captage de sources comme à Alep, par l'utilisation de machines élévatoires comme à Hama, par la construction d'aqueducs monumentaux comme à Istanbul, par le forage de galeries souterraines comme dans les villes d'Iran, par des citernes et bassins comme à Kairouan ou par la proximité...
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