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BAZAR

Le mot bazar, « marché », qui vient du pahlévi vacar et correspond à l'arabe sūq ou au turc çarsi̊ (du pahlévi cahar suq, persan car-su, « carrefour »), désigne, de manière générale, le centre commercial et artisanal traditionnel de toute ville ou localité en pays d'islam ; il peut être utilisé pour les foires annuelles et pour les marchés ruraux hebdomadaires ; en tout cas, il s'agit d'un « lieu public où s'exercent, dans un espace restreint, des activités masculines multiples, par opposition à la zone d'habitat, réservée à la vie privée, et aux zones de culture et d'élevage, où l'activité est uniforme et dispersée » (Centlivres). Cet élément essentiel de la vie urbaine médiévale, dont certains traits se sont perpétués jusqu'à la période moderne, a également contribué à modeler la physionomie architecturale des cités au milieu desquelles il s'est développé et où il occupe encore souvent aujourd'hui une place de premier plan.

Aspects historiques

Si on le considère dans une perspective historique, le marché, de même que le bain, semble avoir été en milieu musulman un héritage du monde antique, aussi bien méditerranéen qu'oriental. La plupart des éléments qui le structurent étaient en effet connus dès l'Antiquité, notamment, sur le plan fonctionnel, diverses particularités concernant le commerce de détail, l'artisanat, le commerce de gros, les échanges à longue distance ou le prêt d'argent et, sur le plan architectural, l'utilisation de la rue à boutiques, de la halle couverte et de la cour intérieure à arcades. Il n'en reste pas moins que la concentration spatiale caractéristique du bazar ou du sūq doit être en elle-même considérée comme propre à la civilisation de l'islam. Le marché de La Mekke semble avoir été le centre commercial le plus important de l'Arabie préislamique, la plaque tournante où se traitaient notamment les affaires du grand commerce ; d'autres marchés urbains (appelés déjà sūq-s), où se rencontraient Bédouins, paysans et citadins, sont attestés dès cette époque.

Sur l'organisation matérielle, administrative et juridique des marchés pendant la période médiévale, nous sommes renseignés, à partir du xie siècle, par des textes arabes appartenant à la catégorie des manuels dits de hisba, largement postérieurs toutefois à l'apparition de l'institution de ce nom dont ils précisent certaines habitudes. Le terme de hisba, qui désigne en effet en milieu islamique le devoir de recommander le bien et d'empêcher le mal, s'applique aussi à la police des mœurs et à l'inspection du marché, assurées par un personnage qui portait le nom de muhtasib. Un certain nombre d'ouvrages ou de fragments d'ouvrages consacrés à la hisba sont très généraux et théoriques, tels ceux d'al-Mawardi et d'al-Ghazali pour ne citer que les plus célèbres. Mais d'autres, de caractère plus pratique, prodiguent des conseils détaillés et donnent ainsi au lecteur du xxe siècle une image extraordinairement vivante des marchés médiévaux.

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art et d'archéologie islamiques à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Marianne BARRUCAND. BAZAR [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Khan - crédits :  Bridgeman Images

Khan

Complexe commercial d'Alep - crédits : Encyclopædia Universalis France

Complexe commercial d'Alep

Bazar d'Istanbul - crédits : Encyclopædia Universalis France

Bazar d'Istanbul

Autres références

  • AFGHANISTAN

    • Écrit par Daniel BALLAND, Gilles DORRONSORO, Universalis, Mir Mohammad Sediq FARHANG, Pierre GENTELLE, Sayed Qassem RESHTIA, Olivier ROY, Francine TISSOT
    • 37 316 mots
    • 19 médias
    ...contribuent de manière décisive à la survie et à l'ouverture sur le monde extérieur de maintes communautés rurales qui vivaient naguère repliées sur elles-mêmes. La multiplication des bazars ruraux permanents dans les années 1990 illustre de manière spectaculaire cette monétarisation exogène croissante de l'économie...
  • ÉVOLUTION DE LA VILLE ISLAMIQUE

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    • Écrit par Christian BROMBERGER
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    L'artisanat et le petit négoce – le monde du bāzār, ce secteur clé de l'économie urbaine traditionnelle en Orient – eurent également à pâtir des projets de développement grandioses mis en œuvre par le régime pahlavi : l'importation de produits fabriqués, l'augmentation rapide d'un commerce...
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Voir aussi