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ISIDORE DE SÉVILLE (560 env.-636)

L'œuvre littéraire et ses sources

Isidore est né, il a vécu et écrit dans la plus romanisée des provinces de l'Espagne romaine : la Bétique (l'actuelle Andalousie) ; la plus ouverte aussi, depuis des millénaires, aux influences de l'Orient et de l'Afrique. À l'entrée de la bibliothèque sévillane, on pouvait lire : « Il est ici bien des œuvres sacrées, bien des œuvres profanes » ; ce vers trace à lui seul un programme. L'Afrique chrétienne, persécutée par les Vandales, mal reconquise par les Byzantins, continuait d'enrichir l'Espagne de ses réfugiés et de leurs livres. Havre de paix dans l'Occident de cette fin du vie siècle, l'Espagne se trouve appelée à devenir comme le conservatoire de la culture antique ; la bibliothèque sévillane en est alors le centre le plus brillant. Tout en accordant une priorité aux grands écrivains chrétiens du ive au vie siècle, en particulier Augustin, Cassiodore, Grégoire le Grand – ce dernier fut l'ami personnel de son frère aîné Léandre –, Isidore tente d'assumer cet immense héritage dans toute sa diversité. C'est pourquoi manuels scolaires et auteurs classiques s'associent, dans les sources de ses œuvres, aux Pères latins les plus anciens : Tertullien, Cyprien, Hilaire, Ambroise.

La formation intellectuelle et spirituelle des clercs, des moines, mais aussi des laïcs destinés aux responsabilités politiques, importe à cet évêque ami des monarques. C'est à leur usage qu'il multiplie les manuels d'initiation liturgique, exégétique, théologique (les trois livres des Sentences annoncent les « sommes » médiévales). N'oubliant pas que toute culture commence par le maniement précis d'une langue, il est attentif à la grammaire et aux savoirs profanes. Son œuvre culmine dans les vingt livres des Étymologies sur l'origine de certaines choses. Lointainement inspirée, dans son contenu, sa forme, et surtout son orientation à la fois érudite et « romaine », par l'œuvre de l'« antiquaire » latin Varron (le contemporain d'Octave Auguste), cette immense «   encyclopédie », en un sens encore antique et déjà médiévale, embrasse, entre les sept arts et les techniques matérielles, le droit, la médecine, les savoirs sacrés et les sciences naturelles. Son auteur fut aussi historien, poète, liturgiste.

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Écrit par

  • : professeur titulaire à l'université de Paris-IV-Sorbonne, président de l'Institut des études augustiniennes

Classification

Pour citer cet article

Jacques FONTAINE. ISIDORE DE SÉVILLE (560 env.-636) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BESTIAIRES

    • Écrit par Françoise ARMENGAUD, Daniel POIRION
    • 10 728 mots
    • 11 médias
    ...à cette tradition du Physiologus, dont la culture est en somme étroite et le symbolisme arbitraire, l'attitude beaucoup plus intelligente d' Isidore de Séville. Le livre XII de ses Etymologiae (« De animalibus ») montre que, dès le début du viie siècle, il y a des gens qui savent organiser...
  • ENCYCLOPÉDIE

    • Écrit par Alain REY
    • 5 659 mots
    • 6 médias
    ...recueil historique et anthologique. Au siècle suivant, le projet encyclopédique majeur, influent pendant tout le Moyen Âge, est un ouvrage de l'évêque Isidore de Séville (env. 560-636), au service des rois Wisigoths, qu'on nomme Etymologiae ou Origines. C'est une œuvre complexe, à la fois encyclopédie...
  • ÉTYMOLOGIE

    • Écrit par Paul ZUMTHOR
    • 5 411 mots
    ...jusqu'à l'ornementation rhétorique (calembours). Les Pères de l'Église l'utilisèrent comme un moyen auxiliaire en vue de l'interprétation du texte sacré. Isidore de Séville, au début du viie siècle, constitua une somme des spéculations de ce genre : ses Etymologiae (ou Origines : les deux titres sont...
  • MOYEN ÂGE - La littérature latine savante

    • Écrit par Alain MICHEL
    • 3 264 mots
    ...Aristote, pouvait s'accorder à la tradition chrétienne. Mais, dans l'immédiat, on assistait à la régression et à des solutions précaires. Isidore, évêque de Séville sous la domination wisigothique, essayait d'établir un « digest » du savoir antique dans ses Étymologies. Il y...

Voir aussi