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GROENLAND

Une étape supplémentaire vers l’indépendance

Après trente ans de domination du parti social-démocrate (Siumut), les élections de 2009 montrent que le paysage politique est en train de se modifier. En effet, Kuupik Kleist, du parti indépendantiste Inuit Ataqatigiit, plus à gauche que le Siumut, prend alors la tête de l’exécutif. Après une pause de quatre ans, le Siumut réussit à s’imposer à nouveau aux deux élections législatives suivantes, en 2013 et 2014.

L’événement le plus marquant de l’année 2009 est sans conteste l’accession du Groenland à l’autonomie élargie (selvstyre), étape supplémentaire sur la voie de l’indépendance. Élaboré de 2004 à 2008 par une commission dano-groenlandaise présidée par Jonathan Motzfeldt, Premier ministre du Groenland de 1979 à 1991 et de 1997 à 2002, et chef de file du mouvement qui avait abouti en 1979 à l’instauration de l’autonomie interne, le texte du projet de loi fut soumis à un référendum consultatif le 25 novembre 2008 et approuvé par 75,54 p. 100 des votants, avec un taux de participation de 71,96 p. 100, exceptionnellement élevé pour le Groenland. Il entra en vigueur le 21 juin 2009, le jour du trentième anniversaire de la proclamation de l’autonomie interne (hjemmestyre).

S’agissant de la gestion des ressources naturelles, point capital du texte, il est stipulé que les revenus de ces activités reviendront au gouvernement groenlandais, propriétaire du sous-sol, mais qu’au-delà d’un seuil fixe de 75 millions de couronnes, la moitié de ceux-ci seront déduits de la dotation annuelle (bloktilskud), fixée à 3,4 milliards de couronnes indexés sur les prix et les salaires danois, soit à peu près un quart du P.N.B. groenlandais. Si ce mécanisme ramène la dotation versée par l’État danois au niveau zéro, des négociations seront alors engagées pour définir un nouveau type de relations économiques entre les deux pays, ainsi que le mode de répartition de ces revenus spécifiques.

La langue groenlandaise est désignée comme langue officielle du pays, et un pas supplémentaire est également franchi dans le domaine de la politique étrangère, puisque le gouvernement territorial a désormais la possibilité de participer aux discussions le concernant, de négocier et de conclure lui-même des accords internationaux, à condition qu’il respecte les intérêts du royaume dans son ensemble (rigsfællesskabet) et qu’il obtienne l’accord du gouvernement danois. Le Groenland n’est donc pas un État souverain. Sa politique étrangère et de sécurité dépend toujours dans une large mesure du Danemark.

Les richesses du sous-sol groenlandais ont depuis très longtemps retenu l’attention des milieux scientifiques, mais, mis à part la cryolite, qui a donné lieu à une activité importante au xixe siècle et jusque vers 1950, elles n’ont jamais été exploitées à grande échelle. Il a fallu attendre les années 2000, marquées par une forte augmentation des prix du pétrole sur le marché mondial et les nouvelles perspectives ouvertes par le réchauffement climatique, particulièrement sensible dans l’Arctique, pour que le potentiel énergétique du Groenland (réserves de pétrole et de gaz offshore) et l’ouverture de nouvelles voies maritimes suscitent un grand intérêt au niveau international (États-Unis, Chine, Union européenne…). Il en est résulté à court terme une vague d’optimisme, souvent exagéré, quant à l’avenir du pays.

Plusieurs facteurs, parmi lesquels l’importance des investissements que demande l’exploitation des réserves offshore d’hydrocarbures, de même que la baisse importante du prix du pétrole enregistrée à partir de 2014 au niveau mondial, rendent le secteur du pétrole et du gaz beaucoup moins attrayant que prévu. En revanche, une attention accrue a été accordée depuis lors à la richesse minière du pays.

Ces enjeux économiques gigantesques[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, professeur émérite à l'université de Paris-Sorbonne, docteur d'État, docteur honoris causa de l'université d'Aalborg (Danemark)
  • : agrégé d'histoire, docteur ès lettres, professeur d'histoire moderne à l'université Pierre-Mendès-France, Grenoble
  • : maître de recherche au C.N.R.S.
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Marc AUCHET, Jean Maurice BIZIÈRE, Jean CORBEL et Universalis. GROENLAND [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Groenland [Danemark] : carte physique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Groenland [Danemark] : carte physique

Groenland, X<sup>e</sup>-XVII<sup>e</sup> siècle - crédits : Encyclopædia Universalis France

Groenland, Xe-XVIIe siècle

Fridtjof Nansen - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Fridtjof Nansen

Autres références

  • DÉCOUVERTE DU GROENLAND

    • Écrit par Sylvain VENAYRE
    • 183 mots
    • 1 média

    Vers 870, les Vikings norvégiens occupèrent l'Islande et, à partir de là, explorèrent les mers du Nord à la recherche d'huile de phoque, de fourrures d'ours blanc ou d'ivoire de morse. Une saga rapporte qu'un certain Erik le Rouge, venant de l'est, aurait alors...

  • AMÉRIQUE (Structure et milieu) - Géologie

    • Écrit par Jean AUBOUIN, René BLANCHET, Jacques BOURGOIS, Jean-Louis MANSY, Bernard MERCIER DE LÉPINAY, Jean-François STEPHAN, Marc TARDY, Jean-Claude VICENTE
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    La frange tectonisée du Groenland oriental, outre le socle archéen remobilisé, comprend des formations du Protérozoïque moyen (Hélikien) et du Paléozoïque inférieur, déformées et déversées vers le bouclier. Il s'agit là, dans le prolongement des chaînes appalachiennes, de la partie de l'édifice calédonien...
  • AMÉRIQUE (Structure et milieu) - Géographie

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    ...sous-sol gelé en permanence, ou permafrost. Malgré le peu de précipitations, l'évaporation étant faible, de nombreux marécages apparaissent en été. Cette zone recouvre une grande partie de l'Alaska et du Canada, les îles de l'océan Arctique et les parties côtières du Groenland libres de glaces.
  • AMÉRIQUE (Histoire) - Découverte

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    • 6 médias
    Il est aujourd'hui certain que ces extraordinaires navigateurs qu'ont été les Vikings ont su aller en droiture de la Norvège au Groenland du Sud, et au-delà, sans se servir de cartes ni de boussole, en suivant approximativement le 60e parallèle. Ces navigations eurent pour résultat une véritable...
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