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FRANC FRANÇAIS

Inflations et déflations de l'entre-deux-guerres

La guerre, en France comme ailleurs, ouvre durablement l'ère de l'inflation. La valeur de la monnaie varie comme l'inverse du niveau général des prix à l'intérieur ; à l'extérieur, son cours de change fluctue : il reflète à moyen terme la différence de taux d'inflation avec l'étranger et exprime, à court terme, la différence de taux d'intérêt. Dans les deux cas, la valeur réelle de la monnaie est corrélée à la croissance de la masse monétaire en excès de celle du volume de l'activité économique.

Masse monétaire de 1913 à 1944 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Masse monétaire de 1913 à 1944

L'instabilité monétaire caractérise la période de l'entre-deux-guerres, des adaptations institutionnelles marquant chaque phase notable. La référence à l'or est tardivement éliminée, le crédit marque le pas et le papier-monnaie inconvertible fait, à retardement, une percée qui trouve peu d'équivalent à l'étranger. La succession des phases d'inflation et de déflation au fil des cycles conjoncturels courts explique, pour une large part, les principaux changements.

La stabilisation Poincaré

Prix et change dans l'entre-deux-guerres - crédits : Encyclopædia Universalis France

Prix et change dans l'entre-deux-guerres

En 1926, les prix de gros sont huit fois plus élevés qu'en 1913. À l'effondrement de la production de 30 à 40 p. 100 succèdent une crise de reconversion et une politique de reconstruction financée par le déficit budgétaire et la création de monnaie. L'écart inflationniste est alimenté par la multiplication de l'émission de billets en contrepartie des avances au Trésor consenties par la Banque de France. Le Trésor est également endetté à hauteur de dix fois le stock de billets en circulation. Les capitaux flottants attirés par la perspective du retour de la livre sterling à l'étalon or (1925) recherchent des placements à Londres. Le cours du franc sur le marché des changes est déprécié de 80 p. 100 par rapport à 1914. La France a perdu les deux tiers de ses investissements étrangers d'avant guerre. La dépréciation du franc ponctue l'instabilité politique. En particulier, de 1924 à 1926, le Cartel des gauches se heurte à la spéculation contre le franc avivée par l'appréciation du sterling. La panique des classes moyennes et l'opposition conservatrice du « mur d'argent » alimentent des sorties massives de capitaux fébriles. La livre est à 243 francs en juillet 1926, au plus fort de la spéculation contre le franc.

Le gouvernement Poincaré d'union nationale (juillet 1926-juillet 1928) entreprend un assainissement financier et conduit une politique classique de déflation visant à la réduction de la masse monétaire en circulation : exécution du budget en excédent, remboursement à la Banque de France des avances consenties au Trésor, augmentation des impôts, achats de livres sterling sur le marché des changes.

La stabilisation s'opère en deux étapes. La loi du 7 août 1926 fait adhérer la France à l'étalon de change or, conformément aux recommandations de la conférence monétaire internationale de Gênes (1922) – en fait, à l'étalon sterling, puisque seule en Europe la livre est redevenue convertible en or. Cette étape est pour les autorités seulement transitoire et l'intention réelle est de favoriser, par des achats de livres, une remontée du franc. On n'accepte pas l'idée de subordonner le franc à la livre ; on vise en réalité le retour à l'or, comme la Grande-Bretagne, quitte à convertir en or les livres récemment acquises sur le marché. Il reste à choisir un pair. À la différence de la Grande-Bretagne, on n'ira pas jusqu'à rétablir le pair de 1914 ; on sanctionnera en partie l'inflation récente ; mais, pour le prestige du franc qui doit être une monnaie forte, on choisira une parité supérieure au cours le plus déprécié de 1926. Ce sera donc un retour au monométallisme or assorti d'une dévaluation du franc par rapport au pair du franc germinal et d'une réévaluation[...]

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Écrit par

  • : professeur de sciences économiques à l'université de Bordeaux-IV-Montesquieu, directeur du Groupe de recherche en analyse et politique économiques, unité mixte du C.N.R.S. 5113

Classification

Pour citer cet article

Dominique LACOUE-LABARTHE. FRANC FRANÇAIS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Masse monétaire de 1814 à 1913 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Masse monétaire de 1814 à 1913

Masse monétaire de 1913 à 1944 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Masse monétaire de 1913 à 1944

Prix et change dans l'entre-deux-guerres - crédits : Encyclopædia Universalis France

Prix et change dans l'entre-deux-guerres

Autres références

  • MONNAIE MÉTALLIQUE EN FRANCE - (repères chronologiques)

    • Écrit par Pascal BURESI
    • 387 mots

    310 Le premier solidus (sou), pièce d'or, est frappé à Trèves et s'impose en Occident pour près d'un demi-millénaire.

    864 Édit de Pîtres. Pour contrôler la frappe, Charles le Chauve limite à dix le nombre d'ateliers monétaires.

    1018 La Catalogne, ancienne province...

  • BILLON

    • Écrit par Jean DÉRENS
    • 702 mots

    Terme qui désigne les monnaies de métal vil, ou de métal précieux dont le titre est très fortement altéré. Les monnaies de billon ne doivent leur pouvoir libératoire qu'à la confiance du public et leur valeur intrinsèque est toujours très inférieure à leur valeur nominale. Le terme est le plus...

  • BIMÉTALLISME

    • Écrit par P. SCHAEFER
    • 442 mots

    Système monétaire qui combine deux étalons, or et argent. La loi du 7 germinal an XI (28 mars 1803), qui instituait en France un système bimétalliste, fixa les trois conditions nécessaires à un tel système : un rapport légal fixe entre les deux métaux, l'or ayant une valeur 15,5 fois supérieure...

  • CHANGE - L'intégration monétaire européenne

    • Écrit par Christian BORDES
    • 14 365 mots
    • 6 médias
    Les remous monétaires qui avaient été observés en 1968 se poursuivent, obligeant les autorités françaises à dévaluer le franc de 11,1 p. 100 le 8 août et à renforcer les contrôles de mouvements de capitaux. Quelques semaines plus tard (le 24 octobre), le deutsche Mark est réévalué de 9,3 p. 100. Au...
  • CHANGES CONTRÔLE DES

    • Écrit par Georges BLUMBERG
    • 735 mots

    Mesures prises par un gouvernement pour réglementer l'achat et la vente de monnaies étrangères par ses ressortissants. C'est à la suite des grands déséquilibres économiques et financiers provoqués par la Première Guerre mondiale que de nombreux États ont été amenés à limiter, voire à supprimer,...

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Voir aussi