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ALLEMAGNE (Politique et économie depuis 1949) République démocratique allemande

L'ère Khrouchtchev : déstalinisation et défi à l'Occident (1956-1961)

Des changements difficiles et limités

Le XXe congrès du P.C. de l'U.R.S.S. (du 14 au 25 février 1956) et la condamnation par Khrouchtchev des crimes de Staline furent assurément une surprise pour les dirigeants de la R.D.A. : le message de vœux envoyé par le S.E.D. au congrès le 14 février 1956 se terminait en effet par : « Vivent les invincibles leçons de Marx, Engels, Lénine et Staline. » La déstalinisation posa en République démocratique allemande des problèmes qui, sans conduire à des cassures aussi profondes que dans les autres démocraties populaires, n'en dominèrent pas moins pendant plusieurs années la vie du parti et de la République.

Dès le 4 mars, Walter Ulbricht, au nom du Politbüro, tirait les enseignements du XXe congrès : retour aux principes léninistes de la « direction collective », condamnation du culte de la personnalité, refus de ranger Staline parmi les « classiques du marxisme ». Quelques jours après, il mentionnait des résistances à l'intérieur du S.E.D. ; beaucoup de jeunes gens venus au parti depuis la guerre avaient pris l'habitude d'accepter sans discussion les dogmes et déclaraient : « J'ai été nourri de Staline et je crois en lui. » À la IIIe conférence du parti, du 14 au 30 mars 1956, Ulbricht présenta certes les objectifs du IIe plan quinquennal, mais on y discuta aussi du culte de la personnalité et de la coexistence pacifique. En conclusion, la conférence approuvait les résolutions du XXe congrès de Moscou et se prononçait pour un « élargissement de la démocratie » qui donnerait aux masses organisées par les partis politiques et le Front national des responsabilités plus grandes dans l'administration. Il recommandait un respect plus strict de la « légalité socialiste ». C'était admettre qu'elle avait souffert maintes entorses durant la période précédente. De fait, successivement furent graciées ou réhabilitées les principales victimes du raidissement stalinien du printemps de 1953 : Fechner, Dahlem, Ackermann entre autres.

Les discussions à l'intérieur du parti furent fort vives ; dès le 21 avril, le Politbüro était obligé de mettre en garde les membres du S.E.D. contre un « anarchisme » particulièrement sensible chez les étudiants qui étaient allés jusqu'à préconiser l'élection directe des dirigeants par la base, au lieu des élections par échelons, traditionnelles dans le parti. Et NeuesDeutschland, organe officiel du parti, de revenir fréquemment durant le printemps et l'été de 1956 sur la nécessité de maintenir le « centralisme démocratique », c'est-à-dire l'application par les instances inférieures des décisions des instances supérieures.

Déstalinisation dans le calme

C'est au plus fort de ces controverses que se produisirent les troubles de Pologne (juin et oct. 1956) puis le soulèvement hongrois (oct.-nov. 1956). Ils furent vivement ressentis en R.D.A. sans toutefois provoquer de manifestations graves. Seuls les étudiants s'agitèrent, en particulier ceux de la faculté de médecine et d'art vétérinaire de Berlin, et des écoles supérieures de Dresde : les Allemands hostiles au régime savaient depuis juin 1953 qu'il était illusoire d'attendre l'arrivée des chars américains. Une surveillance policière accrue et quelques arrestations suffirent à maintenir le calme dans une population à laquelle le S.E.D. expliqua que l'exemple polonais n'était pas applicable à la R.D.A., que chaque démocratie populaire avait son développement propre, que dès juin 1953 la direction du parti avait corrigé les erreurs de la période précédente et que la condamnation du culte de la personnalité ne pouvait la viser ; qu'enfin il fallait rester vigilant, vu la situation particulière de l'Allemagne, et que seule la collaboration étroite avec[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut national des langues et civilisations orientales
  • : professeur d'université, docteur d'État, directrice de l'Institut d'études germaniques, université François-Rabelais, Tours

Classification

Pour citer cet article

Georges CASTELLAN et Rita THALMANN. ALLEMAGNE (Politique et économie depuis 1949) - République démocratique allemande [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Churchill et Roosevelt lors de la conférence de Casablanca, 1943 - crédits : Fox Photos/ Hulton Archive/ Getty Images

Churchill et Roosevelt lors de la conférence de Casablanca, 1943

Blocus de Berlin, 1948 - crédits : National Archives

Blocus de Berlin, 1948

Soulèvement ouvrier à Berlin-Est (juin 1953) - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Soulèvement ouvrier à Berlin-Est (juin 1953)

Autres références

  • ALLEMAGNE - Les institutions

    • Écrit par Stéphane SCHOTT
    • 4 249 mots

    Les institutions de la république fédérale d’Allemagne sont définies par la Loi fondamentale (L.F.), ou Grundgesetz, du 23 mai 1949. Pensé à l’origine comme une Constitution provisoire pour l’Allemagne de l’Ouest, le Grundgesetz s’applique à toute l’Allemagne depuis le 3 octobre 1990....

Voir aussi