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DIEU L'affirmation de Dieu

Le mot « Dieu » désigne la réalité mystérieuse que les hommes cherchent à tâtons depuis les origines. L'histoire des religions peut permettre de repérer les conditions concrètes qui ont favorisé cette fonction théogénique dont l'origine renvoie à l'homme lui-même et à son énigme.

On doit cependant reconnaître que la dialectique de l'idée de Dieu telle qu'elle se déploie dans la plupart des religions est profondément différente de la dialectique de l'idée de Dieu dans les diverses philosophies. Quoi qu'il en soit du polythéisme ou du monothéisme, l'homme, pour apaiser son besoin religieux, réclame un Dieu qui soit un Toi et avec lequel il puisse entrer en échange d'amour. La raison philosophique, au contraire, répugne à concevoir Dieu comme un Toi, parce que Dieu doit être absolu, donc sans besoin et sans contraires. Il peut être conçu comme le Bien que tous les hommes désirent, mais il ne peut être lui-même un Toi personnel, qui appelle et aime d'autres personnes.

Or, avec la révélation du Dieu d'Israël, ces deux aspects de l'idée de Dieu tendent à se réduire à l'unité. Le Dieu d'Israël s'est choisi librement un peuple pour partenaire (Deut., xii, 6). Il n'y a pas d'autre motif de l'élection divine que l'amour gratuit (Deut., vii, 7), auquel Israël ne peut répondre que par un amour sans réserve (Deut., vi, 5). Mais, en même temps, le Dieu d'Israël est le Dieu tout-puissant et créateur qui aime tous les êtres. Il est déjà l'Être absolu, transcendant et immanent que conçoit la pensée philosophique.

À cause de son influence décisive sur ce qu'on appelle la civilisation occidentale, on se limitera ici au Dieu de la révélation judéo-chrétienne. Dans l'Ancien Testament, le Dieu d'Israël n'est pas d'abord le Dieu cosmique, auteur de la nature, mais un Dieu agissant, qui intervient dans l'histoire de son peuple pour qu'elle soit histoire du salut, c'est-à-dire à la fois manifestation et accomplissement de son dessein de salut. Dieu est le « trois fois saint », mais il ne révèle son mystère inaccessible qu'à l'occasion de son action pour l'homme : il est le Dieu tourné vers-nous, le Dieu proche. Ce mouvement de communication qui s'origine en Dieu même ne trouvera son aboutissement plénier et définitif que dans le Nouveau Testament où Dieu se révèle en Jésus-Christ comme amour et comme père.

Dans la pensée théologique chrétienne, une réflexion sur Dieu se confond nécessairement avec une étude historique et systématique du dogme de la Trinité. Mais il est intéressant de voir comment la conscience vivante de l'Église a repris sans cesse sa quête intelligible du mystère de Dieu à partir des matériaux nouveaux que la culture philosophique d'une époque lui fournissait. À cet égard, l'histoire de l'approche du mystère de Dieu est inséparable de celle des conceptions de l'être. Deux cas historiques sont exemplaires : la théologie négative des Pères grecs et la théologie des noms divins de Thomas d'Aquin.

Le problème de Dieu s'est posé en termes nouveaux dans le contexte de la « mort de la métaphysique » et de la « mort culturelle » de Dieu. Il fallait parler d'une « crise » du langage religieux. Mais l'étude de la genèse historique de cette crise est extrêmement instructive. La mort du Dieu-concept dans la philosophie contemporaine ne se préparait-elle pas déjà quand la pensée chrétienne assumait la philosophie grecque et sa conception onto-théo-logique de l'être ? La crise métaphysique du discours sur Dieu a invité en tout cas le théologien chrétien à prendre plus résolument la liberté de dire ce qui lui est confié dans la révélation.

Aux origines de l'idée de Dieu

Dans la mesure même où[...]

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Pour citer cet article

Claude GEFFRÉ. DIEU - L'affirmation de Dieu [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABSOLU

    • Écrit par Claude BRUAIRE
    • 4 222 mots
    2. Puisque l'athéisme ne fait que prendre acte, résolument, de la proposition conclusive de la théologie négative : « Dieu est rien », il présuppose la même conception négative de l'absolu. Mais il en est de même si l'on considère l'athéisme indifférent d'un scientisme qui complète la « mort...
  • ACTE, philosophie

    • Écrit par Paul GILBERT
    • 1 282 mots
    ...l'ouverture de l'action qu'anime une attente correspond un acte qui comble le manque ; l'espoir de l'acte anime l'attente et dessine la fin de l'action. La tradition aristotélicienne parle cependant d'un acte pur, qui serait Dieu. Or on ne peut pas penser que, par exemple pour Thomas d'Aquin...
  • AGAPÈ

    • Écrit par Henry DUMÉRY
    • 1 102 mots

    Le mot grec agapè signifie affection, amour, tendresse, dévouement. Son équivalent latin est caritas, que nous traduisons par « charité » (dans les textes stoïciens comme dans les textes chrétiens). Généralement, la langue profane emploie agapè pour désigner un amour de parenté ou d'amitié,...

  • ÂGE DE LA TERRE

    • Écrit par Pascal RICHET
    • 5 143 mots
    • 5 médias
    Ce fut au milieu du iie siècle que la question du type de création prit une grande importance dans le cadre de polémiques avec les sectes gnostiques. Celles-ci avaient en effet soulevé un sérieux problème théologique : si toute chose avait une origine divine, comment le Dieu bon des Écritures...
  • Afficher les 129 références

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