QUINE WILLARD VAN ORMAN (1908-2000)
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Né à Akron (Ohio, États-Unis) en 1908, Willard Van Orman Quine, qui est réputé être « le plus grand philosophe américain contemporain », a d'abord reçu une formation de mathématicien et a préparé sa thèse de doctorat sous la direction de A. N. Whitehead. Il a régulièrement contribué au Journal of Symbolic Logic. Sa vocation philosophique s'est éveillée à la lecture enthousiaste des Principia mathematica de Bertrand Russell, et il restera fidèle au conseil que donne le logicien britannique : préférer « les résultats partiels véritables aux grandes généralisations inspirées par la seule imagination ». Professeur à l'université Harvard depuis 1936, Quine a aussi enseigné à Oxford, au Collège de France, à Tōkyō et à São Paulo. On a pu dire que « presque tout ce qui s'écrit aujourd'hui dans les pays d'expression anglaise s'écrit pour ou contre Quine » (F. Jacques). Ce disciple de Frege, de Russell et de Carnap est aussi le plus « européen » ou le plus français des philosophes américains : il s'est présenté lui-même comme un admirateur de Louis Couturat, d'Henri Poincaré, de Pierre Duhem, de Jacques Herbrand. Joignant à la rigueur de la pensée un style vigoureux et dru dans la polémique, il s'est efforcé de réfuter un certain nombre de thèses de l'empirisme logique, du néo-positivisme et de la phénoménologie. Ses constructions originales assurent à la philosophie une continuité précaire mais indispensable avec les sciences ; elles restaurent l'ontologie comme discipline crédible et ont une portée indéniable sur les concepts majeurs de la linguistique, de la physique et des mathématiques.
Une certaine idée de la philosophie
La philosophie n'a, pour Quine, ni objet propre à explorer, ni méthode autonome, ni sources spécifiques, ni point de vue privilégié ; elle n'a aucune capacité particulière à assurer quelque fondement que ce soit, ni aucune affinité spéciale pour les questions qui sont encore irrésolues ou qui sont réputées devoir provisoirement échapper à l'examen scientifique. Elle est une affaire sérieuse qui, avec son degré de maturité, constitue « une partie intégrante de la science », tant par ses méthodes que par ses intérêts et ses contenus. « La tâche, écrit Quine à ce propos dans Word and Object, est de rendre explicite ce qui a été laissé tacite et de rendre précis ce qui a été laissé vague ; la tâche est d'exposer et de résoudre les paradoxes, de raboter les aspérités, de faire disparaître les vestiges des périodes transitoires de croissance, de nettoyer les bidonvilles ontologiques. » Le philosophe travaille ainsi à simplifier et clarifier le cadre conceptuel qui est commun à toutes les sciences. Les questions qui alimentent sa réflexion sont plus générales que celles des savants, mais elles sont en parfaite continuité avec ces dernières et gardent avec elles une solidarité totale ; de même, les réponses qu'on peut leur apporter sont soumises aux mêmes exigences de précision et de sobriété. C'est, pour Quine, dans le domaine de l'ontologie que cette continuité est le plus clairement perceptible.
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Écrit par :
- Françoise ARMENGAUD : agrégée de l'Université, docteur en philosophie, maître de conférences à l'université de Rennes
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Pour citer l’article
Françoise ARMENGAUD, « QUINE WILLARD VAN ORMAN (1908-2000) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 12 août 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/willard-van-quine/