Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

BURTON TIM (1958- )

Tim Burton - crédits : Vera Anderson/ WireImage

Tim Burton

Enfant prodige de Hollywood, Tim Burton, né en 1958 à Burbank, en Californie, remporte dès son premier film, Pee-Wee (1985), un énorme succès. Les œuvres qui suivent le placent rapidement à la tête de productions d'envergure (Batman, 1989 ; Batman Returns, 1992), comme un digne héritier de Steven Spielberg et de George Lucas. Mais les prouesses de Tim Burton sont celles d'un enfant terrible qui a mis son sens inné du féerique et du spectaculaire au service de rêveries très personnelles, et plutôt sombres. Ses pères d'élection appartiennent au cinéma fantastique de série B (l'acteurVincent Price et le réalisateur Roger Corman, qui firent équipe pour six films adaptés d'Edgar Poe) et même de série Z (le cinéaste Ed Wood, à qui Tim Burton rendit hommage en 1994 dans un film qui retrace sa vie et porte son nom). À l'instar de tous ses personnages, promis par leur caractère exceptionnel à un isolement sans partage, Tim Burton doit affronter la solitude à laquelle le renvoie tout ce qu'il a d'unique dans le cinéma américain.

Un cinéma à contre-courant

Ses débuts aux studios Disney, comme dessinateur et animateur (notamment sur Rox et Rouky), ont sans doute aidé Tim Burton à définir très vite son projet : une vive contre-proposition formulée à l'endroit d'un univers où le merveilleux et les délices enfantines sont frappés du sceau d'une terrible gentillesse, d'une gaieté insipide. Rien de tel dans le film d'animation L'Étrange Noël de M. Jack (1993), réalisé par Henry Selick mais pleinement attribuable à Tim Burton (producteur, auteur du sujet et des dessins originaux), une comédie musicale qui, sur la musique endiablée de Danny Elfman (fidèle collaborateur de Tim Burton), fait surgir un monde de joyeux morts-vivants, conduits par un squelette romantique qui prend la place du Père Noël. Un humour macabre que Beetlejuice (1988) avait déjà associé à une fête visuelle qui mêlait alors kitsch parodique et hommage au peintre Marc Chagall avec une grande élégance graphique, élargie aux corps de chair travaillés aussi librement que des dessins animés.

Le don d'imagier de Tim Burton, dont tous les films sont d'abord de splendides livres d'images, s'appuie en vérité sur un tempérament d'iconoclaste – une des plus belles scènes de Batman (1989) est la visite du captivant Joker dans un musée où il barbouille de couleurs vives les œuvres des maîtres de la peinture, en une sorte de show contre l'art officiel. Au carnaval dantesque que le cinéaste oppose au mythe Disney répondra la bouffonnerie de Mars Attacks ! (1996), parfait contretype d'un film de science-fiction ostentatoire et standard (Independence Day), et véritable entreprise de démolition de l'Amérique et de ses rêves non moins standardisés. L'ironie est d'abord dans la forme : tourné avec des moyens considérables, Mars Attacks ! détourne le culte de l'illusion programmée sur ordinateur en images de synthèse et utilise les effets spéciaux comme des enfantillages, des jouets bricolés qui ont le charme d'un artisanat luxueux de la fantaisie. C'est l'esprit d'Ed Wood qui traverse ce film, la croyance naïve de ce cinéaste, réputé „le plus mauvais du monde“, en la force de fictions et d'images fantastiques rudimentaires. Mais, dans Ed Wood (1994), Tim Burton ne salue pas seulement cette forme particulière de poésie. Il dit aussi sa fascination pour un artiste voué à l'échec, relégué au dialogue avec ses fantasmagories et ses démons intérieurs, en même temps qu'il exprime sa volonté de l'arracher à son purgatoire.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Frédéric STRAUSS. BURTON TIM (1958- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Tim Burton - crédits : Vera Anderson/ WireImage

Tim Burton

<em>Sleepy Hollow, la légende du cavalier sans tête</em>, T. Burton. - crédits : Paramount/Mandalay/The Kobal Collection/ Clive Coote/ Aurimages

Sleepy Hollow, la légende du cavalier sans tête, T. Burton.

Autres références

  • ALICE AU PAYS DES MERVEILLES (T. Burton)

    • Écrit par Christian VIVIANI
    • 940 mots

    Depuis ses premiers courts-métrages, Vincent (1982) et Frankenweenie (1984), les personnages de Tim Burton hésitent presque toujours entre l'enfance et l'âge adulte ; jusqu'à présent, seul Sweeney Todd (2007), où le cinéaste nous livre sa part obscure, apparaît fermement campé dans...

  • CHARLIE ET LA CHOCOLATERIE et LES NOCES FUNÈBRES (T. Burton)

    • Écrit par Raphaël BASSAN
    • 1 076 mots

    Éloignés par le matériau utilisé (la mise en scène traditionnelle d'une part, l'animation de volumes de l'autre) et le propos (apologue cruel sur la société de consommation contemporaine versus conte macabre gothique). Charlie et la chocolaterie (2005) et Les Noces funèbres (2005)...

  • SLEEPY HOLLOW (T. Burton)

    • Écrit par Frédéric STRAUSS
    • 1 098 mots
    • 1 média

    Des gouttes de cire rouge sang scellent un testament secret... Une diligence fend la nuit, conduite par un cocher dont la tête vient d'être tranchée... Les premières scènes de Sleepy Hollow (1999) semblent sorties d'un musée de l'imagerie fantastique envahi par la poussière. Pourtant...

  • SWEENEY TODD, LE DIABOLIQUE BARBIER DE FLEET STREET (T. Burton)

    • Écrit par Marc CERISUELO
    • 898 mots

    À l'exception des amateurs éclairés – au premier rang desquels se place Alain Resnais –, l'œuvre de Stephen Sondheim est encore trop méconnue en France, et il y a malheureusement fort à parier qu'elle demeurera dans l'ombre tant la tradition du musical est éloignée...

  • CINÉMA (Cinémas parallèles) - Le cinéma d'animation

    • Écrit par Bernard GÉNIN, André MARTIN
    • 17 657 mots
    • 6 médias
    ...studios Disney maintiennent la cadence d'un film par an, pariant avec bonheur sur les nouvelles techniques grâce à une association avec John Lasseter. Ils misent également sur un ancien animateur devenu une star d'Hollywood – Tim Burton, l'auteur de Batman (1989) – dont Disney produit un...
  • COMÉDIE AMÉRICAINE, cinéma

    • Écrit par Joël MAGNY
    • 5 126 mots
    • 18 médias
    ...est rarement l'unique structure du projet. Surtout, elle contamine sans cesse des genres hétérogènes par son esprit plus perturbateur que caustique. Batman (1989), de Tim Burton, est-il un film d'aventures, de science-fiction, ou une comédie burlesque, vers quoi le personnage de Joker, interprété...
  • DEPP JOHNNY (1963- )

    • Écrit par Universalis
    • 640 mots

    Acteur américain né le 9 juin 1963 à Owensboro (Kentucky).

    Johnny Depp (de son vrai nom John Christopher Depp II) abandonne l'école à l'âge de seize ans pour se lancer dans une carrière musicale. Avec son groupe The Kids, il quitte la Floride, où il a passé la plus grande partie de son enfance, pour...

  • GONZÁLEZ IÑÁRRITU ALEJANDRO (1963- )

    • Écrit par Christian VIVIANI
    • 1 085 mots
    • 1 média
    ...acteur lui-même déchu – le Birdman qu’il incarnait jadis dans la fiction se superposant au Batman que Keaton a par deux fois été sous la direction de Tim Burton. Par là même, il regagne une place prépondérante parmi les acteurs hollywoodiens. The Revenant (2015, oscar du meilleur réalisateur en 2016)...

Voir aussi