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CORMAN ROGER (1926- )

Le nom de Roger Corman est surtout lié au cinéma fantastique américain qu'il renouvelle, entre 1960 et 1964, avec ses films inspirés des textes d'Edgar Allan Poe. Toutefois, il est bien plus que cela. En tant que producteur, réalisateur, distributeur et révélateur de talents, il donna à la série B à petit budget ses lettres de noblesse et une certaine légitimité. Grand styliste lui-même – c'était sa manière de résoudre par des audaces formelles son manque d'argent –, il créa autour de l'A.I.P. (American International Pictures), dont il fut un collaborateur zélé, puis de sa propre maison de production, New World Pictures (fondée en 1970), de véritables zones expérimentales de création où tous les genres, du western au thriller, étaient abordés, critiqués et renouvelés. Il mit ainsi le pied à l'étrier à de très nombreux techniciens, acteurs ou réalisateurs qui n'auraient pu débuter directement dans les grands studios. Le cinéaste-producteur s'est toujours voulu un libéral, voire un homme de gauche, comme en témoigne son audacieux The Intruder (1961), un film contre la ségrégation raciale. Corman a réalisé ou produit, en cinquante ans, plus de cinq cents films.

Roger Corman est né à Detroit en 1926. Bien qu'intéressé par les comic books, le cinéma et l'œuvre de Poe, il va suivre des études d'ingénieur comme son père. Après le service militaire, il devient garçon de courses à la Fox, lecteur de scripts, avant de vendre, en 1953, son premier scénario, Highway Dragnet (le long-métrage sera dirigé par Nathan Juran). Il rencontre alors James H. Nicholson et Sam Arkoff, qui viennent de fonder l'A.I.P. (American International Pictures), une compagnie indépendante destinée à promouvoir, avec des moyens réduits, le cinéma de genre. Corman y devient le réalisateur et le producteur vedette. Il réalise en 1955 son premier film, Five Guns West (Cinq fusils à l'Ouest), puis Apache Woman, deux westerns où l'on sent déjà le style nerveux de l'auteur. Dans son quatrième film, The Day the World Ended, qui marque sa première incursion dans la science-fiction, Corman introduit un de ses thèmes récurrents : la destruction du statu quo social à la suite d'une explosion atomique. Dans la plupart de ses films, le réalisateur développe un discours critique sur le comportement et la façon d'agir de ses compatriotes. Dans It Conquered the World (1956), un individu ambitieux aide un extraterrestre à soumettre les hommes à sa volonté. Critique à peine voilée du maccarthysme, qui montre bien la responsabilité du Terrien – en opposition aux films anti-communistes d'alors, où l'humanité subit les envahisseurs en toute innocence –, It Conquered the World est le premier film de Corman à attirer l'attention.

Dès lors, le cinéaste va tourner jusqu'à une dizaine de films par an. Dans cette production pléthorique, de petites trouvailles se détachent : Attack of the Crab Monsters (1956), She-Gods of Shark Reef (1956), The Viking Woman and the Sea Serpent (1957). L'auteur renouvelle le film de vampires avec Not of this Earth (1956), où la créature maléfique est cette fois un individu ordinaire qui se promène avec une valise bourrée de seringues. The Undead (1956), bien que tourné en noir et blanc, marque la première incursion de Corman dans le cinéma gothique.

L'apparition du rock and roll, à partir de 1955, change le paysage social de l'Amérique. En homme avisé, qui sait toujours d'où vient le vent, Corman tourne quelques films sur les jeunes, dont le réussi et cruel Teenage Doll (1957) et le troublant Sorority Girl (1959). Dans Teenage Caveman (1958), un adolescent transcende les lois d'une tribu – les survivants d'un holocauste atomique – et traverse la rivière interdite pour apporter la vérité. Corman dévoile ici sa philosophie[...]

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Pour citer cet article

Raphaël BASSAN. CORMAN ROGER (1926- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DANTE JOE (1946- )

    • Écrit par Raphaël BASSAN
    • 1 110 mots

    Joe Dante est né en 1946 à Middleton (New Jersey). Cinéaste singulier, amateur dès l'enfance d'illustrés horrifiques et de films de série B, il promeut, après un passage par le fantastique « traditionnel » (The Howling [Hurlements], 1981), une thématique inédite, où coexistent...

  • DEMME JONATHAN (1944-2017)

    • Écrit par Universalis
    • 626 mots

    Le réalisateur américain Jonathan Demme s’est distingué par le caractère éclectique de son œuvre, qui comprend aussi bien des fictions que des concerts filmés ou des documentaires.

    Robert Jonathan Demme naît le 22 février 1944 à Baldwin, dans l’État de New York. Dans les années 1960, il rédige...

  • FANTASTIQUE

    • Écrit par Roger CAILLOIS, Éric DUFOUR, Jean-Claude ROMER
    • 21 027 mots
    • 17 médias
    ...l'A.I.P. se préciser et s'accroître à une cadence accélérée le nombre (une soixantaine en moins de dix ans !) des films produits et réalisés par le jeune Roger Corman (né en 1926) lequel s'affirmait bientôt comme l'illustrateur attitré des œuvres d'Edgar Poe, avec pour interprète principal le subtil Vincent...
  • GOTHIQUE LITTÉRATURE & CINÉMA

    • Écrit par Gilles MENEGALDO
    • 6 313 mots
    • 5 médias
    En même temps que les films Hammer, un courant gothique se développe aux États-Unis, en marge des grands studios, avec entre autres les films de Roger Corman produits par American International Pictures. Un cycle de huit films est consacré à Edgard Poe, inauguré par House of Usher (1960), où l’on...

Voir aussi