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THAÏ

Les populations thai appartiennent à un groupe ethnique dispersé, mais très étendu et nombreux. Leur implantation va du sud de la Chine à l'est de l'Inde. Leurs langues forment l'une des cinq familles linguistiques d'Extrême-Orient (thai, miao-yao, austronésien, austro-asiatique, sino-tibétain). Deux de ces populations ont constitué les États de Thaïlande et du Laos. La Chine populaire a accordé l'autonomie à la région du Houang-si (Guangxi), de majorité Zhuang. Les autres sont de plus petites unités de montagnards, disséminées dans les hautes régions de Chine méridionale, du nord du Vietnam, du Laos, de la Thaïlande, de la Birmanie et de l'Assam, où elles font partout figure de minorités. Non seulement elles parlent des langues de même origine, mais elles possèdent nombre de traits culturels reconnaissables, et leur organisation sociale ne semble pas présenter des variantes très importantes.

Position historique

La question thai se pose sous l'angle ethnique et linguistique, mais plus fortement encore sur le plan historique : en effet, l'apparition des populations thai organisées en chefferies puissantes dans les pays du Sud-Est asiatique à partir du xiiie siècle de l'ère chrétienne a modifié l'évolution de toute l'Asie méridionale.

Pendant les siècles où l'expansion indienne avait atteint, par voie maritime et terrestre, les anciens territoires de la Birmanie et de l'actuelle Thaïlande, alors peuplés de Môn, ceux du Fou-nan (Funan) et du Cambodge, peuplés de Khmers, et celui du Champa ou côte d'Annam, occupé par les Cham, il n'était guère question des groupes thai. Du vie à la fin du xiie siècle, les peuples qui jouèrent les premiers rôles dans cette partie du monde furent, soit des Môn-Khmers, soit des Indonésiens ou Malayo-Polynésiens.

Il existait à coup sûr, ici et là, des groupes isolés déjà « descendus » des confins septentrionaux de la péninsule indochinoise et de la Chine du Sud. Ceux que l'on a désignés sous le vocable de Syem ou Syâm se trouvaient sans doute installés dans la moyenne vallée du Ménam, au pays qui prit par la suite le nom de Siam, au xie siècle et peut-être beaucoup plus tôt. De même, les Shan de la haute Birmanie, avant de participer à l'histoire birmane en prenant en quelque sorte la relève de la prestigieuse Pagan, formaient des communautés actives bien avant que les textes ne fassent état de leurs conquêtes.

Quoi qu'il en soit, c'est au xiiie siècle, et plus particulièrement dans le dernier tiers, que l'on situe traditionnellement une arrivée plus massive des Thai dans les hautes vallées de l'Irrawadi, de la Salouen, du Ménam et du Mékong, autrement dit de la Birmanie au Laos.

Établis au Yunnan au viiie siècle, où l'on a longtemps cru qu'ils avaient fondé le royaume de Nan-tchao (Nanzhao) dont ils auraient été les souverains, ils eurent probablement à subir là des pressions politiques et économiques, notamment du fait de l'arrivée des Mongols qui prirent le Yunnan et sa capitale en 1253-1257. Les Thai entreprirent alors une série d'infiltrations vers le sud par les vallées des fleuves et rivières.

Il serait sans doute abusif de parler d'« invasion » à propos de cette pénétration, éparse et diffuse. Les dates traditionnelles de l'établissement des premiers royaumes thai font remonter à 1215 la fondation de Mogaung au nord de Bhamo en haute Birmanie, à 1223 celle du Muong Nai, à 1229 la conquête de l'Assam, où fut alors parlée une langue thai, l'ahom, aujourd'hui disparue. Approximativement à la même époque, les Thai Lao, qui devinrent les Laotiens, commencèrent leur marche vers Luang Prabang : la légende en a fait une épopée mythologique, la descente du Ciel sur la Terre, du héros Khun Borom. Et c'est seulement au xive siècle[...]

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Écrit par

  • : membre de l'École française d'Extrême-Orient
  • : chargée du département Asie au musée de l'Homme, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)

Classification

Pour citer cet article

Guy MORÉCHAND et Solange THIERRY. THAÏ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

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Bonzes

Autres références

  • ASIE (Géographie humaine et régionale) - Dynamiques régionales

    • Écrit par Manuelle FRANCK, Bernard HOURCADE, Georges MUTIN, Philippe PELLETIER, Jean-Luc RACINE
    • 24 799 mots
    • 10 médias
    ...Mékong au Vietnam ont été autant de couloirs fluviaux ou littoraux qui ont permis la progression vers le sud, depuis la Chine méridionale, des Birmans, des Thaï, des Lao et des Vietnamiens, surtout à partir du xe siècle. Cette disposition physique n'offre pas à l'Asie du Sud-Est continentale de vastes bassins...
  • ASIE DU SUD-EST (art et archéologie) - Les grands empires

    • Écrit par Bernard Philippe GROSLIER
    • 4 138 mots
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    ...fouilles est venue récemment renouveler notre connaissance des origines du Vietnam, celle-ci n'a guère progressé pour la période historique. On peut en dire autant des débuts des royaumes môns de Birmanie et de la Thaïlande maritime, tout aussi bien que des États pyus etthaïs de ces hautes régions.
  • BIRMANIE (MYANMAR)

    • Écrit par Denise BERNOT, Pierre-Arnaud CHOUVY, Renaud EGRETEAU, Universalis, Bernard Philippe GROSLIER, Jean PERRIN
    • 31 961 mots
    • 18 médias
    ...celle du Nantchao en 1253, laisse libre cours à toutes les forces centrifuges. Un élément nouveau apparaît dans la grande plaine de Birmanie : les Shan. Ceux-ci sont des Thaï ou Shan selon la dénomination birmane. Le mot est identique à celui de Syam, qui apparaît pour la première fois dans des inscriptions...
  • CAMBODGE

    • Écrit par Philippe DEVILLERS, Universalis, Manuelle FRANCK, Christian LECHERVY, Solange THIERRY
    • 25 909 mots
    • 24 médias
    ...extérieurs nouveaux. Menacé d'invasion par Kubilai khan, l'empereur mongol de Chine, il jugea prudent de lui offrir un tribut (1285). D'autre part, un royaume thaï s'était constitué en 1238, à Sukhothai. D'abord vassal du roi khmer, il manifesta bientôt son intention de conquérir sa totale indépendance et de...
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Voir aussi