- 1. Les modes de notre connaissance
- 2. Les substructures
- 3. Les creusets géographiques
- 4. L'ossature de nos connaissances
- 5. Opacité des apparences et structures profondes
- 6. La maîtrise du milieu, base du pouvoir
- 7. La cité hydraulique
- 8. Les empires maritimes
- 9. Les empires des rizières
- 10. Permanence, récurrences et destins des pouvoirs
- 11. Bibliographie
ASIE DU SUD-EST (art et archéologie) Les grands empires
Comme entraînées par leur vitalité, l'Inde et la Chine, vers les débuts de notre ère, débordèrent leurs frontières naturelles et civilisèrent les deltas et les îles d'Indochine et d'Indonésie, venant finalement à la rencontre l'une de l'autre, comme elles le firent – presque au même moment – en Asie centrale. Cette expansion, dont elles n'eurent pas même conscience ! et qui fut de peu d'importance pour elles, constitue l'un des temps forts de l'histoire. La Chine conquit et façonna à son image. L'Inde rayonna, essentiellement par ses missionnaires et par ses marchands. Dans les deux cas, un système cohérent du monde fondé sur une religion universelle – hindouisme ou bouddhisme ici, taoïsme là –, formalisé par un réseau complet de savoirs et de techniques, exprimé en une grande langue de civilisation – sanskrit ou chinois –, fut enseigné puis adopté. Ainsi fut ensemencé ce qui devait devenir le Vietnam et les États indianisés. Nous considérerons ici leurs développements ultimes, lorsqu'ils aboutirent au stade de royaumes centralisés et dominateurs : empires de Śrīvijaya et des Śailendra à Sumatra et Java, royaume du Champa ( dans l'actuel Vietnam), empires d' Angkor au Cambodge et de Pagan en Birmanie, enfin royaumes thaïs et empire vietnamien.
Les modes de notre connaissance
Dégager des traits pertinents impose, d'abord, un bilan critique de notre savoir. L'histoire de l'Asie du Sud-Est compte à peine un siècle. Certes, elle a obtenu des résultats considérables : des civilisations aussi fascinantes que celles d'Angkor ou de Borobuḍur, inconnues même de nom d'un Michelet, sont devenues de banals produits de tourisme... Notre connaissance est encore modeste du fait de cette jeunesse, de l'immensité du champ, du petit nombre de chercheurs. Si du temps des empires coloniaux quelques institutions et leurs chercheurs se consacraient systématiquement à cette recherche, depuis les années cinquante ces équipes tendent à diminuer sans que les érudits locaux aient partout pris la relève, qui doivent d'abord faire face à des tâches d'enseignement, quand ils ne sont pas bridés par les nationalismes. Obstacles d'autant plus regrettables que cette partie du monde, véritable creuset de l'histoire, devrait être le champ de recherches intensives, archéologiques notamment, car peu de terrains sont aussi prometteurs et significatifs.
Par ailleurs, les premiers orientalistes étaient indianistes ou sinologues. C'est à travers les inscriptions en sanskrit, les histoires chinoises qu'ils posèrent les bases de notre connaissance, de même qu'ils reconnurent aisément sivaïsme, bouddhisme ou taoïsme dans les traductions indigènes de leurs canons, les temples et les images partout dressés. Cette approche permit, très rapidement, de tisser la trame historique puis de rédiger des manuels, qui nous servent toujours. Mais il en est également résulté qu'on a trop souvent considéré les pays de la diaspora comme de simples « colonies culturelles », d'un intérêt moindre que leurs matrices. Comme d'autre part l'Inde, la Chine fascinent – et à juste titre –, les rares Occidentaux voués à ces études s'y consacrent en priorité, laissant bien peu de bonnes volontés pour l'Asie du Sud-Est. Il convient, de toute façon, de corriger ces premières approches, et aux termes mêmes qu'elles présupposaient. Grâce aux progrès des études, on commence à mieux connaître l'Inde des Gupta et la Chine, des Han aux Tang, qui furent plus spécifiquement les modèles de l'Asie sud-orientale et qui diffèrent fortement de l'image qu'on se faisait, jadis, de ces pays.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Bernard Philippe GROSLIER : directeur de recherche au C.N.R.S.
Classification
Médias
Autres références
-
INDE (Arts et culture) - L'expansion de l'art indien
- Écrit par Bernard Philippe GROSLIER
- 5 214 mots
- 6 médias
Nul océan ne mérite mieux son nom que l'océan Indien. Non seulement l'Inde y enfonce son formidable soc mais, de plus, sa civilisation en a parcouru toutes les eaux et en a modelé les rivages orientaux à son image. Par son amplitude géographique et son poids sur le cours des peuples, l'expansion indienne...
-
ANGKOR
- Écrit par Bruno DAGENS , Claude JACQUES et Albert LE BONHEUR
- 4 572 mots
- 12 médias
L' occupation de la région d'Angkor remonte au moins au Ier millénaire avant notre ère (connue par les fouilles de B.-P. Groslier) mais les premiers monuments ne datent que du viie siècle de notre ère ; ils se trouvent à l'ouest sur le Stung Puok. Le viiie siècle est marqué...
-
AYUTHYA
- Écrit par Jean BOISSELIER
- 426 mots
- 2 médias
La ville d'Ayuthya, fondée en 1350 par le prince d'U Thong dans une île formée par le Ménam et ses affluents à cinquante kilomètres au sud de Lopburi, sera, durant quatre cent dix-sept ans, la capitale du Siam. Ayuthya se veut l'héritière de Dvāravatī, de la puissance d'...
-
BIRMANIE (MYANMAR)
- Écrit par Denise BERNOT , Pierre-Arnaud CHOUVY , Renaud EGRETEAU , Encyclopædia Universalis , Bernard Philippe GROSLIER et Jean PERRIN
- 31 970 mots
- 18 médias
Le pays abonde en sites archéologiques inexplorés ou fouillés de façon partielle. -
GROSLIER BERNARD PHILIPPE (1926-1986)
- Écrit par Denys LOMBARD
- 975 mots
- 1 média
Le nom de Bernard Philippe Groslier, né le 10 mai 1926 à Phnom Penh, restera à jamais lié à celui du Cambodge, où il vécut de longues années et à l'histoire duquel il a consacré ses plus belles études. Son père, George Groslier, né en 1887, avait été l'un des « khmérisants » les plus sensibles...
- Afficher les 14 références