Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

HENRY PIERRE (1927-2017)

Pierre Henry - crédits : Raphael Gaillarde/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Pierre Henry

« Le musicien et compositeur Pierre Henry aimait travailler en solitaire, uniquement à partir de sons qu'il manipulait, à de grandes œuvres inscrites sur la bande magnétique. Pour lui, au commencement était le son et non la note : : « Les notes, ce n'est rien, pour moi, cela ne représente rien, c'est bête, les notes, c'est bon pour les compositeurs. » On proclamait que les auteurs de musique concrète n’étaient pas des compositeurs ; et voilà que Pierre Henry semblait ratifier cette opinion. Alors, « faiseur de sons » ou compositeur ? Quoi qu'il en soit, Pierre Henry a profondément marqué la création musicale.

Pierre Henry, né le 9 décembre 1927 à Paris, passe son enfance dans une maison en lisière de la forêt de Sénart, où il reçoit ses premières impressions sonores, déterminantes : les bruits de la nature, les trains qui passent. En 1937, le jeune garçon entre au Conservatoire de Paris, où il va étudier avec Nadia Boulanger (piano), Félix Passerone (percussion) et Olivier Messiaen (harmonie et composition). À partir de 1945, c'est comme pianiste et, surtout, comme percussionniste qu'il commence sa carrière. Sa prédilection pour la percussion manifeste son goût pour le son brut.

Ses premières compositions sont des partitions de musique de chambre, qu'il n'a fait ni éditer ni jouer, mais dont certaines apparaîtront sous la forme d'enregistrement dans ses musiques concrètes. Sa Sonatine pour piano préparé intégrée dans la suite concrète du Microphone bien tempéré est probablement représentative de ce style indéfini, composite. Tentative plus originale, les 52 Dimanches noirs, suite de petites pièces pour piano, ont été écrites entre 1945 et 1948, au fil du temps, pendant les dimanches d'une adolescence close passés en famille : une musique liée au temps vécu, concret, sur une très longue durée, qui contient en germe son œuvre future.

Parallèlement à la composition, il recherche, avec ses percussions, des sons différents, des associations sonores qui vibrent de manière spéciale et donnent un son plus fort et dru que celui, trop pur à son goût, des instruments classiques. Le compositeur et l'inventeur de sons n'ont pourtant pas encore fait leur jonction : il leur manque les moyens techniques qui leur permettront de ne faire qu'un, c'est-à-dire ceux de la musique concrète.

Un film expérimental du peintre Fernand Léger, Le Ballet mécanique, montage d'objets en mouvements, lui inspire en 1949 une de ses premières musiques expérimentales, une pièce pour piano préparé, Le Petit Ballet mécanique, utilisant des procédés répétitifs. En 1948, il reçoit la commande d'une musique pour un documentaire, Voir l'invisible, sur les procédés de grossissement et de ralentissement par le cinéma, qui permettent d'envisager d'un œil nouveau les phénomènes naturels, un sujet qui est tout à fait en rapport avec la musique concrète et ses manipulations. Au lieu d'écrire une partition instrumentale pour la faire enregistrer ensuite, il imagine d'improviser directement devant l'image avec des percussions et des objets, en se faisant enregistrer simultanément dans un studio sur un graveur de disques souples, appareil qui fut le support des premières musiques concrètes.

1948 : c'est la rencontre décisive avec Pierre Schaeffer, fondateur du Studio d’essai au sein de la Radiodiffusion française, et dont Pierre Henry vient de découvrir, sur les ondes, les premières musiques concrètes, regroupées sous le titre de Étudesde bruits. Les deux « chercheurs en bruits » collaborent à la Symphonie pour un homme seul, révélée en 1950 à un public stupéfait. En 1951, Pierre Schaeffer fonde le Groupe de recherche de musique concrète. Pierre Henry, qui ne veut être que musicien, plie la matière sonore à son projet, réalisant [...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

Classification

Pour citer cet article

Juliette GARRIGUES. HENRY PIERRE (1927-2017) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Pierre Henry - crédits : Raphael Gaillarde/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Pierre Henry

Autres références

  • SCHAEFFER (P.) ET HENRY (P.) - (repères chronologiques)

    • Écrit par Juliette GARRIGUES
    • 384 mots

    14 août 1910 Pierre Schaeffer naît à Nancy.

    9 décembre 1927 Pierre Henry naît à Paris.

    1942 Pierre Schaeffer fonde le Studio d'essai au sein de la Radiodiffusion française.

    1948 Naissance de la musique concrète au sein du Studio d'essai, confié à Pierre Schaeffer par la Radio télévision...

  • SYMPHONIE POUR UN HOMME SEUL (P. Schaeffer et P. Henry)

    • Écrit par Juliette GARRIGUES
    • 244 mots

    Le 18 mars 1950 a lieu à Paris, dans la salle de l'École normale de musique, le premier concert de musique concrète. Pierre Schaeffer et Pierre Henry présentent l'œuvre qu'ils ont signée ensemble, la Symphonie pour un homme seul, qui marque une rupture totale avec tout ce...

  • ACOUSMATIQUE MUSIQUE

    • Écrit par François BAYLE
    • 7 820 mots
    • 4 médias
    1952. Projection spatiale par effet de champ, de Pierre Schaeffer, Pierre Henry et Jacques Poullin. Tenant en main une bobine, l'opérateur, debout sur la scène, effectuait des gestes dans un espace matérialisé par de larges cerceaux croisés. Ces gestes, agissant sur la balance des haut-parleurs, produisaient...
  • ARRANGEURS DE LA CHANSON FRANÇAISE

    • Écrit par Serge ELHAÏK
    • 7 929 mots
    • 3 médias
    ...le titre au beat visionnaire Requiem pour un con, qu’ilscoécrivent. Ensemble, ils signent également la musique de la chanson Élisa. En 1967, avec Pierre Henry, l’un des pères de la musique électroacoustique, Michel Colombier compose quatre jerks électroniques, dont Psyché Rock, destiné au ballet...
  • BÉJART MAURICE JEAN BERGER dit MAURICE (1928-2007)

    • Écrit par Bérengère ALFORT, Marie-Françoise CHRISTOUT
    • 1 474 mots
    ...envoûtante. Rien d'étonnant à cela, si l'on sait que Maurice Béjart exprime sa fascination pour la mort et la survie du phénix. Preuve en est, sa pièce phare, Symphonie pour un homme seul (sur une musique concrète de Pierre Schaeffer et Pierre Henry), en 1955. Cette œuvre est autant inspirée de la technique...
  • CONCRÈTE MUSIQUE

    • Écrit par Antoine GARRIGUES
    • 1 054 mots

    La musique concrète naît en 1948, lorsque l'ingénieur du son Pierre Schaeffer (1910-1995) fonde le Studio d'essai de la Radio-Télévision française (R.T.F). Mais plusieurs expériences ont déjà été réalisées à partir d'appareils électriques de production du son et de moyens de reproduction comme...

  • Afficher les 9 références

Voir aussi