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REQUIEM

Dans la liturgie romaine, le propre des différentes messes porte le nom des premiers mots de l'introït : la messe des funérailles s'appelle ainsi proprement « messe Requiem ». C'est à l'importance prise par cette cérémonie, en particulier pour des raisons de protocole royal ou princier, autant qu'à l'attirance du thème, à la richesse, à la beauté et à la variété des textes liturgiques, que la messe des funérailles doit d'avoir été fréquemment mise en musique.

Le propre de cette messe se compose des textes suivants :

1o Introït : Requiem aeternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis (« Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel, et que l'éternelle lumière rayonne sur eux ») ;

2o Kyrie ;

3o Graduel (semblable à l'introït) et trait : Absolve, Domine ;

4o Séquence : c'est un long poème, ajouté tardivement (xiiie siècle, attribué à saint Bonaventure, mais dont l'auteur probable est un frère mineur disciple et ami de saint François d'Assise). Ce texte, composé de douze strophes de trois vers, tranche par son inspiration dramatique et pathétique sur l'ensemble des autres textes, orientés vers la supplication et l'espérance. (Il a souvent été composé isolément par les musiciens.) En voici quelques vers :

Dies irae, dies illa Solvet saeclum in favilla Teste David cum Sibylla. Quantus tremor est futurus Quando Judex est venturus Cuncta stricte discussurus. Tuba mirum spargens sonum... Mors stupebit, et natura Cum resurget creatura Judicanti responsura... Jour de colère, jour fameux Qui réduira le monde en cendres Témoins David et la Sibylle. Quelle terreur Quand le Juge viendra Tout examiner avec sévérité. La trompette retentira, saisissante... La mort s'étonnera et la nature Quand resurgira la créature Pour rendre compte à son Juge.

5o Offertoire : Domine Jesu Christe... ;

6o Sanctus ;

7o Agnus Dei, où les mots miserere nobis et dona nobis pacem sont remplacés par : dona eis requiem ;

8o Communion : Lux aeterna luceat eis, Domine ;

9o Absoute, qui comprend deux versets : Libera me, Domine, a morte aeterna (« Délivrez-moi, Seigneur, de la mort éternelle ») et In Paradisum deducant te angeli (« Qu'au Paradis les anges te conduisent... »).

L' histoire du Requiem en musique est affectée doublement par l'évolution des formes musicales et par celle de la sensibilité. De ce dernier point de vue, les différents musiciens et les différentes époques ont choisi de mettre l'accent sur tel ou tel aspect. Les textes recueillis et sereins (le Pie Jesu, le In Paradisum) guident l'inspiration d'un Palestrina, d'un Gounod, d'un Fauré surtout. Au contraire, l'âge baroque et surtout l'époque romantique mettent l'accent sur le texte dramatique du Dies irae, et l'ensemble de la messe se colore de violence et de pathétique, non sans contredire parfois la sérénité de l'inspiration générale de la liturgie. Enfin, les nombreux contrastes de mots et d'idées qu'offrent ces textes (Requiem/et lux perpetua ; Quid sum miser.../Rex tremendae majestatis) ont été eux-mêmes abondamment exploités par les musiciens baroques et romantiques, qui ont su en tirer tout le pathétique, voire le théâtral, qu'ils souhaitaient.

Du point de vue formel, la messe de requiem suit l'évolution générale de la messe en musique. La première œuvre d'importance, la Missa pro defunctis de Guillaume Dufay, chantée pour ses propres funérailles (1474), est perdue. Au cours du xvie siècle s'épanouit le requiem polyphonique, soucieux de plastique et de recueillement plus que d'expressivité littérale, avec les messes de Giovanni Pierluigi da Palestrina, de Roland de Lassus, de Cristóbal de Morales (sans oublier celle de Jacques Mauduit, chantée lors des funérailles de Ronsard, en 1586, et dont ne subsiste plus[...]

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Écrit par

  • : directeur de l'Institut de musique et danse anciennes de l'Île-de-France, conseiller artistique du Centre de musique baroque de Versailles

Classification

Pour citer cet article

Philippe BEAUSSANT. REQUIEM [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Verdi - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Verdi

Autres références

  • CHERUBINI LUIGI (1760-1842)

    • Écrit par Marc VIGNAL
    • 588 mots
    • 1 média

    Le compositeur qui, le 10 août 1841, à l'âge de quatre-vingt-un ans, écrit un canon mélancolique sur le long énoncé de son nom — Luigi Carlo Salvatore Zanobi Maria Cherubini — reste surtout présent dans les mémoires pour ses violents démêlés, en tant que directeur du Conservatoire de Paris, avec...

  • DU CAURROY EUSTACHE (1549-1609)

    • Écrit par Pierre-Paul LACAS
    • 490 mots

    Musicien français né à Beauvais, Du Caurroy est surtout célèbre pour ses œuvres religieuses, qui connurent un durable succès jusque vers 1650 ; il est l'un des principaux précurseurs de la musique sacrée du xviie siècle, qui a conduit, à travers N. Formé, à Delalande. Il fut d'abord...

  • DURUFLÉ MAURICE (1902-1986)

    • Écrit par Alain PÂRIS
    • 881 mots

    Dernier survivant de la grande école de l'orgue symphonique française, Maurice Duruflé voit le jour à Louviers le 11 janvier 1902. À la maîtrise de la cathédrale de Rouen, il est l'élève de Jules Haelling (1912-1918), avant de se fixer à Paris, en 1919. Il travaille l'orgue avec...

  • GILLES JEAN (1669-1705)

    • Écrit par Nicole LACHARTRE
    • 364 mots

    Né à Tarascon, Gilles est d'abord enfant de chœur à la cathédrale d'Aix-en-Provence dont la maîtrise est dirigée par Guillaume Poitevin ; il lui succède en 1693. En 1695, il quitte Aix pour Agde, où il remplit les fonctions de maître de chapelle à la cathédrale. En 1697, grâce à l'appui de Monseigneur...

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