PALÉOCLIMATOLOGIE
La paléoclimatologie a pour but de reconstituer les conditions climatiques ayant régné à la surface de notre planète dans le passé et d'expliquer leur évolution. Elle relève donc au premier chef de la géologie pour la reconstitution des faits, mais pour leur compréhension et leur interprétation, elle fait appel à des disciplines aussi variées que la zoologie, la botanique, la biogéographie, la pédologie, la géochimie, l'analyse statistique et la météorologie dynamique.
C'est au xviiie siècle, lorsque des paléontologues tels que Buffon démontrèrent que des animaux de climat chaud, tels les éléphants ou les rhinocéros, vivaient autrefois en Europe et au Canada, que prit forme l'idée selon laquelle les conditions climatiques n'ont pas toujours été les mêmes. À la même époque, plusieurs naturalistes notaient la présence, dans le Jura et les Alpes, de blocs de pierre géants (les blocs erratiques), manifestement érodés et polis par les glaces. Ils conclurent à l'existence, dans un passé lointain, de gigantesques calottes glaciaires responsables de ces dépôts. Cette théorie se heurta alors au scepticisme quasi général de la communauté scientifique qui voyait dans ces blocs la marque du déluge décrit dans la Bible.
Les observations scientifiquement conduites par Johann de Charpentier de 1829 à 1841 et par Louis Agassiz de 1836 à 1840 apportèrent un faisceau de preuves de l'existence des glaciations. Cependant la théorie des âges glaciaires resta l'objet d'âpres controverses pendant une vingtaine d'années jusqu'à ce que l'observation des glaciers de montagne et l'expédition scientifique de 1852 au Groenland fournissent les bases de la géologie glaciaire.
À partir de ce moment, l'étude des glaciations de notre planète fera l'objet d'abondants travaux. Dès 1863, le géologue écossais Archibald Geikie observait des couches sédimentaires contenant des fragments de plantes de climat tempéré intercalés au milieu d'argiles déposées en climat glaciaire. Il en conclut qu'il n'y avait pas eu un âge glaciaire unique, mais une succession de périodes glaciaires séparées par des périodes interglaciaires au climat similaire à celui d'aujourd'hui. Pendant tout le xxe siècle, les géologues vont donc chercher à reconstituer et à expliquer la succession des périodes glaciaires et interglaciaires, en étudiant d'abord les dépôts continentaux quaternaires puis les sédiments marins et les glaces polaires au fur et à mesure du développement des techniques de carottage et de forage.
Une autre voie de recherche paléoclimatique concerne les glaciations très anciennes de notre planète. En 1856, W. T. Blanford fit l'une des découvertes les plus lourdes de conséquences : celle de traces d'anciennes moraines du Permo-Carbonifère dans le centre de l'Inde. Ces roches, âgées de 250 millions d'années, sont situées tellement au-delà des grandes avancées de glace de la dernière période glaciaire qu'on ne peut que saluer le courage de Blanford à annoncer sa découverte, qui, pourtant, devait stimuler tout un courant de pensée et inspirer les théories modernes de l'expansion des fonds marins et de la dérive des continents. En effet, d'autres matériaux glaciaires du Permo-Carbonifère furent identifiés plus tard en Australie, en Afrique du Sud et en Amérique du Sud. Or une glaciation affectant plus que la totalité d'un hémisphère est climatologiquement impossible. Ce paradoxe excita, au début du siècle, l'intérêt du météorologue allemand Alfred Wegener. Sa théorie de la dérive des continents admettait une glaciation dans l'hémisphère Sud, mais limitée à un territoire plus restreint qu'aujourd'hui, et qui se serait morcelé à la fin du Permien. Passionnément repoussée au début, la théorie[...]
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Écrit par
- Jean-Claude DUPLESSY : directeur de recherche au C.N.R.S., Centre des faibles radioactivités, Gif-sur-Yvette
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