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NORMANDIE

À travers les siècles, la personnalité normande s'est exprimée de façon singulièrement variée. Au ixe siècle, les Normands furent avant tout, aux yeux de leurs voisins, des pirates, ceux du xie siècle d'impitoyables conquérants. Depuis le xiiie siècle, on leur fait une réputation de gens riches et rompus aux subtilités du droit. Il y a certainement un tempérament politique normand, dont André Siegfried a justement dit qu'il évoquait celui de l'Angleterre : il est plus sensible aux réalités et aux personnes qu'aux idéologies. Ajoutons-y un penchant indiscutable pour les choses de la mer : au temps de la monarchie absolue, le continent normand et les îles ont fourni aux couronnes furieusement ennemies de France et d'Angleterre des contingents exceptionnels d'amiraux, de capitaines et de colons des terres lointaines. Le dynamisme des années écoulées depuis 1944 a rejeté dans l'oubli les accusations de conservatisme borné que les Normands s'étaient attirées en cédant au xixe siècle aux attraits malsains du malthusianisme et du protectionnisme.

Des Celtes aux Normands

La Normandie ne constitue une entité historique que depuis 911, époque où le roi franc Charles le Simple concéda au chef viking Rollon la région de la basse Seine. Jusque-là, non seulement le vocable de Normandie n'existe pas, mais les pays qui forment aujourd'hui la Normandie n'ont guère de relations entre eux. De 911 à 1204, la Normandie, tout en dépendant nominalement du royaume de France, est un véritable État, l'un des mieux organisés et des plus dynamiques de l'Europe médiévale. Depuis 1204, sa partie continentale n'est plus que l'une des provinces qui constituent la France, tandis que sa partie insulaire suit les destinées de la Couronne anglaise. Le centre de son histoire est donc la période qui s'étend du xe au xiiie siècle ; c'est de là qu'elle a hérité sa personnalité, dont la vive conscience n'est pas près de s'effacer. Le reste n'est que préliminaires ou épilogue.

Les préliminaires offrent fort peu d'originalité. Quand commence, timidement, l'histoire écrite, vers le milieu du iie siècle avant l'ère chrétienne, le pays apparaît divisé entre deux aires de civilisation : au nord de la Seine, les peuples des Véliocasses (de Rouen à l'Oise) et des Calètes (pays de Caux) appartiennent à la Belgique ; au sud du fleuve, les Abrincates de l'Avranchin, les Unelles du Cotentin et des îles, les Bajocasses du Bessin, les Viducasses de la plaine de Caen, les Esuvii (plus tard Sagii) du pays de Sées, les Eburovices de la région d'Évreux, les Lexoves de Lisieux se rattachent à la Gaule celtique. Plusieurs des tribus côtières sont comptées parmi les Armoricains, et les Eburovices forment un rameau du grand peuple des Aulerques qui s'étend aussi sur le Maine et le pays Chartrain.

La Seconde Lyonnaise et la christianisation

La conquête romaine regroupe tous ces peuples au sein d'une seule province, la Lyonnaise, donne à chacun d'entre eux une capitale souvent monumentale, couvre les campagnes de villaeet de petits temples (fana) : c'est l'histoire commune de la Gaule. Au Bas-Empire se produisent deux faits essentiels pour l'avenir. Une province de Seconde Lyonnaise est créée, avec Rouen pour chef-lieu, et reçoit des limites qui sont, à peu de choses près, celles de la Normandie médiévale et moderne. La coïncidence n'est pas un hasard : le cadre civil romain fut adopté par l'Église et le cadre ecclésiastique à son tour devint celui de l'État des ducs de Rouen. D'autre part, le Bas-Empire vit l'apparition du christianisme. La religion nouvelle chemina d'abord le long de l'axe économique Lyon-Rouen, et Rouen eut un évêque dès le début du ive siècle. Les autres cités[...]

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Pour citer cet article

Armand FRÉMONT et Lucien MUSSET. NORMANDIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Abbaye de Jumièges - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

Abbaye de Jumièges

Normandie, X<sup>e</sup>-XI<sup>e</sup> siècle - crédits : Encyclopædia Universalis France

Normandie, Xe-XIe siècle

Le Mont-Saint-Michel - crédits : G. Sioen/ De Agostini/ Getty Images

Le Mont-Saint-Michel

Autres références

  • NORMANDIE, région administrative

    • Écrit par Universalis
    • 3 161 mots
    • 3 médias

    Pour des raisons plus économiques qu’historiques, deux « régions de programme » ont été créées en Normandie au moment de l’organisation administrative du territoire dans les années 1960-1970, la Haute-Normandie qui comprenait les départements de l'Eure et de la Seine-Maritime (chef-lieu...

  • ALENÇON

    • Écrit par Armand FRÉMONT
    • 523 mots
    • 1 média

    Alençon, chef-lieu du département de l'Orne, est situé aux confins de la Normandie et du Maine, dans une région de plaine verdoyante qu'entourent les bocages du Perche et de grandes forêts domaniales sur les hauteurs de Perseigne et d'Écouves. Aux limites du Bassin parisien et...

  • ANGEVIN EMPIRE

    • Écrit par Roland MARX
    • 1 510 mots
    • 4 médias
    ...témoigne de ce désir tout comme l'identité des politiques administratives dans les diverses possessions angevines : le système judiciaire anglais copié en Normandie, les responsabilités des shérifs en Angleterre rendues semblables à celle des baillis normands. Une cour hétéroclite de plus de deux mille fidèles...
  • BEDFORD JEAN DE LANCASTRE duc de (1389-1435)

    • Écrit par Paul BENOÎT
    • 747 mots

    Troisième fils d'Henri IV d'Angleterre, Jean de Lancastre est fait duc de Bedford par son frère Henri V en 1414. Mêlé très jeune aux luttes politiques, il soutient son frère qui lui confie la lieutenance du royaume lors de ses expéditions en France. À ce titre, il prend Berwick aux Écossais...

  • CAEN

    • Écrit par Armand FRÉMONT
    • 996 mots
    • 1 média

    Caen, chef-lieu du Calvados et capitale de la Basse-Normandie jusqu’au 31 décembre 2015, est depuis 2016 le siège du conseil régional de la région Normandie. La ville compte 111 300 habitants et son aire urbaine 403 600 habitants (2012).

    La ville est établie de part et d'autre de l'Orne,...

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Voir aussi