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NIRVĀṆA ET SAṂSĀRA

Le nirvāṇa selon le Mahāyāna

Le nirvāṇa perd de son importance dans le Mahāyāna, le grand mouvement de réforme du bouddhisme du début de notre ère. La recherche de l'« extinction » y est regardée avec dédain, comme entachée d'égoïsme, et les saints du Mahāyāna, les Bodhisattva ou candidats à la condition de Buddha, font vœu de sauver tous les êtres avant de goûter eux-mêmes la béatitude suprême, ce qui recule indéfiniment leur propre délivrance.

La notion de nirvāṇa diffère du reste sensiblement de ce qu'elle était dans le bouddhisme ancien. Tout d'abord, elle n'implique plus la disparition complète et définitive des liens attachant le saint délivré au monde ordinaire et surtout aux êtres qui y vivent ; il s'agit au contraire d'une « extinction non établie » (apratiṣṭhitanirvāṇa), c'est-à-dire non définitive, d'où l'on peut sortir à son gré pour continuer à mener les hommes vers le salut. C'est pourquoi les légendes du Mahāyāna montrent des Buddha quittant leur tombeau (stūpa) pour prêcher la doctrine.

Le Mahāyāna, pour qui tout est vide (śūnya) de nature propre et par conséquent illusoire, purement phénoménal, associe le nirvāṇa au saṃsāra ou monde des transmigrations en un couple de contraires. Le nirvāṇa est comme l'envers du saṃsāra, la réalité ultime cachée derrière les apparences de celui-ci, son aspect incomposé (asaṃskṛta), éternel, immuable, autrement dit sa nature de « vacuité » ( śūnyatā), laquelle n'en est pas moins elle-même vide de nature propre. Le salut est atteint lorsque cesse le jeu des phénomènes et qu'on connaît enfin la vérité, tout comme, pour prendre l'image qui est à l'origine du mot « bouddhisme », la réalité apparaît lorsque l'« éveil » fait s'évanouir les illusions du songe. Cette réalité ultime, qu'on appelle encore quiddité (tathatā), élément des choses (dharmadhātu), nature des Buddha (buddhatā), est dite inconcevable et ineffable, hors du temps et de l'espace, et, malgré sa nature vide, on ne peut affirmer qu'elle n'est pas.

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Écrit par

  • : professeur au Collège de France, chaire d'étude du bouddhisme

Classification

Pour citer cet article

André BAREAU. NIRVĀṆA ET SAṂSĀRA [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BOUDDHISME (Histoire) - Le Buddha

    • Écrit par André BAREAU
    • 4 309 mots
    • 2 médias
    La cessation de la douleur, c'est la cessation de la soif, donc celle des trois racines du mal, convoitise, haine et erreur, leur « extinction » (nirvāṇa) totale, leur complet épuisement. Elle est atteinte ici-bas par les saints bouddhiques du degré le plus élevé, et à plus forte raison par le...
  • BOUDDHISME (Les grandes traditions) - Bouddhisme indien

    • Écrit par Jean FILLIOZAT, Pierre-Sylvain FILLIOZAT
    • 10 641 mots
    • 1 média
    ...présence d'esprit, investigation des choses, énergie, joie, tranquillité, position du psychisme, imperturbabilité. La cessation de la douleur est appelée nirvāṇa, « Extinction ». C'est l'arrêt de toutes les choses régies par la Loi du jeu naturel (dharma), l'arrêt du jeu des cinq ensembles phénoménaux. Il...
  • BRAHMANISME

    • Écrit par Anne-Marie ESNOUL
    • 3 594 mots
    Apparue toute formée aux vie-ve siècles avant notre ère, dans les upaniṣad comme dans le bouddhisme et le jaïnisme, une autre croyance, dont on ne peut préciser l'origine, conditionne la vie religieuse : c'est celle du saṃsāra.
  • EXTINCTION COMPLÈTE DU BOUDDHA

    • Écrit par François CHENET
    • 219 mots

    L'Extinction complète (parinirvāṇa), c'est-à-dire « sans reste de conditionnement », qui scella, pour le Bouddha, l'arrêt de la servitude transmigratoire (saṃsāra) – au terme de 547 existences successives, selon la tradition – et son entrée dans un état de paix éternelle...

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Voir aussi