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ZOHAR LE

Le plus important des ouvrages de la littérature kabbalistique, le Zohar se présente sous la forme d'une collection de livres qui incluent des énoncés midrashiques brefs, mais aussi des développements homilétiques et des discussions sur tel ou tel sujet particulier.

Il ne s'agit pas d'un livre, mais plutôt d'un corpus d'œuvres qui, dans les éditions imprimées, se répartissent en cinq volumes. Les trois premiers volumes sont intitulés Sefer ha-Zohar ‘al ha-Tōrāh (Livre de la Splendeur et de la Loi) ; un autre, qui comprend soixante-dix interprétations du premier mot de la Torah, s'intitule Tiqqūne Zohar (Complément du Zohar). Le cinquième volume, intitulé Zohar Ḥadaš (Nouveau Zohar), fut imprimé à Safed au xvie siècle, après le Zohar proprement dit.

La plus grande partie des énoncés du Zohar est attribuée de manière pseudépigraphique au Tanna, Rabbi Simeon ben Yohai. L'analyse critique du corpus zoharique, entreprise par G. Scholem, a mis en évidence l'existence de trois strates à l'intérieur du corpus. Une strate originelle inclut, en particulier, les écrits dénommés Mildraš ha Ne'ēlam (Le Midrash occulte) et les Sitre Tōrāh (Les Mystères de la Torah) ; une deuxième strate comprend la majeure partie du Zohar ; une dernière englobe le Ra'aya Mehemna (Le Berger fidèle) et les Tiqqūne Zohar. L'analyse stylistique, linguistique et thématique du Zohar a permis d'établir que les deux premières strates ont été composées par Moïse de León entre 1270 et 1300. L'auteur du Ra'aya Mehemna et des Tiqqūnim, demeuré inconnu jusqu'à ce jour, est probablement un disciple de Moïse de León.

Le Zohar fut rédigé dans le dessein de porter un coup d'arrêt au courant rationaliste qui se diffusait alors dans le judaïsme espagnol. Il est spécialement l'expression du courant gnostique de la kabbale espagnole, mais il synthétise en même temps tous les courants antérieurs depuis le Bahir. La théosophie du Zohar est dominée par la mystique de l'unité du Dieu vivant, dont l'être intime, désigné par le terme 'Ēn-Sōph (infini), demeure caché, mais qui se rend manifeste à travers dix aspects essentiels et originaires, les dix sefirot ; le mystique découvre celles-ci dans et par la création. La Torah y est réinterprétée comme un grand corps de symboles représentant la vie cachée de Dieu dévoilée par les sefirot.

Le Zohar s'attache aussi à décrire la relation de l'homme à Dieu, spécialement à travers son interprétation de la prière, qu'il relie à sa cosmogonie et à sa psychologie mystiques.

L'œuvre se répandit lentement deux siècles durant, mais elle en vint ensuite à prendre rang auprès de la Bible et du Talmud. Honni par le judaïsme « éclairé » du xixe siècle, le Zohar retrouve aujourd'hui la place qui lui revient dans l'histoire de la pensée et de la littérature juives.

— Roland GOETSCHEL

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Écrit par

  • : professeur des Universités, directeur du département d'études hébraïques et juives de l'université de Strasbourg-II, professeur associé à l'Université libre de Bruxelles

Classification

Pour citer cet article

Roland GOETSCHEL. ZOHAR LE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • LIVRE DE LA SPLENDEUR, KABBALE JUIVE

    • Écrit par Gérard NAHON
    • 220 mots

    À côté de la Torah et du Talmud axés sur les aspects juridiques et moraux, enseignés publiquement dans les académies, un courant mystique réservé à des initiés se développe à partir de la fin du second temple (70) et durant le Moyen Âge : la Kabbale ou tradition. Des cénacles kabbalistes...

  • CORDOVERO MOÏSE (1522-1570)

    • Écrit par Roland GOETSCHEL
    • 402 mots

    Il fut l'élève de Joseph Karo et de Salomon Alkabetz, et le maître d'Isaac Luria. Cordovero est, avec ce dernier, la plus grande figure du centre kabbalistique de Safed (en Galilée) au xvie siècle. Les deux œuvres principales de Moïse Cordovero sont le Pardess Rimmonim (Jardin...

  • JUDAÏSME - Histoire du peuple juif

    • Écrit par Gérard NAHON
    • 11 244 mots
    • 9 médias
    ...ésotérique, fondé sur des traditions remontant à R. Siméon bar Yoḥaï, est fixé dans la compilation (ou l'œuvre originale ?) de Moïse de León (xiiie s.), le Zōhar (Livre de la splendeur). Sur le plan artistique, les Juifs construisent des synagogues romanes ou gothiques en France et en Allemagne, mauresques...
  • KABBALE

    • Écrit par François SECRET, Gabrielle SED-RAJNA
    • 7 223 mots
    Vers la même époque, entre 1260 et 1280, s'élabore le document littéraire fondamental de la kabbale d'Espagne, le Livre des splendeurs (Sefer ha-zohar). Diffusée sous la forme d'un assemblage pseudépigraphe d'homélies mystiques attribuées à des autorités talmudiques, cette œuvre fut restituée...
  • MOÏSE DE LEÓN MOÏSE BEN SHEM TOB dit (1240-1305)

    • Écrit par Roland GOETSCHEL
    • 392 mots

    Kabbaliste espagnol, Moïse Ben Shem Tob de León est l'auteur de la majeure partie du Zohar ; il fut d'abord attiré par la philosophie, comme en témoigne un manuscrit du Guide des égarés de Maïmonide qui fut copié pour lui en 1264. Par la suite, il se familiarise aussi bien avec les...

Voir aussi