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ISIDORE DE SÉVILLE (560 env.-636)

Tardivement proclamé docteur de l'Église universelle en 1722, mais vénéré de ses contemporains comme « l'image même du savoir antique », Isidore de Séville fut tour à tour l'écrivain latin le plus souvent recopié et lu par le Moyen Âge, et l'un des plus outrageusement décriés par l'hypercritique moderne. En appréciant de manière moins suffisante et plus respectueuse la civilisation du haut Moyen Âge européen, les historiens actuels s'efforcent de comprendre plus équitablement le rôle primordial qu'Isidore n'a cessé de jouer dans la culture du millénaire qui l'a suivi.

L'Espagne wisigothique en mutation

La figure d'Isidore de Séville ne peut s'expliquer hors de la conjoncture historique dans laquelle il s'est formé. Sous l'impulsion du frère aîné d'Isidore, Léandre, avant lui évêque de Séville, le roi wisigoth Reccarède se convertit en 587 de l'arianisme au catholicisme. L'unité de foi renforce ainsi l'unité politique de la péninsule, réalisée par les campagnes de son père Liuvigild, dernier roi wisigoth arien. La reconquête byzantine du Sud est définitivement arrêtée : en 624, Isidore célébrera en Suinthila « le premier monarque à régner sur l'Espagne tout entière » après en avoir chassé les derniers occupants byzantins. Cet accord nouveau, non sans risques, entre l'Église catholique hispano-romaine et le royaume wisigothique converti à la suite de son prince, crée les conditions d'une civilisation nouvelle où peut se réaliser le rêve ancien du roi Athaulf au début du ve siècle : revigorer par la force des Goths la tradition romaine. Ainsi se définissent les attaches historiques et l'intention profonde d'une œuvre littéraire engagée à résoudre les problèmes de son pays et de son temps, après deux siècles d'invasions, de destructions et d'insécurité. Devenu, à la suite de son frère, évêque et conseiller des princes, Isidore contribue, par son action et par ses œuvres, à l'affermissement de la royauté wisigothique, à la pacification des esprits dans l'unité nationale, à la réorganisation de l'Église d'Espagne (en particulier au IVe concile de Tolède, en 633), à la restauration d'une culture hispano-romaine rénovée.

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Écrit par

  • : professeur titulaire à l'université de Paris-IV-Sorbonne, président de l'Institut des études augustiniennes

Classification

Pour citer cet article

Jacques FONTAINE. ISIDORE DE SÉVILLE (560 env.-636) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BESTIAIRES

    • Écrit par Françoise ARMENGAUD, Daniel POIRION
    • 10 728 mots
    • 11 médias
    ...à cette tradition du Physiologus, dont la culture est en somme étroite et le symbolisme arbitraire, l'attitude beaucoup plus intelligente d' Isidore de Séville. Le livre XII de ses Etymologiae (« De animalibus ») montre que, dès le début du viie siècle, il y a des gens qui savent organiser...
  • ENCYCLOPÉDIE

    • Écrit par Alain REY
    • 5 659 mots
    • 6 médias
    ...recueil historique et anthologique. Au siècle suivant, le projet encyclopédique majeur, influent pendant tout le Moyen Âge, est un ouvrage de l'évêque Isidore de Séville (env. 560-636), au service des rois Wisigoths, qu'on nomme Etymologiae ou Origines. C'est une œuvre complexe, à la fois encyclopédie...
  • ÉTYMOLOGIE

    • Écrit par Paul ZUMTHOR
    • 5 411 mots
    ...jusqu'à l'ornementation rhétorique (calembours). Les Pères de l'Église l'utilisèrent comme un moyen auxiliaire en vue de l'interprétation du texte sacré. Isidore de Séville, au début du viie siècle, constitua une somme des spéculations de ce genre : ses Etymologiae (ou Origines : les deux titres sont...
  • MOYEN ÂGE - La littérature latine savante

    • Écrit par Alain MICHEL
    • 3 264 mots
    ...Aristote, pouvait s'accorder à la tradition chrétienne. Mais, dans l'immédiat, on assistait à la régression et à des solutions précaires. Isidore, évêque de Séville sous la domination wisigothique, essayait d'établir un « digest » du savoir antique dans ses Étymologies. Il y...

Voir aussi