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INDO-EUROPÉEN

Principaux caractères morphologiques et syntaxiques

Le caractère essentiel de la morphologie consistait en un système flexionnel très riche – où les mots étaient fléchis, à l'exception des mots-outils, invariables – et en une distinction précise entre le verbe et le nom. Chaque mot indo-européen fléchi se composait d'au moins deux morphèmes : la racine et la désinence. Entre ces éléments pouvaient se greffer un ou plusieurs suffixes. Chacun de ces morphèmes se présentait sous une des formes suivantes : avec une voyelle *ě, c'est-à-dire au degré plein ou normal, avec une voyelle *ǒ, forme appelée au degré fléchi ou sans voyelle, d'où le nom de degré zéro. On distingue en outre un degré plein allongé (*ē) et un degré fléchi allongé (*ō). Ces variations vocaliques quantitatives et qualitatives portent le nom d'alternances. Nombre de ces alternances se retrouvent dans des langues historiques, ainsi dans le grec ancien πέιθ-ομαι, « je crois », degré plein, π́ε-ποιθ-α, au degré fléchi et ̂επ́ε-πιθ-μεν au degré zéro.

La désinence, morphème terminal, était exprimée matériellement ou non ; dans ce dernier cas, on parle de désinence zéro. C'est ce morphème qui indiquait le rôle du mot dans la proposition, bien plus que la place, qui n'avait le plus souvent qu'une valeur stylistique, à l'exception toutefois de la position en tête de phrase réservée à un mot accentogène et de la seconde place où se trouvaient de préférence les clitiques. Si l'on compare l'indo-européen à des langues agglutinantes, on constate que les désinences cumulent plusieurs fonctions, ce qui est encore le cas dans les langues de cette famille qui ont conservé un système flexionnel à l'époque historique. Ainsi, le de latin lupă indique à la fois qu'il s'agit d'un féminin, d'un singulier et d'un nominatif-vocatif ; il en est de même pour le système verbal où *eimi signifie l'idée d'« aller », appliquée, de manière durative et présente, à une première personne du singulier.

L'indo-européen connaissait huit cas : nominatif, vocatif, accusatif, génitif, datif, locatif, ablatif, instrumental ; trois nombres : singulier, duel, pluriel ; et trois genres grammaticaux : neutre, masculin, féminin, évolution d'une étape antérieure où l'animé s'opposait à l'inanimé. Le système flexionnel verbal est aussi riche, bien que, dans les formes personnelles, il n'y ait pas de distinction de genres comme c'est le cas par exemple en sémitique ; par contre, il comportait également trois nombres et trois personnes. L'opposition temporelle se marquait par l'usage de désinences différenciées : pour le présent, on utilisait les désinences primaires ; pour le passé, les désinences secondaires. Si l'action verbale s'accomplissait hors du sujet et que ce dernier ne se sentait pas directement concerné par celle-ci, on employait l'actif, dans le cas inverse le moyen ; c'est ce qu'on appelle la diathèse, qui était marquée explicitement par des désinences particulières. D'autre part, le sujet parlant pouvait envisager le procès soit comme se déroulant réellement, soit comme une réalité dont on attend ou dont on veut la réalisation, soit enfin comme une chose qui est simplement possible même si on la souhaite. Ces trois modalités étaient exprimées de manière morphologique, respectivement au mode indicatif, au subjonctif et à l'optatif. Enfin, il existait différents aspects – duratif, aoristique, perfectif, désidératif et causatif – marqués par des modifications morphologiques ou par des distinctions lexicales. Ainsi, le verbe « être » était rendu par la racine *es- au duratif et au perfectif, tandis qu'à l'aoriste on utilisait le thème[...]

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Écrit par

  • : docteur en philosophie et lettres, professeur ordinaire à l'université de Louvain

Classification

Pour citer cet article

Guy JUCQUOIS. INDO-EUROPÉEN [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Occlusives - crédits : Encyclopædia Universalis France

Occlusives

Autres références

  • INDO-EUROPÉENS (archéologie)

    • Écrit par Jean-Paul DEMOULE
    • 5 145 mots
    • 1 média

    À partir du début du xixe siècle, la plupart des linguistes ont expliqué les ressemblances entre les différentes langues indo-européennes par l'existence d'une langue unique préhistorique (Ursprache en allemand), existence qui impliquait elle-même la présence d'un peuple la parlant...

  • ALLEMANDES (LANGUE ET LITTÉRATURES) - Langue

    • Écrit par Paul VALENTIN
    • 4 345 mots
    • 3 médias
    ...les occupants antérieurs, de qui nous ne savons rien, sinon qu'ils étaient agriculteurs, et des conquérants venus, peut-être, du sud-est de l'Europe. Ces derniers avaient imposé leur langue, issue de l'aire dialectale indo-européenne, c'est-à-dire ressemblant par un certain nombre de traits au latin,...
  • ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Langue

    • Écrit par Guy Jean FORGUE, Hans KURATH
    • 6 289 mots
    • 2 médias

    L'anglais est une langue germanique qui, par sa structure, appartient à la catégorie des langues indo-européennes. Il est étroitement apparenté au frison, au hollandais, au bas allemand qui, avec le haut allemand, constituent le groupe occidental des langues germaniques.

    Importé dans les îles...

  • ARCHÉOLOGIE (Archéologie et société) - Archéologie et enjeux de société

    • Écrit par Jean-Paul DEMOULE
    • 4 676 mots
    • 2 médias
    À un niveau plus large encore, la science allemande s'est illustrée, durant tout le xixe siècle, dans la définition et le traitement du problème « indo-européen » (en allemand, indo-germanisch). La reconnaissance, au début du xixe siècle, d'une parenté linguistique entre la plupart...
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    • Écrit par Raoul VANEIGEM
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    Francisé en « aryen », le terme sanskrit ārya (avestique, airya) signifie « excellent, honorable, noble ». Ainsi se désignent, avec la morgue coutumière des conquérants, les populations de langue indo-européenne qui, vers la fin du IIIe millénaire avant l'ère chrétienne,...

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Voir aussi