IMAGERIE MÉDICALE
Très longtemps limitée aux rayons X de Roentgen, pour lesquels les tissus fortement minéralisés étaient opaques, l'imagerie intègre aujourd'hui l'élasticité tissulaire et les conséquences de la réflexion des ultrasons, aussi bien que les noyaux atomiques de l'imagerie de résonance magnétique. Dans cette « nouvelle imagerie », l'informatique a contribué, à la naissance d'une nouvelle science de l'image et de son interprétation. La décomposition d'un champ en une mosaïque d'éléments quantifiés va permettre l'analyse, la reconstruction, l'élimination de l'inutile, voire l'interprétation : ainsi l'imagerie moderne est « numérique ». Ce procédé quasi universel détecte les plus faibles contrastes, ceux que constituent les grands amas de cellules du foie, de la rate, du cerveau. On analysait fort mal ces « parenchymes » par opacification des vaisseaux ou des organes voisins. Les voici directement révélés.
Médecine et chirurgie ont changé, et l'on ne peut en quelques pages détailler la liste complète des innovations induites par la « nouvelle image », mais il faut souligner trois points de rupture qui ont joué ou joueront encore un rôle essentiel.
C'est d'abord l'irruption de la machine dans le diagnostic. Le médecin demeure lecteur et arbitre, mais c'est l'informatique qui révèle l'anatomie. La coupe est un « extrait du corps » où l'on détectera le mal sans avoir besoin du bistouri chirurgical et où, parfois même, le radiologue saura traiter, drainer, guérir sans effraction, mais avec l'aide discrète de l'ordinateur qui guide ses gestes.
Ensuite, la pléthore d'images et d'informations. Chaque sujet d'« image » devient une pile de coupes qu'il faut explorer une à une jusqu'à la saturation de la vision et de la volonté d'analyse.
Enfin, le fait que, dans un pays comme la France, l'accès à l'image – et parfois, pour le malade, au salut – dépende d'une autorisation administrative et, par là même, d'une volonté politique, limite le bénéfice que les malades peuvent retirer de la progression de l'imagerie moderne. Celle-ci n'en marque pas moins notre civilisation et notre médecine, avec sa totalité significative que rien ne remplace et où l'on a pu voir un des progrès majeurs du genre humain.
Dès lors on ne peut que déplorer le contingentement que le système de soins français impose encore aux professionnels en radiologie-imagerie : il n'y avait en 2006 que 7,4 appareils d'I.R.M. par million d'habitants en France, alors que l'Espagne disposait du double, et l'Allemagne du triple.
Radiologie conventionnelle
Allègre centenaire, la radiologie classique représente donc encore une part importante de l'imagerie médicale bien que les « nouvelles imageries » lui imposent un déclin régulier.
La technique demeure celle de l'ombre chinoise, projetant sur un film la silhouette des organes qui résulte de leur absorption différentielle des rayons X. La radiologie médicale emploie des rayonnements électro-magnétiques d'énergie moyenne. Le faisceau X est émis par rayonnement dû au freinage d'électrons dans une anode de tungstène ; il est « modulé » par l'objet examiné, l'atténuation de l'intensité initiale I0 répondant à la formule Ix = I0eμx, où x est l'épaisseur du corps traversé et μ son coefficient d'atténuation linéaire. Ce coefficient est élevé pour l'os, moyen pour les tissus mous, faible pour la graisse. Le contraste naturel présent dans le corps humain est suffisant pour l'os ou les poumons (plus de 10 p. 100), mais très faible pour les autres tissus (moins de 2 p. 100). La radiologie conventionnelle ne peut donc détecter que des contrastes supérieurs à 4 p. 100 (le scanner, 0,4 p. 100) : poumons ou squelette pour les contrastes naturels, vaisseaux et reins opacifiés à l'iode ou tube digestif à la bouillie barytée lorsque le contraste est insuffisant. La radiographie simple a l'inconvénient de superposer et de mêler les différents plans corporels explorés. Un mouvement inverse du tube et du plan détecteur permet de séparer la coupe contenant le centre d'homothétie, qui constitue une tomographie. Celle-ci, floue et peu discriminante, est progressivement remplacée par les clichés au scanner X.
Quel que soit le procédé radiographique, global ou sélectif, le faisceau X modulé est recueilli sur un détecteur où se crée l'image. On peut observer directement l'image de radioscopie non plus sur l'écran fluorescent (obligation de travail en salle obscure, forte irradiation, image médiocre), mais à partir d'un amplificateur de luminance et d'une chaîne télévisée. Le recueil de l'image peut être réalisé à partir de l'image vidéo (ampliphotographie, radiocinéma). Il emploie plus souvent un film couplé à des écrans renforçateurs fluorescents qui donnent de très bonnes images pour une dose d'irradiation acceptable. Certaines techniques « haute définition » utilisent des phénomènes électrostatiques (xéroradiographie) mais exigent une dose importante.
La radiologie conventionnelle est restée un examen de premier rang dans le cas des pathologies du squelette (crâne, thorax, membres) et dans celles de la glande mammaire. L'étude des vaisseaux est pratiquée en angiographie numérique. Mais tube digestif et appareil urinaire sont de plus en plus explorés par échographie et endoscopie.
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Écrit par
- Maurice LAVAL-JEANTET : professeur, maître de conférences agrégé, chef du service de radiologie à l'hôpital Saint-Louis, Paris
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