GERMANIE
La Germanie antique, qui s'étendait entre la mer du Nord, la Baltique, la Vistule, les Carpates, le Danube et le Rhin, était boisée et marécageuse ; mais depuis l'âge du bronze, la plaine ouverte du nord attirait les migrations. Elle parut aux Romains froide, humide, sauvage et déserte. L'océan surtout frappa leur imagination, avec ses marées. Il leur semblait impie de s'y aventurer.
L'extrême fractionnement des tribus germaniques (Stamme) avait empêché la naissance d'une véritable nation (cf. germains), et Rome, à partir du ier siècle avant J.-C., chercha à infléchir le développement naturel de la société germanique pour la faire servir aux intérêts de la paix et à la défense des frontières impériales. Un des principes constants de la garde du Rhin fut de transporter certaines populations soumises sur la rive gauche pour constituer une barrière contre les autres tribus (cas des Ubiens dès César). Les guerres de Germanie ne furent pas dues à des motifs économiques : l'intérieur, peuplé de populations instables ignorant pour la plupart la monnaie, ne paraissait guère exploitable. Elles s'expliquent plutôt par un souci de sécurité et de prestige.
Après la mort de Varus, Rome jugea préférable d'agir de l'extérieur en divisant pour régner, en pratiquant la politique des chefs et la romanisation des otages. Toutefois, on observe certaines discontinuités dans la politique romaine, dues à la mobilité des peuples germains, ainsi qu'aux vicissitudes intérieures de Rome, malgré l'action de bons gouverneurs. Dans un système économique et administratif conçu pour organiser la conquête et l'exploiter, renoncer à celle-ci était signer son arrêt de mort. L'Empire subit alors une lente infiltration d'esclaves, de travailleurs libres et de peuplades transportées sur la rive romaine du Rhin et du Danube.
Rome et les Germains
Échec d'une grande Germanie romaine
Les fastes triomphaux désignent déjà sous le nom de Germains des Celtes (Belges Gésates) appelés par les Gaulois d'Italie du Nord pour faire une expédition vers le sud de la péninsule (224 av. J.-C.). Les Romains connaissent ensuite les Cimbres (Jutland) et les Teutons (Holstein), peut-être chassés de leurs terres par un raz de marée : défaites romaines en Norique (113), dans la vallée du Rhône (109), en Aquitaine (107), à Orange (105), mais victoires de Marius sur les Teutons à Aix-en-Provence, en 102, et de Marius et Catulus sur les Cimbres à Verceil en Piémont, en 101. À ce moment, le nom de Germains semble avoir été étendu par les Celtes, d'une redoutable tribu (germanique ?) établie dans la région de Liège, aux barbares transrhénans. Les Arvernes appellent en renfort les Germains en Gaule. Les Suèves d' Arioviste colonisent l'Alsace et s'avancent vers l'Ouest et le Sud. Le conseil des Gaules, à l'instigation des Éduens, sollicite alors l'aide de César contre les Germains, et Arioviste est vaincu près de Belfort en 58 avant J.-C. Après avoir tenté deux expéditions de reconnaissance au-delà du Rhin, César décide de fixer sur le fleuve la frontière de l'Empire.
Dans un premier temps, Auguste projette de reporter celle-ci sur l'Elbe. À partir de 16 avant J.-C., Drusus borde le Rhin d'une succession de castella en terre, de Nimègue à Zurich. Drusus, auteur de grands travaux pour faciliter la navigation sur le bas Rhin et les lacs néerlandais (canal et digue), atteint l'Elbe en l'an 9 avant J.-C. ; il meurt au retour de son expédition, et Tibère lui succède. La Germanie semblait soumise. Un autel de Rome et d'Auguste, homologue de celui de Lyon, est élevé à Cologne, chez les Ubiens (Ara Ubiorum). Mais d'amples soulèvements – celui d'Illyrie, et l'anéantissement en 9 après J.-C. des trois légions d'un Varus imprudent et surpris par[...]
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Écrit par
- Raymond CHEVALLIER : directeur de l'Institut d'études latines à la faculté des lettres et sciences humaines de Tours
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Médias
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