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FRANCE L'année politique 1998

En France, l'année politique 1998 a été marquée par trois élections – régionales, cantonales et sénatoriales –, par l'émergence d'un mouvement nouveau, La Droite, créé par Charles Millon, par des divisions et des regroupements au sein de l'opposition, par l'éclatement du Front national et par l'accentuation des dissensions au sein de la majorité « plurielle », dont le président de la République cherche à profiter.

Des élections régionales à risques

Les élections régionales du 15 mai 1998 ont eu des résultats en demi-teinte pour les formations classiques. Les candidats de la majorité obtiennent 36,5 p. 100 des suffrages exprimés, soit un recul de quelque 5 points par rapport au premier tour des législatives de 1997, tandis que ceux de la droite modérée en totalisent 35,8 p. 100, soit une baisse légère par rapport à 1997 mais aussi le score le plus faible jamais obtenu par cette famille politique. L'extrême gauche, en revanche, réalise un score de 4,4 p. 100 (4,98 p. 100 dans les 72 départements où elle est présente), son meilleur résultat après l'élection présidentielle de 1995. Avec près de 15,3 p. 100 des suffrages exprimés, le Front national aligne ses résultats sur ceux de son leader à la présidentielle et de ses candidats aux législatives. L'enjeu de ces élections n'est pas apparu manifeste aux yeux des électeurs : une abstention de 41,9 p. 100, soit 10 points de plus qu'en 1992, montre que les régions restent encore mal assises dans le paysage institutionnel français, le scrutin de liste départementale accroissant ce désintérêt (tabl. 1, 2 et 3).

Ces scores tiennent, à gauche, à la présence de listes communes de la gauche plurielle dans 86 départements métropolitains sur 96 (P.S., P.C. et Verts dans 55 départements, P.S. et Verts dans 31), tactiquement utiles au gouvernement mais peu propices à la maximisation des voix, et au nombre élevé d'autres listes (extrême gauche, chasseurs, chômeurs, etc.). À droite, le traumatisme des législatives n'est pas effacé, même si l'écart entre la droite et la gauche classiques n'est plus que d'un point (contre 5,5 aux législatives).

Le séisme allait provenir de l'élection des présidents de région. La droite détenait, avant le scrutin, 20 des 22 régions métropolitaines. Sur la base des résultats des législatives de 1997, elle aurait dû en perdre 15. Elle allait finalement se trouver majoritaire dans huit régions et à égalité avec la gauche dans deux. Ces résultats clairs furent perturbés par l'extrême droite. Dans sept régions (Bourgogne, Centre, Franche-Comté, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées, Picardie, Rhône-Alpes), un président de droite allait être dans un premier temps élu avec le concours des votes d'élus du Front national. Les présidents élus dans le Centre et en Midi-Pyrénées récusèrent l'apport de voix du Front pour laisser élire un candidat de gauche et, après une première démission, le président de droite de Franche-Comté, finalement réélu, devait définir un code de bonne conduite avec la gauche pour éviter que le Front national n'arbitre la situation. En revanche, les quatre autres présidents, y compris, après une première démission, celui de Bourgogne, devaient accepter les voix du Front. Ce comportement suscita une réprobation énergique du R.P.R. et de l'U.D.F. – qui exclut les siens –, du maire de Lyon, Raymond Barre, comme des partis de gauche et, dans une allocution solennelle du 23 mars, du président de la République qui emboîta le pas du Premier ministre. Au total, alors qu'elle avait la majorité absolue des sièges dans une région et relative dans 9 autres, la gauche n'obtint que 8 présidences sur 22 (Aquitaine, Centre, Île-de-France, Limousin, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Haute-Normandie[...]

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Écrit par

  • : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris

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